Annulation du colloque de Bobigny

25 mai 2019

 

Comme nous l'avions annoncé il y a quelque temps et également à nos lecteurs dans notre dernière newsletter, nous devions participer les 24 et 25 mai au colloque de Bobigny.

Nous devions intervenir dans la session du vendredi 24 mai à 10h20 pour parler des études de non-infériorité et de l'étude MyPEBS sur le dépistage du cancer du sein.

Le programme définitif avait été publié par les organisateurs du colloque ici : http://surmedicalisation.fr/?page_id=5624

 

Toutefois cette rencontre a été annulée 10 jours avant par la doyenne de la Faculté de Médecine de Bobigny, Mme la Pr. N. Charnaux, ce que les organisateurs ont annoncé dans un communiqué http://surmedicalisation.fr/

La raison donnée par les organisateurs, relayée dans une dépêche apm news et non démentie par la doyenne est la suivante :

Une communication portant sur les dépenses pharmaceutiques des CHU et CHR métropolitains était inscrite au programme, mais à laquelle la doyenne s'est opposée et dont elle demandait le retrait sous peine de ne pas autoriser la tenue du colloque.

Les organisateurs ont alors décidé de façon collégiale de refuser cette condition imposée et d'organiser le report de la rencontre scientifique à une date ultérieure non encore fixée.

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Dépistage chez la femme âgée

Nouvelles technologies de dépistage du cancer du sein chez les femmes âgées — Est-il temps de freiner?

article JAMA

Synthèse Dr C.Bour, 6 février 2019

 

 

Ce point de vue publié dans le JAMA le 14 janvier pose la question de la pertinence du dépistage du cancer du sein dans la population âgée, au-delà de 74 ans.

A travers l'historique du remboursement de ce dépistage par le Medicare [1] au fil des évolutions technologiques successives depuis la mammographie analogique, puis numérique en passant par des systèmes de détection assistée par ordinateur jusqu'à l'acquisition tridimensionnelle (la tomosynthèse), l'article s'interroge sur la pertinence-même de la détection chez la personne âgée, et c'est ce qui nous intéresse.

En effet, les recommandations officielles de dépister s'arrêtent à l'âge de 74 ans mais il n'est pas rare de voir des patientes envoyées pour une mammographie systématique, sans aucun symptôme, à des âges plus canoniques.(NDLR)

 

Historique

 

Du début du dépistage aux Etats Unis, en 1970 et ce jusqu'en 1991, aucun essai clinique sur la mammographie n’avait inclu des femmes de plus de 74 ans, et il régnait un scepticisme quant à son efficacité dans ce groupe d'âge.[2]

Plus d’un quart de siècle plus tard, il y a encore peu de preuves directes en faveur du dépistage du cancer du sein chez les femmes de plus de 74 ans.

En 2008 un important essai clinique randomisé a laissé entendre que l’exactitude de la mammographie numérique n’était pas supérieure à la mammographie analogique pour les femmes de 65 ans et plus, et qui n’ont pas de seins denses.[3]

En sus de la mammographie numérique est arrivée la détection assistée par ordinateur, qui utilise un logiciel pour analyser les images numériques et signaler des zones suspectes pour un ré-examen par le radiologue. Le congrès américain à l'époque a mandaté la couverture par l’assurance-maladie pour ce procédé de détection assistée en dépit d’un manque de données probantes sur les bénéfices pour les femmes âgées, selon une étude faite sur le sujet.[4]

Cette vaste étude de 2013 sur les résultats à court terme de la mammographie avec détection assistée chez les femmes âgées de 65 à 84 ans donnait des résultats mitigés : la technologie a détecté certains cancers au stade précoce mais n’a pas augmenté la détection en général et a conduit à davantage de faux-positifs. Il n'est pas certain que la santé des femmes âgées se soit améliorée grâce à cette technologie.

La performance technologique a poursuivi son évolution et a donné naissance à la tomosynthèse, imagerie tridimensionnelle du tissu mammaire par acquisition de plans multiples. Des études ont démontré une augmentation des taux de détection du cancer mais aussi une réduction du taux de rappel. Actuellement, cependant, nous ne connaissons qu’une seule étude sur la tomosynthèse mammaire numérique qui ait rapporté des résultats chez les femmes de plus de 70 ans[5]. Cette étude n’a révélé aucune réduction significative de taux de rappel dans ce groupe d’âge avancé, et on ne démontre pas que la tomosynthèse mammaire permette d’améliorer les résultats du cancer du sein dans ce groupe d’âge.

 

Pistes proposées, que faire ?

 

L'article suggère que bien que les nouvelles technologies de dépistage du cancer du sein aient largement supplanté la mammographie analogique sur film, il est difficile de savoir si ces avancées ont réellement amélioré la santé des femmes, en particulier chez celles de 75 ans et plus. Il faut donc se garder, selon les auteurs, d'inciter des femmes (par des remboursements accordés de ces nouvelles technologies coûteuses) à faire l’objet d’un dépistage, alors qu'elles n’en profiteront pas, dépistage qui pourraient même leur être défavorable en raison du problème du surdiagnostic[6].

Les auteurs abordent plusieurs pistes pour éviter les écueils de la promotion et l'incitation pour ces nouvelles technologies, remboursées successivement lors de leur avènement au cours de l'histoire par le Medicare. Ils évoquent la prise en charge groupée de l'examen de dépistage par exemple, quelle que soit la ou les techniques employées, ou encore l'exigence de davantage de preuves avant de couvrir toute la population ciblée.

Une autre approche évoquée est celle d'élaborer des études de randomisation sur les nouvelles technologies. On continuerait l'usage en place avec collecte de données probantes sur ces bénéficiaires âgés.[7]

Selon l'article, cela permettrait à l’assurance-maladie de continuer à couvrir les nouvelles technologies avec possibilité d'études, les essais randomisés n'étant pas toujours facilement réalisables ou accusés d'être non-éthiques car soustrayant des populations à ces technologies. Par exemple, un "design quasi randomisé" pourrait tirer parti de l’implantation échelonnée de la tomosynthèse mammaire numérique, dernière technologie en date pour tenter de tirer des conclusions sur son efficacité chez les femmes de plus de 74 ans.

 

NDLR. Il faut être réellement prudent chez la personne âgée asymptomatique de la mammographie systématique sans bénéfice avéré, chez ces personnes vulnérables et exposées particulièrement aux effets morbides d'un surdiagnostic et surtout du surtraitement ,(complications thrombo-emboliques, cardiaques etc...)

 

[1]  Système d'assurance-santé géré par le gouvernement fédéral des États-Unis bénéficiant aux personnes de plus de 65 ans, financé par le fonds fiduciaire d'assurance-hospitalisation et le fonds fiduciaire d'assurance maladie complémentaire.

[2] NattingerAB,GoodwinJS.Screening mammography for older women: a case of mixed messages. Arch Intern Med. 1992;152(5):922-925. doi:10.1001/archinte.1992.00400170012003

[3] PisanoED,HendrickRE,YaffeMJ,etal;DMIST Investigators Group. Diagnostic accuracy of digital versus film mammography: exploratory analysis of selected population subgroups in DMIST. Radiology. 2008;246(2):376-383. doi:10.1148/radiol. 2461070200

[4] FentonJJ,XingG,ElmoreJG,etal.Short-term outcomes of screening mammography using computer-aided detection: a population-based study of Medicare enrollees. Ann Intern Med. 2013; 158(8):580-587. doi:10.7326/0003-4819-158-8- 201304160-00002

[5] Sharpe RE Jr, Venkataraman S, Phillips J, et al. Increased cancer detection rate and variations in the recall rate resulting from implementation of 3D digital breast tomosynthesis into a population-based screening program. Radiology. 2016;278(3):698-706. doi:10.1148/radiol.2015142036

[6] WalterLC,SchonbergMA.Screening mammography in older women: a review. JAMA. 2014;311(13):1336-1347. doi:10.1001/jama.2014.2834

[7] Daniel GW, Rubens EK, McClellan M. Coverage with evidence development for Medicare beneficiaries: challenges and next steps. JAMA Intern Med. 2013;173(14):1281-1282. doi:10.1001/ jamainternmed.2013.6793

 

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Qu’en est-il des recommandations de la Haute Autorité de Santé ?

C.Bour, 3 janvier 2019

Les modalités de dépistage mammographique ou de suivi mammographique des femmes alternent dans leurs fantaisies selon les spécialistes, et le consensus n'est pas là dès lors qu'il y a un antécédent familial quelque part dans la lignée. De ce fait des protocoles très différents et fort subjectifs sont appliqués selon les praticiens dans la fréquence et le début du dépistage pour les patientes, certains jugeant qu'un antécédent familial quel qu'il soit nécessite un dépistage annuel dès 30 ou 40 ans, au choix, d'autres estimant que deux cas de cancers chez de vagues cousines justifient un dépistage pour toute la parentèle, et ainsi chacun y va de sa propre "cuisine" personnelle. Les demandes formulées auprès des radiologues varient elles aussi tout autant dans la créativité, et il serait bon de nous référer, nous tous, praticiens, aux recommandations officielles disponibles pour l'instant sur le site de l'HAS (Haute Autorité de Santé) si la patiente souhaite poursuivre un dépistage régulier après avoir été bien informée des tenants et des aboutissants (et c'est là où le bât blesse...). Même si ces recommandations sont incitatives, sujettes à révision et pourraient changer à l'avenir, elles constituent un barème officiel de ce qui devrait se pratiquer selon cette autorité de santé pour la tranche d'âge 50/74 ans, et ont le mérite d'unifier les conduites à tenir.

Que dit la HAS pour l'instant ?

Vous trouverez ici une fiche synthétique sur les recommandations émises par la HAS  ainsi qu'un article plus complet ici  où la HAS explique bien les limites des recommandations.
En effet il est bien stipulé que la controverse scientifique existe ; les recommandations en général sont émises pour les décideurs politiques de proposer ou non un dispositif de dépistage. MAIS il est d'autant plus important que les femmes soient incluses dans les décisions (et c'est là ou l'information de l'INCa devrait jouer son rôle d'exhaustivité et de neutralité), parce que finalement la décision finale de participer ou non dépend directement du point de vue de la femme, à savoir du poids et de la valeur que chacune accorde aux bénéfices annoncés et aux éventuels risques auxquels elle s'expose. Les décisions et ses points de vue seront différents selon le vécu de chaque femme, son histoire familiale, ses craintes par rapport à un risque de décéder, ou davantage par rapport à un risque de connaître des biopsies et des diagnostics inutiles. Ainsi la HAS dit ceci :

  • La décision de dépister ou non est en partie déterminée par l’appréciation au niveau individuel et/ou collectif de la balance bénéfice-risque associée à la procédure. Cette décision a été prise, à l’échelle collective, sur la base de la baisse attendue des taux de mortalité par cancer du sein associée au dépistage par mammographie. Or, l’actualisation des méta-analyses et les données en population ont montré que l’impact des programmes sur la mortalité était plus faible qu’attendu dans plusieurs pays ayant mis en place précocement un programme de dépistage.
  • La balance bénéfice-risque est d’autant plus défavorable que le dépistage concerne des femmes jeunes et/ou sans facteur de risque. Ces résultats ont conduit certains auteurs à recommander une modification des messages adressés aux femmes, mais également des indicateurs de résultats associés au dépistage (avec notamment quantification du phénomène de sur-diagnostic).
  • La HAS reconnaît les incertitudes qui existent et recommande une information loyale des femmes.

Cliquez :

Femmes à haut risque

Même dans la partie consacrée aux femmes à haut risque, en préliminaire la HAS rappelle qu’en l’absence des facteurs de risque pour lesquels un dépistage spécifique du cancer du sein est recommandé, il n’y a pas lieu de réaliser une mammographie ou une échographie mammaire de dépistage en dehors de la tranche d’âge de participation au programme national de dépistage organisé, c’est-à-dire entre 50 et 74 ans :

Voir dans chapitre 'Recommandations préliminaires'

"La HAS rappelle qu’en l’absence des facteurs de risque pour lesquels un dépistage spécifique du cancer du sein est recommandé, il n’y a pas lieu de réaliser une mammographie ou une échogra- phie mammaire de dépistage en dehors de la tranche d’âge de participation au programme national de dépistage organisé, c’est-à-dire entre 50 et 74 ans."

La HAS rappelle également que la femme doit être en mesure de faire un choix libre et éclairé, cette phrase implique qu'elle pourrait tout aussi bien le refuser si tant est que des informations complètes lui ont été délivrées, bien sûr.

"Par ailleurs la femme doit être en mesure de faire un choix libre et éclairé, conformément aux recommandations sur le dépistage du cancer du sein publiées par la HAS en 2011."

A- Situations ne nécessitant pas un dépistage spécifique

"Situations ne nécessitant pas un dépistage spécifique

  • En cas de densité mammaire radiologique après la ménopause supérieure à 75 % (type 4 de la classification BIRADS de l’ACR)1

La HAS considère qu’aucun dépistage spécifique par imagerie ne doit être proposé en dehors de la participation au programme national de dépistage organisé. Seule une échographie mammaire peut être réalisée par le radiologue devant des difficultés d’interprétation de la mammographie en raison de l’effet masquant de la densité sur la détection des lésions.


1. La densité mammaire élevée avant la ménopause n’a pas été retenue comme un facteur de risque à l’issue des tra- vaux du volet 1."

(NDLR : volet 1 des travaux de la HAS : identification des facteurs de risque ; volet 2 : recherche des stratégies efficaces, sûres et efficientes pour les femmes ayant des facteurs de risque nécessitant un dépistage spécifique).

  • En cas de traitement hormonal substitutif ou traitement hormonal de la ménopause en cours

En cas de prescription avant 50 ans et en l’absence de données suffisantes pour déterminer la balance bénéfice-risque de la mammographie, aucune surveillance radiologique spécifique n’est recommandée.
En cas de prescription après 50 ans, aucune surveillance radiologique spécifique n’est recommandée.

B- Situations nécessitant un dépistage spécifique

  • En cas d’antécédent personnel de cancer du sein ou de carcinome canalaire in situ

La HAS recommande la réalisation d’un examen clinique tous les 6 mois pendant 2 ans puis annuellement.
Une mammographie annuelle, unilatérale ou bilatérale selon le type de chirurgie réalisé, doit être effectuée, en association avec une éventuelle échographie mammaire en fonction du résultat de la mammographie.
Dans l’attente d’études de niveau de preuve suffisant, ce suivi est recommandé sans limite de durée.

  • En cas d’antécédent d’irradiation thoracique médicale à haute dose (antécédent d’irradiation pour maladie de Hodgkin) 

La HAS recommande la réalisation d’un examen clinique annuel à partir de 8 ans après la fin de l’irradiation et au plus tôt à 20 ans.
Une IRM mammaire annuelle doit être effectuée à partir de 8 ans après la fin de l’irradiation et au plus tôt à 30 ans.
En complément de l’IRM réalisée en premier examen, la HAS recommande la réalisation d’une mammographie annuelle (une incidence oblique) en association avec une éventuelle échographie mammaire.
Dans l’attente d’études de niveau de preuve suffisant, ce suivi est recommandé sans limite de durée.

  • En cas d’antécédent familial de cancer du sein avec score d’Eisinger (score servant à poser l'indication de la consultation d’oncogénétique) qui soit supérieur ou égal à 3 ET à la condition supplémentaire que la recherche initiale de mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 ne soit pas connue dans la famille OU que cette recherche initiale n'ait pas été réalisée (c’est-à-dire en l’absence d’identification d’une mutation prédisposante sur le gènes BRCA1 ou 2).
Analyse de l arbre généalogique selon le score d Eisinger : Additionner les scores pour chaque branche de la famille. Score > 3. Consultation d oncogénétique. Score < 3. Examen clinique annuel à partir de 25 ans. Dépistage à partir de 50 ans.

Quel est ce score et comment l'utiliser ?

Le score d’Eisinger est un score familial d’analyse de l’arbre généalogique, utilisé pour valider l’indication de la consultation d’oncogénétique. Il doit être réévalué dans une même famille si de nouveaux cas de cancers surviennent. Il peut permettre également de graduer le risque de prédisposition génétique au cancer du sein en l’absence de mutation familiale identifiée. La probabilité de prédisposition héréditaire est plus élevée pour les scores d’au moins 5 que pour les valences 3 ou 4.


En cas de score d’Eisinger < 3, la HAS ne préconise pas de dépistage spécifique.

Les recommandations pour une prise en charge onco-génétique et un suivi personnalisé concernent le cas des femmes ayant  un antécédent familial de cancer du sein avec score d’Eisinger  ≥ 3 ET recherche de mutation non connue ou non réalisée.

______________________________________

En conclusion

Toutes ces conduites à tenir sont détaillées sur les pages dédiées du site de la HAS (voir liens fournis dans l'article), se référer à des recommandations permettrait d'avoir déjà une conduite univoque de la part de tout le monde au lieu de multiples variations dissonantes. Mais enfin, ce qu'il faut intégrer avant tout pour aboutir à une décision éclairée et choisie librement par la femme, c'est la notion d'information neutre, que seuls les outils d'aide à la décision peuvent fournir, outils multiples et variés disponibles que vous trouverez en page d'accueil du site.

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Principes de dépistage, trop peu de préoccupations pour un consentement éclairé

Dr C.Bour, 25 avril 2018

 

Parce que les individus ciblés par un dépistage sont asymptomatiques dans leur état, les principes du dépistage sont souvent discutés en utilisant dix critères proposés il y a plus de 40 ans par Wilson et Junger [1]. Ces critères représentent une check-list utile, mais de nos jours elle réduit considérablement la complexité de la démarche de décision concernant un dépistage.

Cinquante ans après, ces principes sont-ils toujours les bons?

 

Des auteurs, Mark J. Dobrow et col. posent la question dans l'article "Consolidated principles for screening based on a systematic review and consensus process" [2] publié dans le CMAJ (Canadian Medical Association Journal) le 9 avril 2018.

 

Les dix critères retenus par l’OMS pour un dépistage organisé

  • La maladie étudiée doit présenter un problème majeur de santé publique • L’histoire naturelle de la maladie doit être connue • Une technique diagnostique doit permettre de visualiser le stade précoce de la maladie • Les résultats du traitement à un stade précoce de la maladie doivent être supérieurs à ceux obtenus à un stade avancé • La sensibilité et la spécificité du test de dépistage doivent être optimales • Le test de dépistage doit être acceptable pour la population • Les moyens pour le diagnostic et le traitement des anomalies découvertes dans le cadre du dépistage doivent être acceptables • Le test de dépistage doit pouvoir être répété à intervalle régulier si nécessaire • Les nuisances physiques et psychologiques engendrées par le dépistage doivent être inférieures aux bénéfices attendus • Le coût économique d’un programme de dépistage doit être compensé par les bénéfices attendus

 

Après analyse les auteurs de l'article concluent

Les principes de Wilson et Jungner sont remarquablement durables, toutefois commencent à dater, ils reflètent de plus en plus une version tronquée de la pensée contemporaine sur le dépistage. il est actuellement nécessaire d'appliquer une logique claire et cohérente pour orienter l'utilisation de divers types de preuves vers une décision de dépister.

La suggestion de Wilson et Jungner selon laquelle « une certaine connaissance des principes et de ce qu'elle implique dans la pratique devrait faire partie de l'équipement intellectuel de tous ceux qui sont concernés par le contrôle de la maladie et le maintien de la santé » est plus importante que jamais, mais les approches de remise à jour et d'affinement de ces principes nécessitent une attention continue. La revue méthodique de Dobrow et col. rassemble les nombreux efforts et perspectives disparates pour aboutir à une modernisation des principes qui servent aux explications et à la discussion d'un dépistage en population.

Ceci doit contribuer à l'avenir à des décisions éclairées et de meilleures informations sur le dépistage pour la population.

 

Avec le Dr Alain Braillon [3], nous posons (dans l'onglet "responses"[4] ) la question :

"Principes de dépistage: trop peu de préoccupations pour un consentement éclairé?"

Voici résumé le contenu de notre commentaire.

Le principe du choix éclairé, de la promotion de l'autonomie et de la protection des droits des participants aux dépistages est simple et peu coûteuse à mettre en œuvre.

Des pictogrammes avec des nombres absolus (en utilisant un dénominateur cohérent, tel que bénéfices et inconvénients rapportés à 1000 dépistés), les visuels employant une même échelle pour l'information sur les gains et les pertes sont basés sur des preuves.

Le petit royaume de Belgique a mis cela en oeuvre depuis 2013 pour le dépistage du cancer du sein.

En revanche, l'Institut national français du cancer, comme les autres agences de santé françaises, enfreint l'éthique, refusant de fournir une telle information malgré les demandes publiques en série depuis 2012 (comme la concertation en 2016)[5], même la plus récente demande sous forme d'une lettre ouverte soutenue par la principale organisation non gouvernementale française de consommateurs UFCQC .[6]

Pire encore, cette attitude française est associée à:

  1. une torture des données pour refuser le surdiagnostic, en refusant également le débat scientifique;
  2. Une inclusion de l'acceptation du dépistage dans le système de la ROSP (rémunération sur les objectifs de santé publique), avec légalisation d'une information déséquilibrée : "Le médecin généraliste attire l'attention du patient sur les avantages du dépistage (du cancer du sein). . . produit des informations positives sur le dépistage. . . qui s'inscrit naturellement dans le cadre d'un simple suivi. . . afin d'enlever la réticence de ses patients "

 

Pour reprendre la conclusion des auteurs de l'article principal, nous devons, en France, relever ce défi, notamment le médecin généraliste, placé au coeur du dispositif selon la demande des citoyennes, encore doit-il être aidé en cela par les autorités sanitaires, à l'instar d'autres pays, comme la Belgique, le Royaume Uni, le Canada, la Suisse etc... [7] [8] [9] [10] [11] [12]

 

 

[1] Wilson JMG, Jungner G Principles and practice of screening for disease. Geneva: World Health Organization; 1968.

 

[2] http://www.cmaj.ca/content/190/14/E422

 

[3] Alain Braillon est praticien hospitalier (hépato gastro-entérologie) au centre hospitalier universitaire d’Amiens. Il est responsable de l’Unité d’alcoologie depuis 2012. Auparavant il a été responsable de la mission régionale Évaluation des pratiques professionnelles de 2006 à 2012 et coordonnateur régional des sept services de Prévention et d’éducation du patient de 2004 à 2005 dans le Service de santé publique du Pr Dubois.

 

[4] http://www.cmaj.ca/content/190/14/E422/tab-e-letters - principles-for-screeni

 

[5] http://www.concertation-depistage.fr/wp-content/uploads/2016/10/depistage-cancer-sein-rapport-concertation-sept-2016.pdf

 

[6] lettre-INCa-PDF

 

[7] http://www.uhs.nhs.uk/Media/SUHTInternet/Services/BreastImagingUnit/NHS-Breast-Screening---helping-you-decide.pdf

 

[8] https://kce.fgov.be/fr/publication/report/dépistage-du-cancer-du-sein-messages-en-support-d’un-choix-informé – .VQa0tPmG_6J

 

[9] https://www.harding-center.mpg.de/en/fact-boxes/early-detection-of-cancer/breast-cancer-early-detection

 

[10] http://www.cochrane.org/CD001877/BREASTCA_screening-for-breast-cancer-with-mammography

 

[11] https://cancer-rose.fr/wp-content/uploads/2016/11/Swiss-Medical-Board.pdf

 

[12] https://www.crfht.ca/files/2613/7787/4862/Renseignements_sur_la_mammographie-fra.pdf

 

 

 

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