ARTICLE « DIS-LEUR »

Dis-Leur, oct2018

Cancer du sein : Le dépistage en questions

Article réalisé par Mr Olivier Schlama, journaliste de Dis-Leur, média indépendant, publié ici avec l'aimable autorisation de l'auteur.

Nous le remercions beaucoup de nous permettre d'en publier l'intégralité, accessible en cliquant sur le lien.

 

Notre revue de presse d'octobre 218 à trouver au bas du site dans "presse."

 

 

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Un plan d’action national contre le surdiagnostic en Australie

Le surdiagnostic nuit aux patients et des mesures s'imposent.

Résumé de Dr Bour Cécile, 15 octobre 2018

https://www.smh.com.au/healthcare/overdiagnosis-is-harming-patients-and-action-is-required-says-chief-medical-officer-20181014-p509jx.html

https://www.mja.com.au/journal/2018/209/8/australia-responding-complex-challenge-overdiagnosis

 

 

A l'heure où Mme Buzyn, notre ministre de la santé, se félicite sur son compte twitter :

"Je l’ai rappelé aujourd’hui à l’@AssembleeNat, nous avons renforcé l’information et la prise en charge du #dépistage du #CancerDuSein, parce que c’est une priorité de santé publique. #OctobreRose #SavoirCestPouvoirAgir  "

Nous assistons, envieux, au pragmatisme salutaire qui a cours dans d'autres pays que le nôtre.

Ce qui se passe ailleurs

Le surdiagnostic est à présent reconnu partout, et c'est son impact sur les ressources de soins de santé qui préoccupe, tant celles-ci pourraient être mieux utilisées pour faire face aux vrais besoins.

Le "Overdiagnosis Working Group from the Guidelines International Network", réseau international sur les lignes de conduite en santé se penche sur le problème, au Danemark le 6ème congrès sur le surdiagnostic, auquel Cancer Rose a participé tournait autour du sujet, Au Royaume-Uni, un groupe permanent du Royal College of General Practitioners s’occupe déjà du surdiagnostic.  Au Québec, au Canada, l’Association médicale du Québec est à l’origine d’un plan visant à sensibiliser la population et à réduire le surdiagnostic.

Et un plan national a été élaboré en Australie pour faire face à ce problème.

En Australie, la base de preuves concernant l'étendue, les causes et les interventions pour prendre en charge le surdiagnostic est en expansion, notamment en raison du financement récent de la recherche octroyé par le Conseil national de la santé et de la recherche médicale (National Health and Medical Research Council (NHMRC)).

Un centre d'excellence en recherche et une subvention de programme financée par le NHMRC se sont associés pour former une alliance de facultés de médecine , de chercheurs, de défenseurs et d'experts en santé publique.

Il s'agit de la  collaboration de recherche Wiser Healthcare qui a pour objectif de produire et de traduire des preuves ( www.wiserhealthcare.org.au).

 

Les facteurs d'expansion du surdiagnostic

Les facteurs de propagation du phénomène de la surdétection sont :

  • la croyance culturelle et médicale qu'un empilement de tests sera bénéfique pour la santé,
  • La croyance que les avancées technologiques permettront une détection de plus en plus petites lésions qui permettraient de régler le problème de la maladie,
  • La peur des professionnels de santé de ne pas en faire suffisamment,
  • Les préjugés dans les prise de décision,
  • Les attentes du public qu'on "fasse" quelque chose .
  • Le tout arrosé d'incitations financières du système de santé sur les professionnels de santé prescripteurs.

Parmi les solutions de la désescalade on trouve :

  • L'information des populations,
  • L'encouragement à la prise de décisions partagées,
  • Des campagnes de sensibilisation du public non pas aux maladies mais à ce problème de surmédicalisation, sensibilisation aussi à la qualité de la prise en charge médicale plutôt qu'à la quantité..

 

Une épidémie de surdiagnostics

Le professeur Brendan Murphy, principal conseiller médical du ministre et du ministère de la Santé a salué l'initiative, qualifie le surdiagnostic de «problème important dans tous les pays dotés de systèmes de santé avancés».

Il a souligné les recherches de l'OCDE montrant que les systèmes de santé gaspillaient des milliards de dollars dans des soins de santé sans valeur ni efficacité.

"Nous devons nous assurer que nous ne finançons que ce qui profite aux patients."

Le Dr Ray Moynihan , co-auteur du journal Medical Journal of Australia et chercheur principal au Centre de recherche sur la pratique fondée sur les preuves de la Bond University , a déclaré que le surdiagnostic avait atteint des proportions épidémiques, particulièrement préoccupant en matière de dépistage du cancer de la thyroïde, du sein, de la prostate.

Le surdiagnostic menace la viabilité des systèmes de santé et gaspille les ressources qui pourraient être mieux utilisées en santé..

Plusieurs initiatives ont déjà été mises en place pour lutter contre le surdiagnostic, notamment la campagne Choosing wisely, ou campagne "Choisir avec sagesse"

Déjà en 2017 l’autorité indépendante australienne du cancer, le Cancer Council, avait approuvé l’appel de la part de médecins et de chercheurs, pour concevoir ce plan visant à protéger les patients du surdiagnostic et du surtraitement des maladies. Voir notre article à ce sujet : https://www.cancer-rose.fr/les-patients-souffrent-de-trop-de-medecine/

Et en France, pays des Lumières ?

En France que fait-on pendant ce temps ? Ah oui, notre ministre de la santé se planque sous le parapluie de la promotion du dépistage, ça évite de réfléchir et comme ça on ne risque rien.

Mais les parapluies, ça peut se retourner à l'envers et vous retomber dessus comme à Toulouse, où un vent rageur et désapprobateur a escamoté cette belle suspension rose de promotion urbaine du dépistage *.

La concertation citoyenne avait demandé de ne plus infliger aux citoyennes cette campagne outrancière et infantilisante.

On voit comment nos citoyens sont écoutés dans notre pays, lequel est déjà à la traîne d'initiatives modernes et intelligentes en vogue dans ces autres Eden de sagesse médicale tout autour de nous.

 

*Merci à Mme Anne Delbreilh -Ayoub, auteure de cette photo.

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« Aujourd’hui, un homme m’a touché les seins » : le Gérard de la com’ Octobre Rose ?

ANNETTE LEXA

11 Octobre 2018

Nous pensions naïvement que la cuvée Octobre Rose 2018 aurait fait preuve d’un peu moins de sexisme que les cuvées passées. Les #BalanceTonPorc , les dénonciations des violences gynécologiques faites aux femmes ayant envahi les espaces médiatiques cette année, nous pensions que l’idée aurait germé dans la tête des organisateurs de ces festivités qu’il était préférable d’éviter les couleurs roses genrées, les dégoulinades émotionnelles sexistes, les blagues vulgaires.
Nous n’avions pas été jusqu’à imaginer que lesdits organisateurs et autre opportunistes d'Octobre Rose seraient allés sur notre site pour se renseigner sur le bien fondé de cette pratique. Non, nous  connaissons le monde….

Aussi quand nous avons découvert cette affiche réalisée par le service de communication de la communauté de communes de Sanvignes-les-Mines, nous nous sommes dits que nous allions le sélectionner pour le Gérard de la Communication Octobre Rose 2018.

« Aujourd’hui, un homme m’a touché les seins »

Une jeune femme sans soutien gorge, lève le bout de tissu qui lui couvre sa poitrine aguichante et semble trouver satisfaction que deux mains de « docteur »  masculin donc - les lui palpe d’une manière fort peu orthodoxe, d’autant que « Ce n’était pas mon mec mais je me suis laissée faire ». 

Ses yeux globuleux pourraient  faire penser à un exophtalmie thyroïdienne et nous ne saurions trop lui conseiller d’aller se faire palper la thyroïde plutôt que les seins, priorité oblige.

Donc cette affiche est censée « sensibiliser » les femmes de 50 à 74 ans au dépistage organisé du cancer du sein. Pour celles qui, comme moi ont passé les 50 ans, qui sont dans le gros du troupeau – je ne parle même plus de la femme de 70ans – trouvez vous normal que nous renvoyons encore une telle image dégradante dans la société ? Une vieille courge qui trouve sympa et festif, voir carrément excitant (la coquine !.. sans en parler à son mec, dites donc..) d’aller se faire coincer les seins entre deux plaques glaciales par un.e assistant.e en radiologie.

Lui a t-on expliqué que sur 1000 femmes dépistées, 100 seront alarmées et biopsées pour rien et que 5 seront surtraitées (chirurgie – radiothérapie – chimiothérapie - hormonothérapie) alors que ce cancer n’aurait jamais mis sa vie en danger ? Et qu’une peut-être mourra des suites du traitement (atteinte de coronaires par irradiation, aplasie médullaire et autres joyeusetés). Non bien sûr.

https://cancer-rose.fr/wp-content/uploads/2019/07/affiche_depistage-mammographiqueA4-2.pdf

De la part du service de communication de Sanvignes-les-Mines, c’est totalement irresponsable, voire criminel de ne pas donner cette information. Encore plus que d’avoir choisi cette image sexiste.

Espérons qu’Octobre Rose 2019 sera moins rose, moins sexiste, moins vulgaire, moins ringard et que l’information donnée aux femmes sera plus équilibrée. Pour cela, nous avons besoin de vous tous. Relayez, diffusez largement sur les réseaux sociaux. Surtout si vous connaissez des responsables de la Mairie de Sanvignes-les-Mines et de Blanzy. Dites leur que Cancer Rose est sur le point de leur décerner le Gérard de la Com’ Octobre Rose 2018. En prime, ils pourront télécharger notre plaquette d’information directement sur notre site. Et ne pourront plus dire, en 2019, « on ne savait pas ». »

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Le dépistage du cancer du sein à l’aune des critères OMS

Par Dr Bour Cécile

21 septembre 2018

Sur le site de la Haute Autorité de santé vous trouverez  sur cette page dépistage cancer broncho-pulmonaire, une synthèse expliquant pourquoi la HAS ne recommande pas le dépistage systématique du cancer broncho-pulmonaire chez le fumeur.

Les conditions pour un dépistage possible et utile, édictées par l'OMS, sont énumérés par l'intervenante dans cette vidéo : critères d'un dépistage utile

Les 6 critères principaux :

1- Une maladie détectable précocement avant l'apparition des symptômes

2- Un test fiable

3- Des traitements efficaces contre la maladie doivent exister

4- Les personnes à risque doivent être identifiables

5- Le dépistage doit notoirement faire décroître la mortalité par cancer.

6- La balance bénéfice/risques doit être en faveur d'un bénéfice prépondérant par rapport aux risques.

Reprenons à notre compte lesdits critères pour l'analyse de la pertinence du maintien du dépistage organisé du cancer du sein.

 

1- Maladie détectable précocement avant symptômes.

Oui et non.

Les cancers avec un temps de séjour long dans le sein, donc peu évolutifs, sont détectés facilement par le dépistage avant leurs symptômes, car lentement progressifs justement. Ils participent pour beaucoup du surdiagnostic.

En revanche les cancers de mauvais pronostic, à potentiel évolutif important et à croissance rapide sont 'loupés' au dépistage, car évoluant entre deux mammographies, et trop véloces pour être 'rattrapés'. Ils sont détectés cliniquement par des symptômes inquiétants et sont volumineux au moment du diagnostic en raison de leur vélocité.

L'histoire naturelle du cancer n'est donc pas linéaire et prévisible, et elle n'est toujours pas connue à l'heure actuelle.

2- Fiabilité du test

Non

La mammographie est un mauvais outil de dépistage, elle a une bonne sensibilité pour les lésions atypiques et les cancers in situ, les moins agressifs ; elle a en revanche une mauvaise sensibilité pour les cancers de haut stade, les triple négatifs, les formes infiltrantes.

3-Des traitements efficaces

Oui

Les traitements sont efficaces, on dit que 9 cancers /10 guérissent, mais même les non-dépistés.

C'est d'ailleurs pour cette raison, d'autant plus, que l'utilité du dépistage s'amenuise.

Cf : étude Norvège

4-Personnes à risque identifiables.

Non

On peut isoler des facteurs de risque prédisposant au cancer, comme l'exposition à des toxiques, le travail de nuit, les antécédents familiaux....

Mais toutes les femmes tabagiques ou travaillant de nuit ne vont pas automatiquement développer un cancer du sein, et il n'y a pas de caractère reliable entre un facteur de risque précis et le cancer du sein, pas de façon aussi nette que le fait de fumer et le fait de développer un cancer broncho-pulmonaire (et pourtant là aussi le dépistage systématique des fumeurs n'est pas recommandé).

D'autre part seulement 5% des cancers sont héréditaires. C'est un phénomène trop rare pour imposer un dépistage à tout une population saine et sans risque familial.

Des femmes sans aucun risque, ni d'exposition, ni intrinsèque, peuvent développer un cancer du sein, sans 'raison' apparente.

5-Décroissance de mortalité

Non

Des études d'impact ont montré que la décroissance de la mortalité pour plusieurs cancers solides était effective depuis les années 90, et n'étaient pas imputables au dépistage, puisque ce modèle de décroissance était retrouvé aussi pour des cancers ne faisant pas partie de programme de dépistage.

étude d'impact

En matière de cancer du sein, les avancées thérapeutiques sont invoquées pour expliquer l'amélioration de la situation depuis les années 60, peut-être aussi la meilleure vigilance des femmes et du corps médical par rapport à la palpation et l'examen des seins ; les campagnes de véritable prévention portent-elles vraisemblablement également leurs fruits (mangez moins, bougez plus, fumer tue etc...)

Nous citons à nouveau cette toute nouvelle étude norvégienne  étude Norvège

qui suggère que le dépistage n'est pas le responsable de la décroissance de mortalité. Il n'est en effet pas associé à une réduction plus importante de la mortalité par cancer du sein chez les femmes éligibles au dépistage par rapport aux femmes non éligibles.

Les femmes qui se font dépister vivent plus longtemps parce que toutes les patientes atteintes d’un cancer du sein vivent plus longtemps.

Depuis 1996 la mortalité en France reste stable, aux alentours de 11 000 à 12 000 décès par cancer du sein/an, comme vous pouvez le lire sur ces tableaux excel du CePiDC de 1996 à 2012 (téléchargement en cliquant dessus) :

NATFPS06205 (1)

CepiDC, 2013 et 2016, taux bruts de mortalité stables

2013 (1)

2016

6-La balance bénéfice/risque en faveur du bénéfice

Non

Ceci n'est clairement plus le cas, même dans les hypothèses les plus favorables, comme l'évaluation du rapport Marmot, il y a toujours davantage de surdiagnostic par rapport aux "vies sauvées".

M.G. Marmot, D. Altman, D. Cameron, J. Dewar, S. Thompson, M. WilcoxThe benefits and harms of breast cancer screening: an independent review

Lancet, 380 (2012), pp. 1778-1786.  . Marmot

D'autres analyses indépendantes sont plus sévères encore, voir notre synthèse ici : https://www.cancer-rose.fr/le-sur-diagnostic-un-graphique-pour-expliquer/

Lorsqu'on cumule les trois maléfices essentiels du dépistage systématique du cancer du sein, surdiagnostic, fausses alertes, cancers radio-induits, décès imputables aux surtraitements, on obtient toujours une balance bénéfice/risques défavorable.

Conclusion :

Des six critères cités par l'OMS, nous en avons trouvé un seul qui est respecté par le dépistage systématique du cancer du sein.

Sur 6 conditions, le dépistage ne répond pas à 5 d'entre elles.

Alors pourquoi la HAS ne réalise pas une aussi jolie vidéo pédagogique et explicative pour les femmes concernant le dépistage de masse du cancer du sein ?

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une étude norvégienne confirme : le dépistage par la mammographie systématique ne réduit pas la mortalité par cancer du sein

https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/ijc.31832

publication du 25/08/2018

le dépistage par la mammographie systématique ne réduit pas la mortalité

Effet du dépistage organisé par mammographie sur la mortalité par cancer du sein: une étude de cohorte basée sur la population en Norvège

Auteurs : Mette H. Møller , Mette Lise Lousdal , Ivar S. Kristiansen , Henrik Støvring

 

L'auteur principal, Henrik Stoving, biostatisticien, explique : "Le fait est que plus les méthodes de traitement s'améliorent, moins le dépistage est bénéfique"

Méthode :

Les chercheurs ont suivi des femmes norvégiennes de 30 à 89 ans (cohortes de naissance 1896‐1982 réparties en trois groupes d'âges, les femmes éligibles au dépistage, les femmes d'âge au-delà, les femmes plus jeunes), et ils ont identifié celles qui ont développé un cancer mammaire sur la période 1987-2010, permettant de comparer les nombres de décès dans les périodes avant l'instauration du dépistage systématique et après. (NDLR : la campagne nationale de dépistage a été instaurée en 1996 en Norvège).

Résultat :

Le résultat était le suivant : Les trois groupes d'âge ont connu une réduction de la mortalité, mais la diminution chez les femmes éligibles était à peu près la même chez les femmes non éligibles.

Autrement dit : Le dépistage par mammographie n'était pas associé à une réduction plus importante de la mortalité par cancer du sein chez les femmes éligibles au dépistage par rapport aux femmes non éligibles.

Les auteurs expliquent encore : "Les femmes qui se font dépister vivent plus longtemps parce que toutes les patientes atteintes d'un cancer du sein vivent plus longtemps. Nous avons maintenant de meilleurs médicaments et une chimiothérapie plus efficace. Le système de santé réagit plus rapidement qu'il y a une décennie. Il ne semble pas qu'il y ait moins de femmes qui meurent d'un cancer du sein à la suite d'un dépistage par mammographie".

En clair, plus les traitements sont efficaces, plus un dépistage perd en utilité, d'autant que les effets adverses priment sur le bénéfice.

NDLR:

Encore une fois nous soulignons l'importance de ne pas confondre survie et espérance de vie ; contrairement à une croyance générale et diffusée par les médias et les campagnes roses, avec le dépistage systématique on détecte plus tôt des cancers qui se seraient manifestés par des symptômes plus tard, sans qu'il y ait de perte de chance pour la patiente, ils seront guéris en temps et en heure ; de ce fait, on a une illusion d'optique, on anticipe la date de naissance du cancer, la personne vivra plus longtemps avec la connaissance d'être une patiente, mais ne vivra pas globalement plus longtemps.

Le coût :

Lorsqu'on considère que le coût du dépistage en France, selon les chiffres de la Haute Autorité de Santé, s’élève à 250 millions d’euros par an, qu'il y a un surdiagnostic massif et des effets adverses cumulés ( surdiagnostic, fausses alertes, cancers radio-induits) surpassant le bénéfice, et que les citoyennes lors de la concertation ont demandé une évaluation du dispositif, il nous semble qu'il est plus que temps que les autorités sanitaires prennent des dispositions pour en informer loyalement les femmes et qu'on se penche sur autre chose que cette gabegie afin d' appréhender plus efficacement le cancer du sein et l'accès aux thérapeutiques pour toutes les femmes..

Le retentissement sur les mastectomies :

Autre chose insuffisamment évoqué, le retentissement sur les ablations de seins ; dans tous les pays où le dépistage a été instauré on enlève toujours plus de seins.

Nous renvoyons à notre propre étude conduite en France :

étude mastectomies en France

analyse étude CR

 

 

 

 

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Congrès de Copenhague Preventing Overdiagnosis 20-22 août 2018

Le 20 août 2018

Présentation de 20 minutes (keynote) par Jean Doubovetzsky et Cécile Bour,

"Dépistage du cancer du sein, réelles avancées et double langage"

Pour accéder au PPT, cliquez sur l'image ci-dessous :

CAPTATION VIDÉO DE NOTRE PRÉSENTATION

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Ce que les statistiques du dépistage du cancer nous disent vraiment

Ce texte pédagogique sur le site de l'institut du cancer américain explique que le discours sur le dépistage du cancer se modifie parmi la communauté médicale.

https://www.cancer.gov/about-cancer/screening/research/what-screening-statistics-mean

MOINS DE RECOMMANDATIONS A DEPISTER

Globalement, les récentes tendances vont dans le sens d'une moindre recommandation de dépistage de routine, plutôt que d'en faire davantage. Ces recommandations sont basées sur l'évolution, même contre-intuitive, de la compréhension du fait que plus de dépistage ne se traduit pas nécessairement par moins de morts par cancers, et que certains dépistages feraient en réalité plus de mal que de bien.

Pour certains types de cancers courants, comme le cancer du col de l'utérus, le cancer colorectal, le poumon et le cancer du sein, des essais cliniques avaient montré que le dépistage sauvait des vies. Néanmoins, l'ampleur du bénéfice était largement incompris. Dans le cas des mammographies de femmes entre 50 et 59 ans par exemple, il est nécessaire de dépister plus de 1300 femmes pour sauver une vie. De tels calculs ne prennent pas en compte le potentiel dommage du dépistage, comme les suivis inutiles et invasifs après tests de dépistage et l'anxiété causée par les faux positifs.

Beaucoup de confusion autour du bénéfice du dépistage provient de l'interprétation des statistiques qui sont souvent utilisées pour décrire les résultats d'études sur le dépistage. L'augmentation de la survie (le temps pendant lequel une personne survit après son diagnostic de cancer) parmi la population qui s'est soumise à un dépistage du cancer est souvent considérée comme impliquant que ce test sauve la vie.

Mais la survie ne peut être utilisée avec précision dans ce but, en raison de multiples sources de biais.

LE BIAIS D'AVANCE AU DIAGNOSTIC

Le biais d'avance au diagnostic survient lorsque le dépistage permet de trouver un cancer plus tôt que le moment où le cancer aurait été trouvé en raison de l'apparition de symptômes, mais que ce diagnostic plus précoce ne change rien à l'évolution de la maladie.

Graphique 1

Dans le scénario montré ici, un homme présentant une toux persistante et une perte de poids se voit diagnostiqué un cancer du poumon à l'âge de 67 ans, il décède à l'âge de 70 ans. La survie à 5 ans pour un groupe de patients analogue à cet homme est de 0%.

Si cet homme est dépisté et son cancer détecté plus tôt, disons à 60 ans, mais qu'il décède à 70 ans (ligne du bas), sa vie n'est pas prolongée, mais la mesure de la survie à 5 ans d'un groupe de patients correspondant au cas de cet home est de 100%.

Credit: O. Wegwarth et al., Ann Intern Med, March 6, 2012:156

L'apparente importante augmentation de la survie à 5 ans du graphique est une illusion, expliquée par Lisa Schwartz, MD, MS, professeur de médecine et codirectrice du Centre de médecine et des médias de l'Institut Dartmouth : "dans cet exemple, cet homme ne vit pas même une seconde supplémentaire. Cette distorsion représente un biais de délai (d'avance au diagnostic)."

Le biais d'avance au diagnostic est intrinsèque à toute comparaison de survie. Il fait du temps de survie après détection par dépistage- et, par extension, après diagnostic précoce du cancer - une mesure intrinsèquement inexacte du fait que le dépistage sauve des vies.

Malheureusement, la perception d'un allongement de vie après détection peut-être très puissante sur les médecins, note Donald Berry, Ph.D., professeur de biostatistique au MD Anderson Cancer Center de l'Université du Texas.

"Un brillant ocnologiste me disait, 'Don, tu dois comprendre, il y a 20 ans, avant la mammographie, je voyais une patiente avec cancer du sein et 5 ans après elle était morte. Maintenant je vois des patientes avec cancer du sein, et 15 ans plus tard elle reviennent sans récidive ; il est évident que le dépistage a provoqué ce miracle.' Voilà ce qu'il racontait. Et je me devais de dire 'non, ce biais d'avance au diagnostic peut tout à fait expliquer la différence entre ces deux groupes de patients'."

BIAIS DE LONGUEUR DE TEMPS (ou BIAIS DE SELECTION (de cancers) PAR LENTEUR D'EVOLUTION) / SURDIAGNOSTIC DANS LE DEPISTAGE.

Un autre phénomène trompeur dans les études de dépistage est l'échantillonnage biaisé par le biais de longueur de temps (length bias). Ce biais se réfère au fait que le dépistage est propre à sélectionner davantage les cancers à croissance lente et les moins agressifs, qui peuvent séjourner dans le corps plus longtemps que les cancers à croissance rapide avant apparition des symptômes.

Avec n'importe quel test de dépistage « vous allez détecter les cancers à croissance lente de façon disproportionnée, parce que la période préclinique où ils peuvent être détectés par le dépistage mais sans provoquer de symptômes - ce qu'on appelle le temps de séjour - est plus longue» , explique Dr Berry.

L'exemple extrême du length bias est le surdiagnostic, dans lequel un cancer à croissance lente trouvé par dépistage n'aurait jamais occasionné de dommage ou n'aurait jamais requis de traitement durant toute la vie de la patiente.

A cause du surdiagnostic, le nombre de cancers de stade précoce trouvés représente également une mesure inadéquate pour juger si le dépistage sauve des vies. (voir le graphique pour explication suivante.)

Graphique 2

Dans le scénario ci-dessus(encart du bas), 2 000 personnes sont surdiagnostiquées après l'introduction d'un test de dépistage. Cela veut dire que le test détecte les cancers qui ne sont jamais destinés à tuer. L'ajout des 2 000 patients surdiagnostiqués au groupe de 1 000 patients atteints d'un cancer agressif découvert à cause de symptômes gonfle artificiellement le taux de survie à 5 ans de 40% à 80%.(NDLR : on additionne les survivants du dépistage (qui ne seraient pas décédés de leur cancer) aux malades survivants de cancers graves, cela fait que le rapport augmente ainsi artificiellement). L'augmentation spectaculaire apparente de la survie à cinq ans est une illusion. Il y a exactement le même nombre de personnes décédées. Cette distorsion montre le biais du surdiagnostic.

Crédit: O. Wegwarth et autres, Ann Intern Med, 6 mars 2012: 156

NDLR : le surdiagnostic en matière de cancer du sein est évalué, selon les études internationales les plus récentes, au-delà des 20% allégués par les autorités sanitaires françaises, voir dans notre rubrique "études" ; actuellement le surdiagnostic en matière de dépistage du cancer du sein serait plutôt aux alentours de 40%.

COMMENT MESURER LES VIES SAUVEES

En raison de tous ces biais, la seule façon fiable de savoir si un test de dépistage du cancer réduit la mortalité par cancer est de faire des essais randomisés qui montrera une réduction de mortalité par cancer dans la population soumise au dépistage comparée à celle appartenant au groupe témoin (non dépistée).

Dans l'essai ' National Lung Screening Trial (NLST) ', le dépistage par tomodensitométrie spiralée à faible dose a permis de réduire de 15% à 20% les décès par cancer du poumon par rapport aux radiographies pulmonaires chez les gros fumeurs. (Des études antérieures ont montré que le dépistage par radiographie thoracique ne réduisait pas la mortalité par cancer du poumon.)

Néanmoins, les améliorations de mortalité attribuable au dépistage semblent souvent minces-et elles sont minces-parce que la probabilité pour une personne de décéder d'un cancer donné, heureusement, est aussi mince. "Si le risque de décéder d'un cancer est faible au départ, il n'y a pas beaucoup de risque à réduire. Ainsi l'effet même d'un bon test de dépistage doit être minime en termes absolus. "(Dr Schwartz).

Par exemple, dans le cas du NLST, une diminution de 20% du risque relatif de décéder du cancer du poumon se traduit par approximativement 0,4% de réduction de mortalité par cancer du poumon au bout de 7 années de suivi, explique Barry Kramer, MD, MPH, directeur de la Division de la prévention du cancer du NCI .

(NDLR : par exemple La réduction du risque relatif attribuable au dépistage de décéder par cancer du sein est de 20% ; le risque de décéder d'un cancer du sein est environ de 5 % à l’âge de 50 ans; une diminution de 20 % fait donc passer ce risque à 4 %.)

Une étude publiée en 2012 dans Annals of Internal Medicine par le Dr Schwartz et ses collègues a montré comment ces réductions relativement faibles de la mortalité dues au dépistage peuvent dérouter même les médecins expérimentés, par rapport au paramètre de l'amélioration importante de la survie, potentiellement trompeur.

Pour bien comprendre la différence entre risque relatif et absolu, lire ici : https://web.archive.org/web/20170623084247/http://hippocrate-et-pindare.fr/2017/01/01/resolution-2017-non-au-risque-relatif-oui-au-risque-absolu/

DIFFICILE, MÊME POUR DES MEDECINS EXPERIMENTES

Pour évaluer le niveau de compréhension des statistiques de dépistage par les médecins, le Dr Schwartz, le directeur du centre de Médecine et Media de l'Institut de Darmouth (Dr Steven) et des collaborateurs de l'Institut Max Planck pour le Développement Humain (Allemagne) ont conçu un questionnaire en ligne basés sur deux tests de dépistage hypothétiques. Ensuite ils ont soumis le questionnaire à 412 médecins, spécialistes de médecine interne ou médecins généralistes, recrutés par l'intermédiaire du Harris Interactive Physician PanelExit Disclaimer. (institut de sondages et analyses).

Les effets de ces deux tests de dépistage hypothétiques sont décrits aux participants de deux façons : en termes de survie à 5 ans, et en terme de réduction de mortalité. Les participants recevaient aussi en sus d'autres informations comme le nombre de cancers détectés et la proportion de cas de cancers détectés à un stade précoce.

Les résultats de l'enquête montre un malentendu généralisé.. Presque autant de médecins (76% des sondés) croient (faussement) que l'augmentation de survie à 5 ans démontre l'efficacité du test à sauver des vies que de médecins qui croient (à juste titre) que ce sont les données de mortalité qui en fournissent la preuve (81% des sondés). (on suppose qu'on pouvait cocher les deux...)

Environ la moitié des médecins induits en erreur pensaient que simplement le fait de trouver plus de cas de cancers dans un groupe de population soumis au dépistage comparé à un groupe non dépisté, cela démontrait que le dépistage sauvait des vies. Et 68% des médecins sondés ont répondu qu'ils seraient plus enclins à recommander le dépistage si la preuve était faite qu'il détectait davantage de cancers à un stade précoce.

Les médecins interrogés étaient également trois fois plus susceptibles de recommander le test étayé par des données de survie non pertinentes que le test étayé par des données de mortalité pertinentes.

Pour résumer «la majorité des médecins de soins primaires ne savaient pas quelles statistiques de dépistage fournissaient des preuves fiables sur le fonctionnement du dépistage», écrit le Dr Schwartz et ses collègues. "Ils étaient plus enclins de recommander un test de dépistage étayé par des preuves non pertinentes ... que celui étayé par les preuves pertinentes, à savoir la 'réduction de la mortalité par cancer grâce au dépistage'."

Cette lacune dans la compréhension empêchent les patients d'obtenir une information dont ils ont besoin pour leur choix éclairé sur le dépistage du cancer. Dans une étude de suivi réalisée par un chercheur https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24145597, un peu moins de 10% de patients interrogés disaient que leur médecin leur avait expliqué le problème du surdiagnostic et du surtraitement lorsqu'ils ont parlé du dépistage de cancers.

Par opposition, 80% disaient qu'ils souhaiteraient obtenir une information de la part de leur médecin sur le potentiel dommage du dépistage autant que sur son bénéfice.

ENSEIGNER AUX DEPISTEURS

Selon Dr Schwartz : "D'une certaine manière ces résultats ne sont pas surprenants, car je ne pense pas que ces statistiques font partie du cursus des études médicales standard." "Nous devrions enseigner aux étudiants en médecine comment interpréter correctement ces statistiques et de déjouer l'exagération."

Certaines facultés ont commencé (plusieurs universités de médecine US).

L'équipe UNC (université Caroline du Nord) a également reçu une subvention de recherche de l' Agence pour la recherche et la qualité en soins de santé pour financer un Centre de recherche sur l'excellence en services cliniques préventifs de 2011 à 2015. «Une partie de notre mandat était de parler non seulement aux étudiants en médecine mais aussi aux médecins des communautés, pour les aider à comprendre les avantages et les inconvénients du dépistage », a déclaré le Dr Harris.

....

Drs. Schwartz et Woloshin pensent également qu'une meilleure formation des journalistes, des défenseurs et de quiconque diffuse les résultats des études de dépistage est essentielle. "

Beaucoup de gens constatent ces messages, alors les gens qui les écrivent doivent comprendre [ce que les statistiques de dépistage du cancer signifient vraiment]", a déclaré le Dr Woloshin.

Les patients également ont besoin de connaître les bonnes questions à poser à leur médecin. Toujours demander les vraies valeurs, ce qu'on doit demander n'est pas la survie à 5 ans mais "quelle est ma probabilité de décéder de la maladie lorsque je suis dépisté et lorsque je ne le suis pas ?"

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Résistances des femmes au dépistage du cancer du sein

Cancer Rose vous offre une tribune citoyenne. Vous aussi, vous pouvez témoigner.

Mémoire :

Les freins et les résistances au dépistage du cancer du sein, quand les femmes veulent se réapproprier leur corps.

 

6 juillet 2018

 

MMe Isabelle Teychene a fait appel à notre site dans le cadre d'un mémoire en sociologie et en études en démographie, mémoire qui a pour sujet les résistances des femmes à participer au dépistage organisé du cancer du sein. Cette étude est très originale, car souvent sont invoquées des raisons sans qu'elles n'aient jamais été vérifiées.

Vous pourrez retrouver son mémoire intégral au bas de l'article, téléchargeable, avec l'aimable autorisation de l'auteure.

Voici les principaux résultats de son étude, certains sont surprenants.

 

la participation au dépistage organisé en France stagne depuis 2008 à un taux plafond de 52 %

En général on incrimine les classes populaires qui auraient d'autres préoccupations et qui craindraient la paupérisation imputable à la maladie, l'Inca et la Ligue eux-mêmes mettent en avant ce phénomène. Or les analyses ici réalisées ont montré que seules les très précaires semblent moins effectuer de dépistage

Si les populations des classes populaires réalisent moins de dépistage, ce sont les plus diplômées et les femmes issues des classes supérieures qui ont plus de probabilité de n’avoir jamais réalisé de mammographie.

Plus les femmes prennent de l’âge moins elles se font dépister.

Les mères de famille se retrouvent dans une situation ambivalente. D'une part culpabilisées par les campagnes d'octobre rose, mais d'autre part freinées par la charge familiale, elles sont moins nombreuses que les célibataires et les divorcées à avoir réalisé une mammographie.

Le rythme de vie serait plus discriminant que la désertification médicale. Les résultats montrent que les femmes habitant dans des zones rurales se font plus dépister que les femmes des zones urbaines même si elles vivent dans des zones de pénurie médicales, et effectuent leur suivi au sein d’hôpitaux, ou de structures médicales.

L'auteure explique que " plus que le niveau de diplôme ou des revenus, c’est le « reçu », le « vécu » et le « perçu » construisant une idéologie médicale qui jouera sur l’adhésion ou non au dépistage du cancer du sein." En effet les femmes poursuivront ou non un dépistage en fonction de leur bonne ou mauvaise expérience avec icelui ou avec le corps médical.

Mais ce qui ressort de cette intéressante enquête est qu’à force d’injonctions répétées les femmes se sentent harcelées, et que certaines finissent par se désengager complètement de la surveillance médicale.

Comme nous le soulignons souvent sur notre site, les campagnes de prévention finissent par être anxiogènes, les femmes, autant celles qui participent que celles qui ne participent pas vivent dans une anxiété permanente, laquelle sera préjudiciable à leur santé physique et morale.

Concernant les avancées médicales prédictives et l'onco-génétique, l'étude met en avant un nouveau statut de la personne chez laquelle on découvrira une mutation génétique, c'est l'état de ni malade, ni sain. Après avoir été des sursitaires de la maladie ces femmes, avec un savoir de leur mutation génétique, se retrouveront dans un état de "liminalité" , ce qui n’ira pas vers moins d’anxiété.

A lire, en téléchargeant ci-dessous.

Mémoire_Teychene_Dépistage_Cancer du sein (2)

 

 

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Rapport de la CNAM 2018, surmortalité selon prise en charge

30 juin 2018

Résumé C.Bour

cnamts_rapport_charges_produits_2018

Cette semaine, le Figaro et Le Monde reprennent tous deux une information publiée le 29 juin dans le rapport de la CNAMTS, "Charges et produits 2018 » , obtenu par suivi de femmes traitées pour un cancer du sein entre 2012 et 2014.

Le Monde

Figaro

Selon ce rapport, les femmes prises en charges dans les établissements effectuant moins de 30 actes chirurgicaux par an (cela concerne 338 établissements sur 571) auraient 84% de risque supplémentaire de mortalité par rapport aux plus grands centres, dont l'activité surpasse les 150 actes par an (seuil fixé dans d'autres pays européens).

Cette inégalité n'est pas tant le fait du praticien que de l'organisation des équipes et l'application des "bonnes pratiques", selon le rapport. Les RCP(réunions de concertations pluridisciplinaires) seraient moins efficientes, moins nombreuses, les techniques du ganglion sentinelle (selon un rapport de l'IRDES de 2017, moins pratiquées).

Pour contraindre les établissements à l'amélioration des pratiques on procèderait par une valorisation du tarif de base de rétribution par l'Assurance Maladie de l'acte chirurgical envers l'établissement hospitalier qui aurait fait l'effort de respecter les critères de qualité, lesquels sont définis par l'HAS, les représentants des patients et les sociétés savantes.

Le rapport en question est un nouveau rapport pour 2019 rédigé en 2018 et n'est pas publiquement en ligne (ce n'est pas le même que celui qui est téléchargeable actuellement), nous remercions Mr Béguin journaliste à Le Monde qui nous a envoyé la page correspondant à notre sujet :

 

Disparités territoriales

 

Déjà le document publié par l'IRDES à l'époque montrait certaines disparités territoriales dans les prises en charge.

Cette disparité pose bien sûr d'autres questions, outre les raisons avancées par la CNAMTS qui seraient celles des disparités des capacités techniques et organisationnelles des établissements hospitaliers, nous nous interrogeons sur ce sur-risque de décéder qui serait imputable aux surdiagnostics, c'est à dire des diagnostics de cancer du sein inutiles pour les femmes, ce qui concerne 1 cancer détecté par dépistage sur 3 , voire sur 2 selon les dernières études. (étude danoise, Pays Bas).

Si on compte environ 30% de surdiagnostic selon ces dernières estimations pour l’ensemble des cancers du sein, et si là-dessus 84% de femmes y laisseraient leur vie en raison de la prise en charge, cela est très préoccupant…

 

 

Surmortalité imputable aux surtraitements ?

 

A ce titre l'étude brésilienne déroutante justifie de poser la question de savoir si le dépistage ne génèrerait pas une surmortalité par les surtraitements agressifs. (étude brésilienne)

Nous rappelons que notre étude publiée dans la revue Médecine (étude PMSI) réalisée en France sur la base du PMSI, c'est à dire la base de facturation des actes chirurgicaux, ne confirme pas la diminution des mastectomies totales qui aurait dû être observée si la généralisation du dépistage organisé du cancer du sein s'était accompagnée d'un allègement des traitements chirurgicaux.

Au contraire, le nombre annuel de mastectomies totales augmente ; le nombre de mastectomies partielles augmente plus rapidement que l’incidence des cancers invasifs. Et le nombre des mastectomies totales croît parallèlement au nombre des cancers du sein invasifs.

analyse étude PMSI

 

 

Analyse à affiner

 

Après de récentes informations glanées ici et là, le rapport complet sera bientôt public, en effet s'il est clair que l'expérience des équipes médico-chirurgicales joue, il faut tenir compte du fait que les patientes traitées dans les petites structures, plus fréquentes en milieu rural, ne présentent pas le même profil que les citadines. Ces divergences socio-économiques ne ressortent pas, ni en ajustant sur l'âge ni sur la gravité des lésions, de même que la co-morbidité n'est pas connue. En bref, nous attendons la mise en ligne du rapport complet, et affinerons l'analyse.

Affaire à suivre...

 

 

 

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Principes de dépistage, trop peu de préoccupations pour un consentement éclairé

Dr C.Bour, 25 avril 2018

 

Parce que les individus ciblés par un dépistage sont asymptomatiques dans leur état, les principes du dépistage sont souvent discutés en utilisant dix critères proposés il y a plus de 40 ans par Wilson et Junger [1]. Ces critères représentent une check-list utile, mais de nos jours elle réduit considérablement la complexité de la démarche de décision concernant un dépistage.

Cinquante ans après, ces principes sont-ils toujours les bons?

 

Des auteurs, Mark J. Dobrow et col. posent la question dans l'article "Consolidated principles for screening based on a systematic review and consensus process" [2] publié dans le CMAJ (Canadian Medical Association Journal) le 9 avril 2018.

 

Les dix critères retenus par l’OMS pour un dépistage organisé

  • La maladie étudiée doit présenter un problème majeur de santé publique • L’histoire naturelle de la maladie doit être connue • Une technique diagnostique doit permettre de visualiser le stade précoce de la maladie • Les résultats du traitement à un stade précoce de la maladie doivent être supérieurs à ceux obtenus à un stade avancé • La sensibilité et la spécificité du test de dépistage doivent être optimales • Le test de dépistage doit être acceptable pour la population • Les moyens pour le diagnostic et le traitement des anomalies découvertes dans le cadre du dépistage doivent être acceptables • Le test de dépistage doit pouvoir être répété à intervalle régulier si nécessaire • Les nuisances physiques et psychologiques engendrées par le dépistage doivent être inférieures aux bénéfices attendus • Le coût économique d’un programme de dépistage doit être compensé par les bénéfices attendus

 

Après analyse les auteurs de l'article concluent

Les principes de Wilson et Jungner sont remarquablement durables, toutefois commencent à dater, ils reflètent de plus en plus une version tronquée de la pensée contemporaine sur le dépistage. il est actuellement nécessaire d'appliquer une logique claire et cohérente pour orienter l'utilisation de divers types de preuves vers une décision de dépister.

La suggestion de Wilson et Jungner selon laquelle « une certaine connaissance des principes et de ce qu'elle implique dans la pratique devrait faire partie de l'équipement intellectuel de tous ceux qui sont concernés par le contrôle de la maladie et le maintien de la santé » est plus importante que jamais, mais les approches de remise à jour et d'affinement de ces principes nécessitent une attention continue. La revue méthodique de Dobrow et col. rassemble les nombreux efforts et perspectives disparates pour aboutir à une modernisation des principes qui servent aux explications et à la discussion d'un dépistage en population.

Ceci doit contribuer à l'avenir à des décisions éclairées et de meilleures informations sur le dépistage pour la population.

 

Avec le Dr Alain Braillon [3], nous posons (dans l'onglet "responses"[4] ) la question :

"Principes de dépistage: trop peu de préoccupations pour un consentement éclairé?"

Voici résumé le contenu de notre commentaire.

Le principe du choix éclairé, de la promotion de l'autonomie et de la protection des droits des participants aux dépistages est simple et peu coûteuse à mettre en œuvre.

Des pictogrammes avec des nombres absolus (en utilisant un dénominateur cohérent, tel que bénéfices et inconvénients rapportés à 1000 dépistés), les visuels employant une même échelle pour l'information sur les gains et les pertes sont basés sur des preuves.

Le petit royaume de Belgique a mis cela en oeuvre depuis 2013 pour le dépistage du cancer du sein.

En revanche, l'Institut national français du cancer, comme les autres agences de santé françaises, enfreint l'éthique, refusant de fournir une telle information malgré les demandes publiques en série depuis 2012 (comme la concertation en 2016)[5], même la plus récente demande sous forme d'une lettre ouverte soutenue par la principale organisation non gouvernementale française de consommateurs UFCQC .[6]

Pire encore, cette attitude française est associée à:

  1. une torture des données pour refuser le surdiagnostic, en refusant également le débat scientifique;
  2. Une inclusion de l'acceptation du dépistage dans le système de la ROSP (rémunération sur les objectifs de santé publique), avec légalisation d'une information déséquilibrée : "Le médecin généraliste attire l'attention du patient sur les avantages du dépistage (du cancer du sein). . . produit des informations positives sur le dépistage. . . qui s'inscrit naturellement dans le cadre d'un simple suivi. . . afin d'enlever la réticence de ses patients "

 

Pour reprendre la conclusion des auteurs de l'article principal, nous devons, en France, relever ce défi, notamment le médecin généraliste, placé au coeur du dispositif selon la demande des citoyennes, encore doit-il être aidé en cela par les autorités sanitaires, à l'instar d'autres pays, comme la Belgique, le Royaume Uni, le Canada, la Suisse etc... [7] [8] [9] [10] [11] [12]

 

 

[1] Wilson JMG, Jungner G Principles and practice of screening for disease. Geneva: World Health Organization; 1968.

 

[2] http://www.cmaj.ca/content/190/14/E422

 

[3] Alain Braillon est praticien hospitalier (hépato gastro-entérologie) au centre hospitalier universitaire d’Amiens. Il est responsable de l’Unité d’alcoologie depuis 2012. Auparavant il a été responsable de la mission régionale Évaluation des pratiques professionnelles de 2006 à 2012 et coordonnateur régional des sept services de Prévention et d’éducation du patient de 2004 à 2005 dans le Service de santé publique du Pr Dubois.

 

[4] http://www.cmaj.ca/content/190/14/E422/tab-e-letters - principles-for-screeni

 

[5] http://www.concertation-depistage.fr/wp-content/uploads/2016/10/depistage-cancer-sein-rapport-concertation-sept-2016.pdf

 

[6] lettre-INCa-PDF

 

[7] http://www.uhs.nhs.uk/Media/SUHTInternet/Services/BreastImagingUnit/NHS-Breast-Screening---helping-you-decide.pdf

 

[8] https://kce.fgov.be/fr/publication/report/dépistage-du-cancer-du-sein-messages-en-support-d’un-choix-informé – .VQa0tPmG_6J

 

[9] https://www.harding-center.mpg.de/en/fact-boxes/early-detection-of-cancer/breast-cancer-early-detection

 

[10] http://www.cochrane.org/CD001877/BREASTCA_screening-for-breast-cancer-with-mammography

 

[11] https://cancer-rose.fr/wp-content/uploads/2016/11/Swiss-Medical-Board.pdf

 

[12] https://www.crfht.ca/files/2613/7787/4862/Renseignements_sur_la_mammographie-fra.pdf

 

 

 

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