Étude américaine du surdiagnostic, sur taille et stade tumoraux

http://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa1600249?af=R&rss=currentIssue

http://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa1600249?query=TOC

 

 

Il s’agit d’une nouvelle étude, rétrospective celle-ci, démontrant elle aussi que la réduction de mortalité serait plus attribuable aux traitements qu’au dépistage. (voir biblio au bas de l'article, autres études d'impact)

Les auteurs, Archie Bleyer de l'université de Portland (Oregon) et Gilbert Welch de l'université de Houston (Texas), avaient déjà publié une étude dans le NEJM il y a 4 ans (New England Journal of Medicine, 22 novembre, vol.367, n°21, p1998-2005) en partant du principe qu'un dépistage utile doit conduire à une diminution du taux de nouveaux cas de cancers de stade tardif.
Selon les données américaines sur plus de 3 décades, l'introduction du dépistage par mammographie a fait que le taux de nouveaux cas  de cancers du sein de stade précoce est passé de 112 cas pour 100.000 femmes à 234/100.000, ce qui fait 122 cas supplémentaires de cancers détectés au stade précoce.
Dans le même temps, le taux de cancers du sein découverts à un stade tardif n'a diminué que de 8 cas pour 100.000 ( de 102 à 94 cas/100.000).
Ce qui voudrait dire que seuls ces 8 cas de moins des 122 cas/100.000 de plus dépistés au stade précoce, auraient progressé vers une maladie à un stade avancé. Tout le reste est surdiagnostic.

Les auteurs estiment après calculs ce surdiagnostic à 30%.
Ils remarquent aussi que la baisse de détection de cancers avancés ne concerne que des cancers à extension régionale, qui ont une survie améliorée grâce aux traitementx dont nous disposons actuellement, alors qu'il n'y a pas de baisse de détection des cancers au stade métastatique, ceux qui répondent mal au traitement et sont létaux. La moindre mortalité de nos jours par cancer de stade avancé est majoritairement attribuable aux traitements plutôt qu'au dépistage, selon les auteurs.

Il est certes pertinent de s’intéresser au stade tumoral (qui prend en compte à la fois taille tumorale et envahissement ganglionnaire), mais depuis plusieurs années la détection de ganglions envahis s’est beaucoup améliorée pouvant fausser l’évaluation du dépistage (technique des ganglions sentinelles).

Donc dans cette nouvelle étude parue en 2016 (référence en haut de page), les mêmes auteurs se sont intéressés plutôt à la taille tumorale seule, qui est en relation avec la gravité du cancer, de façon moins directe que le stade tumoral certes, mais permettant de juger de façon moins biaisée l’efficacité du dépistage. Les auteurs ont mis en comparaison deux périodes : une avant les années 80, donc avant l’implantation du dépistage aux Etats Unis, l’autre période au début des années 2000, donc après l’implantation du dépistage.

Une fois de plus, il convient de s’intéresser aux valeurs absolues. Et à l’ampleur des variations.

Ainsi la baisse des tumeurs de grande taille est de 30 cas pour 100 000 femmes dépistées.

Et de l’autre côté il y a une augmentation de 162 cas de tumeurs de petite taille sur 100 000 femmes dépistées, entre les deux périodes comparées.

On arrive à la conclusion que 132 cas pour 100.000 sont des surdiagnostics.

Les auteurs concluent : "L'importance du déséquilibre indique que les femmes ont considérablement plus de chances d'avoir un surdiagnostic que d'avoir une détection plus précoce d'une tumeur destinée à grossir".

 

  • Etude trois paires de pays comparés, P.Autier, 2011

Autier P, Boniol M, Gavin A, Vatten LJ. Breast cancer mortality in neighbouring European countries with different levels of screening but similar access to treatment: trend analysis of WHO mortality database. BMJ. 2011 Jul 28;343:d4411.

  • Etude de Jorgensen Danemark 2010

Jørgensen KJ, Zahl P-H, Gøtzsche PC. Breast cancer mortality in organised mammography screening in Denmark: comparative study.BMJ. 2010 Mar 24;340:c1241..

  • Etude de Mette Kalager, Norvège 2010

 Kalager M, Adami HO et coll. Overdiagnosis of invasive breast cancer due to mammography screening: results from the norwegian screening program. Ann Intern Med. 2012 Apr 3;156(7):491-9.

  • Etude d’impact, début 2016, Bleyer et Miller

Int J Cancer 2016 15 avril; 138 (8): 2003-12. doi: 10.1002 / ijc.29925. Epub 2015 15 décembre

 

NDLR :

La détection de plus en plus petites lésions entraîne un "biais de sélection", c'est à dire que plus on dépiste, plus on 'récolte' des lésions petites et non agressives (voir étude Harding https://www.cancer-rose.fr/analyse-etude-jama/ : l'augmentation de 10% de l'activité du dépistage engendre une augmentation de 16% de la détection des petites lésions, statistiquement les moins dangereuses).

Donc, plus on améliorera la technologie de l'imagerie médicale, et plus on amplifiera cet effet pervers.

 

 

 

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