ANNETTE LEXA – 21 Août 2015
L’intérêt du dépistage dans cancer du sein n’est pas scientifiquement prouvé
Le dépistage du cancer du sein semble une évidence pour les femmes et nous avons tous été bercées de ces « évidences » : le cancer du sein serait la première cause de mortalité chez la femme, le cancer est une horrible maladie qui nous menace toutes, plus un cancer est détecté tôt, plus on guérit, le dépistage permet de détecter de petits cancers qu’on peut soigner , si on s’y prend tôt on aura moins d’ablations mutilantes .
Or contrairement à ce qui est affirmé partout, et même sur les sites institutionnels lorsqu’ils entendent promouvoir le DOCS (dépistage organisé du cancer du sein), les femmes meurent bien plus en France de maladies cardio- vasculaires. Si la mortalité par cancer du sein a légèrement baissé (passant de 4% à 3%), les mortalités par cancers du côlon et du poumon n’ont pas changé durant cette même période[1] . Cette petite baisse est due principalement aux fait que les femmes sont devenues plus attentives et mieux informées et que les traitements chirurgicaux et radiothérapiques ont fait de gros progrès.
Depuis 2009, une controverse scientifique (ici, ici, ici, ici) s’est développée autour de la balance bénéfice/risque du dépistage du cancer du sein, présenté comme l’examen de choix censé réduire cette mortalité. Cette controverse est née de vastes études épidémiologiques dans différents pays occidentaux (pas en France où l’épidémiologie est une science politiquement incorrecte à éviter). Cette polémique enfle actuellement avec cette récente étude américaine (ici) qui démontre de plus magistralement que le dépistage précoce non seulement n’a pas fait baisser la mortalité devenue stable, mais qu’il n’a pas fait baisser les ablations du sein.
On continue de vanter les ‘atouts’ du dépistage avec sa double lecture en cas de résultat négatif qui serait le top du top de la rigueur scientifique alors que personne ne semble s’interroger sur cette simple question de bon sens : « pourquoi pas de double lecture en cas de résultat positif ? » . Quelle confiance arrogante et asymétrique dans la lecture infaillible du spécialiste ! Le risque de faux positifs (faux cancers) avec ses prescriptions lourdes et invalidantes et le risque de faux négatifs (avec la découverte récurrente par les femmes elles-mêmes des fameux « cancers de l’intervalle » entre 2 examens) sont systématiquement sous-estimés. Et pour finir, le risque de développer un cancer par excès d’examens et de radiothérapies (ici) est très certainement sous-estimé alors que de récents travaux (ici) devraient au contraire inciter à la plus grande prudence avec les femmes radiosensibles .
Mais, manifestement, le sacro saint principe de précaution – surtout lorsque la balance bénéfice risque n’est pas prouvée – est bien plus scrupuleusement appliqué pour les poulets, les steacks ou les céréales que pour le corps des femmes bien portantes (voire aussi la prise de la pilule, le traitement hormonal de la ménopause, les prothèses mammaires, les césariennes, les tampons périodiques, etc.)
Des techniques de manipulation pour imposer le dépistage à une clientèle féminine docile et captive.
Mais, alors, pourquoi assistons-nous depuis des années à cette véritable opération militaire de recrutement national quasi-stalinien[2] des femmes jusqu’au fond des campagnes les plus reculées et par tous les moyens ? Médecins, Institutions, associations, politiques, tous enrôlés pour la Grande Cause Nationale avec l’objectif chiffré de porter le recrutement idéalement à 70 voire 80%. On va jusqu’à user de « mammobiles » arpentant le département de l’Hérault dans ces villages les plus reculés pour vaincre les « réticences » des femmes « vulnérables » et « ayant une mauvaise image de soi» (je n’invente rien, allez lire ici) et proposer gratuitement un examen « utile » aux femmes dès 40 ans).
Tous les ans, nous avons droit à la supercherie de la campagne Octobre rose avec le déferlement de messages indécents, manipulateurs, culpabilisants, infantilisants, pour toucher les femmes par l’émotionnel censé être leur vecteur principal de communication et visant à les transformer toutes en bécassines cancéreuses qui s’ignorent. Quitte à broyer au passage des vies individuelles, des intimités, des sexualités épanouies, détruire des couples et des familles (un surtraitement de cancer n’est pas une épreuve banale sans risque, c’est un drame personnel) et à laisser des femmes dans des difficultés financières insurmontables car définitivement étiquetées ex-cancéreuses (perte d’emploi, assurances…). On va déployer des trésors d’imagination pour améliorer l’image de soi des femmes en bonne santé qu’il s’agit de recruter par tous les moyens. Mais cela ne semble plus vraiment être une priorité pour une ex-cancéreuse de plus de 50 ans qui doit s’estimer encore heureuse d’être encore en vie.
Vous me direz que les hommes ont aussi leur Movember pour « lutter contre le cancer de la prostate ». La campagne de dépistage par dosage du PSA dans le sang a été un échec et son intérêt a vite été remis en question . Il est vrai que les hommes (dont les médecins) tenant à leur virilité plus que tout, ont vite compris le risque de surdiagnostic et de surtraitement avec son lot d’impuissance et d’incontinence…. pas touche à ma virilité .
Le contrôle du corps des femmes par la médecine: une longue histoire
Je répondrai que cet acharnement à contrôler le corps des femmes n’est pas nouveau dans la médecine française :
– Le XIXe siècle vit l’invention de l’hystérie de Charcot, toute féminine, devenue névrose sexuelle des femmes censées être privées de pénis avec Freud.
André Brouillet, Le Dr Charcot à la SalpêtrièreAndré Brouillet, le Dr Charcot à la Salpêtrière
– Dans le but louable pour lutter contre la syphilis, l’hygiénisme pasteurien conduisit au contrôle des prostituées captives des maisons closes qui devaient subir mensuellement des visites médicales dégradantes que n’eurent jamais à subir les clients pourtant eux-mêmes tout aussi vecteurs (de la transmission) de la bactérie .
La visite médicale , Toulouse Lautrec
– Le contrôle des accouchements par les hommes dès le début du XIXe siècle se traduisit par une hécatombe de mortalités en couche causées par l’orgueil excessif des médecins à l’hôpital qui s’étaient appropriés l’accouchement des femmes. Cette hécatombe a perduré jusque dans les années 1930. Alors que 80% des grossesses sont normales, nous avons ensuite assisté à la médicalisation croissante de la grossesse et de l’accouchement, dont le caractère anxiogène, froid et déshumanisé n’a pas échappé à toute femme ayant vécu cet évènement. A quoi s’est ajouté une obsession de la gestion et de la normalisation de cet acte naturel avec son lot d’épisiotomies, péridurales, césariennes. Signalons que cette hypertechnicisation médicale ne s’est pas accompagnée d’une diminution de la mortalité maternelle en France[3] .
– L’invention de la « pilule » à visée contraceptive orale destinée aux femmes (pourquoi pas aux hommes ?) est devenue le symbole d’émancipation féminine, de libération sexuelle. Pourtant, depuis 4 décennies, le corps médical minimise et sous-informe les femmes des effets secondaires de ce médicament pris par des femmes non malades. Pourtant ce médicament est un véritable perturbateur endocrinien classé cancérogène du groupe 1 (cancérogène certain) par l’IARC en 2012. La liste des effets indésirables dont les femmes acceptent docilement le risque est long comme un poème à la Prévert : prise de poids, cellulite, acné, maux de tête, dépression, baisse de libido, problèmes veineux et thrombo-emboliques mortels, légère augmentation de cancers du sein et de l’utérus, etc. Pourtant aucune féministe, passé l’euphorie des années 70-80, n’a paru voir la violence symbolique de cette médicalisation des corps et de la sexualité des femmes, ce que nous avons de plus intime en fait. Dans une asymétrie relationnelle terrible, les hommes ont ainsi pu disposer de manière dé-responsabilisée du corps des femmes et de très jeunes filles emmenées par leur propres mères, et se pliant régulièrement à la visite médicale chez « leur» gynécologue exigeant pour les plus scrupuleux d’entre eux des prises de sang régulières destinées à surveiller leur taux de cholestérol, acceptant sans broncher ce contrôle de leur corps et de leur sexualité, et les effets indésirables parfois graves de cette prise contraignante. Comment parler de libération des femmes (« mon corps m’appartient ») avec ce passage de la soumission patriarcale à la soumission médicale et au désir de l’homme dès lors qu’elles sont censées être désormais « disponibles » à 100% , et qu’en cas de baisse de libido provoquée par la prise de la pilule elles s‘en culpabiliseront d’elles-mêmes auprès de leur médecin-confident-sexologue ? On s’est inquiété récemment des rejets urinaires de métabolites de la pilule (17β-estradiol) présents dans les milieux aquatiques à une concentration de l’ordre du ng/L et responsable dès cette dose de trouble de la fertilité et d’hermaphrodisme chez les poissons. Il n’est pas même pas exagéré de dire qu’on s’est plus inquiété de l’impact de ces métabolites sur les poissons et sur le fonctionnement des stations d’épuration que sur le corps des femmes.
La société française n’a cessé de s’émouvoir de l’impact de certains pesticides, des agents ignifuges bromés, des phtalates, des éthers de glycols, du nonylphénol, du Bisphénol A (molécule mimant les hormones oestrogènes) dans les plastiques alimentaires, des phyto-oestrogènes, etc., sur le système reproductif des hommes et des animaux) mais elle continue à autoriser la vente de contraceptifs oraux « sous contrôle médical » quand elle ne les donne pas gratuitement aux adolescentes à peine pubères en collège, préparées par les cours officiels de SVT où la pilule est présentée comme un simple moyen d’avoir des règles régulières[4]… allez comprendre. Enfin, combien de femmes, peinant à démarrer une grossesse après 10 années ou plus de contraception orale, sans s’interroger plus que ça, se plient aux lourdes méthodes de procréation médicalement assistée (PMA) dont la violence et la contrainte n’ont rien à envier à ce qui vient d’être décrit ? Que penser d’un ministère de la santé qui fait de la publicité sur le don d’ovocytes[5] sans évoquer la lourdeur du traitement hormonal et ses possibles conséquences ? Que dire de société telles que Facebook et Google qui encouragent leurs salariées à la congélation de leurs ovocytes pour lutter contre l’horloge biologique en banalisant les traitements hormonaux du prélèvement et de la réimplantation ?
– Dans la foulée, on a réussi à convaincre les femmes que la ménopause était une pathologie et on a inventé la médicalisation de la ménopause avec le traitement hormonal substitutif censé avoir un rôle préventif d’une foultitude de maladies à venir. Encore aujourd’hui , le TSH est trop souvent donné pour régler de simples troubles transitoires anodins parfois ressentis à cette période comme les bouffées de chaleur , des sueurs nocturnes, une baisse de libido ou une sécheresse vaginale, ou même il est donné (et réclamé par certaines femmes) à titre « préventif » avec la promesse de rester jeune. Rappelons tout de même que le traitement de la ménopause est classé cancérigène et que même les autorités de santé incitent aujourd’hui à la plus grande prudence d’utilisation. On a réussi à faire croire aux femmes que, désormais, manquant d’hormones, il était naturel qu’elles subissent toutes sortes de désagréments qu’il était nécessaire de corriger si elles voulaient continuer à paraître socialement jeunes et sexuellement désirables (à défaut de s’interroger naturellement à cet âge sur leur vie affective, le départ de leurs enfants, leur désir et leur sexualité, etc.) . Comme chaque femme est unique et est son propre témoin, aucune ne peut se targuer de l’efficacité réelle du TSH sur sa ménopause et il est plus que probable qu’une bonne partie de l’efficacité ressentie relève de l’effet kisscool.
– L’engouement pour le TSH à peine retombé, nous avons assisté à la soumission en masse, parfois dès l’âge de 40 ans , au dépistage mammographique, examen douloureux et anxiogène au bénéfice incertain pour réduire la mortalité, et qui n’a eu comme résultat que d’augmenter de manière vertigineuse le nombre de petits cancers qui ne se seraient pas développées, ou très lentement ou qui auraient régressé , et le nombre d’ablations inutiles et traumatisantes de seins .
Notons que ces 2 dernières violences faites aux corps des femmes concernent les « plus toutes jeunes » ne représentant plus l’idéal de jeunesse et de fécondité de la jeune femme, objet éternel de fantasme masculin, et auxquelles doit se soumettre la femme 50+.
– La banalisation de lourdes, douloureuses et parfois dangereuses interventions chirurgicales pour se faire implanter des prothèses mammaires en silicone dans le but d’améliorer leur image d’elles-mêmes, de se conformer à une norme sociale totalement construite (la femme très mince à seins très gros) et de répondre aux fantasmes masculins. Imaginerions-nous un seul instant 400 000 hommes en France se prêtant à des interventions chirurgicales pour gonfler leurs pénis ou leurs testicules ?
– La soumission aux vaccins du cancer du col de l’utérus au bénéfice incertain, à grand renfort de campagnes culpabilisant les mères de jeunes adolescentes. Là encore, pourquoi la femme serait-elle le principal vecteur du papillomavirus en question ? pourquoi n’a-t-on pas engagé une campagne mixte visant à la fois les jeunes garçons hétérosexuels – et homosexuels particulièrement concernés – et les jeunes filles, si ce n’est parce que le monde médical dispose avec la femme et ses filles d’un marché captif, docile, facile à culpabiliser et éduqué à obéir ?
Contrôle social et soumission aux normes
Cette docilité des femmes au regard du monde médical a peu évolué malgré l’émancipation féminine. Et les industriels et les publicitaires chargés des campagnes de promotion le savent très bien, lorsqu’il illustrent l’importance du dépistage du cancer du sein avec des femmes jeunes au buste parfait quand ce ne sont pas des messages culpabilisants mettant en scène la famille et les « bonnes copines ». Elles continuent d’aller courir «contre le cancer du sein» (qui serait pour, je vous le demande ??) en arborant une épinglette rose, effroyable couleur genrée, et n’hésitent pas à participer aux réunions Tupperware estampillées Octobre rose pour convaincre leurs copines réticentes à se rendre à la mammobile la plus proche.
Pourquoi cet acharnement excessif de la médecine avec la complicité des plus hautes autorités de l’Etat et de leurs escadrons de fonctionnaires en Régions à vouloir contrôler la normalité des seins des femmes et les soumettre jusque dans leur intimité ?
Pourquoi ne trouve t–on pas le début d’un commencement d’équivalent d’un tel contrôle du corps masculin et d’une telle soumission chez les hommes ? Pourquoi la médecine ne s’acharne-t-elle pas avec le même déploiement de moyens à faire baisser la mortalité par maladie cardio-vasculaire chez les femmes qui représente presque 7 fois plus de mortes annuelles que par cancer du sein ? Ou à faire baisser la mortalité féminine par cancer du poumon et du colon ? Cœur, poumon et côlon sont des organes nettement moins sexués il est vrai.
Les femmes, contrairement à ce qu’elles prétendent ne se sont pas émancipées du contrôle que la société exerce sur leur corps et leur sexualité. Elles ont troqué un Maître (père, époux, prêtre…) pour un autre, représentant le pouvoir technoscientifique prométhéen censé veiller sur leur corps forcément détraqué, facilement déréglé, siège, si elles n’y prennent pas garde, de toutes sortes de pathologies féminines effrayantes, cette soumission leur obscurcissant la perspective d’une vie de femme , d’amante , de mère pleinement épanouie. Pire, les femmes sont les pires ennemies des femmes : faire prendre la pilule à sa fille, recruter ses bonnes copines revient à se rendre complices de leur soumission, tout comme les femmes sont complices des excisions des plus jeunes dans d’autres cultures.
Certains (ici et ici) se sont récemment interrogés sur la misogynie du corps médical français, mais paradoxalement ces thèses n’ont pas séduit nos journalistes des magazines féminins, pourtant prompts à libérer la sexualité de leurs lectrices. Cette thèse n’a pas semblé non plus plaire aux mouvements féministes divers, refusant de voir dans cette pseudo -émancipation une autre forme d’aliénation comme l’a très bien démontré Marc Girard. Il y a dans cette soumission comme un impensé absolu, un tabou, une tache aveugle que le combat pour l’émancipation des femmes a été incapable de voir.
Encore aujourd’hui, la majorité des femmes ne sont pas très curieuses et critiques face aux recommandations qui leurs sont faites : adeptes soumises, contraintes ou carrément exaltées de l’Eglise de Dépistologie (Europa Donna et autres Octobre rose avec le soutien de Sephora, Tupperware et Esthé Lauder), elles ne vont pas se renseigner sur les blogs critiques (à ceux précédemment cités, je rajouterai ici et là) pour disposer d’un autre point de vue et réfléchir par elles- mêmes.
Le contrôle de l’Eglise
Même si nous vivons aujourd’hui dans une société sécularisée, l’influence passée de l’Eglise imprègne encore inconsciemment notre morale et nos mentalités. Pendant des siècles, l’Eglise catholique – comme toutes les institutions religieuses monothéistes – a cherché à insister sur l’infériorité des femmes. Elle a cherché à contrôler les corps et les esprits des femmes, pour qui elle a toujours éprouvé des sentiments contradictoires : à la fois docile, soumise, modeste et maternelle, la femme reste pour l’Eglise aussi une putain tentatrice, une sorcière ou une imbécile incapable de jugement et de décision par elle-même.
Sans remonter très loin, retournons quelques 150 ans en arrière. On met souvent en avance les quelques femmes progressistes de l’époque, mais c’est oublier qu’au XIXe siècle, alors que les esprits républicains principalement masculins s’attaquent à l’Eglise, la femme dans son immense majorité continua d’être maintenue à l’écart du monde, cantonnée à son rôle de mère, de consolatrice, d’aide sociale. Pudeur, retenue, modestie, dévouement, vertu, telles étaient les qualités principales qu’on exigeait des femmes qui n’avaient qu’à plaire à Dieu et à leur mari . L’éducation leur était interdite ou alors très limitée, on la croit d’ailleurs incapable de vie intellectuelle. Mises à l’écart des loisirs, du sport, de l’étude, la femme était considéré comme faible et la société devait la protéger contre elle- même. La femme adultère était coupable alors que l’homme pouvait agir le plus naturellement du monde. La femme est exclue de toute fonction religieuse, incapable de se relier à la transcendance et facilement pervertie par le Diable. Longtemps les règles, le mystère de la gestation, la séduction et l’attirance sexuelle, le pouvoir des femmes sur la vie domestique (où on l’avait enfermée) ont terriblement fait peur aux hommes.
Encore au début du XXe siècle, les prêtres interrogeaient les jeunes adolescentes sur leurs pratiques de la masturbation violemment prohibée (témoignage de ma propre mère qui vécut cela dans les années 30 à l’âge de 10 ans)
Depuis l’affaiblissement des sociétés guerrières et celui du pouvoir religieux, la femme a progressivement connu une émancipation et d’immenses progrès ont eu lieu ces dernières décennies. La misogynie a-t-elle disparu pour autant ? Rien n’est moins sûr. Aujourd’hui, les femmes étudient, divorcent, travaillent, ont les enfants qu’elles veulent, peuvent avorter, votent et connaissent en théorie les mêmes droits que les hommes. Mais des différences existent encore, réminiscence d’un monde passé, paternaliste, misogyne qui survit encore dans l’univers médical où la différence de traitement entre hommes et femmes, bien qu’ayant pris une forme moins coercitive et plus incitative, demeure criante.
La médecine et l’Eglise
Longtemps médecine et religion étaient confondues, dans une même crainte de la mort .
Le siècle des Lumières a vu les germes d’une nouvelle médecine qui se voulait rationnelle. Le médecin avec ses nouveaux rites de la visite médicale n’a-t-il pas remplacé le prêtre dans son immense foi dans le progrès médical et dans la science, son intérêt pour les questions dites éthiques, son obsession du contrôle des corps féminins de la naissance à la mort, que se soit dans le domaine physiologique , psychologique, psychiatrique, psychanalytique ?
L‘Eglise voyait la femme du XIXe siècle comme une pondeuse, constamment enceinte ou en train d’allaiter. Depuis 50 ans, elle est mise sous camisole chimique en état de constante stérilité artificielle, désormais sommée de connaître une vie sexuelle permanente où toute baisse de libido est vécue comme suspecte. Sommée aussi de ne pas se plaindre des effets indésirables (« c’est dans leur tête »). Un progrès ? En un sens oui bien sûr, mais il n’est pas certain que la femme n’ait pas troqué sa dépendance pour une autre aliénation. Et que le corps masculin de la société n’essaie pas encore consciemment ou non de contrôler ces corps si différents de celui des hommes par leur formidable capacité cyclique à séduire, à engendrer la vie.
Sainte, putain, sorcière et bécassine, les quatre femmes de Dieu , n’est -ce pas ce que les diktats contemporains exigent de la femme ? Tout à la fois être vierge soumise et ignorante mais aussi tentatrice et séductrice.
L’ère du biopouvoir
Aujourd’hui nous sommes entrés dans l’ère du biopouvoir, du contrôle étatique des corps de la naissance à la mort. La santé publique est une vaste opération de planifications, une suite de recommandations qui cherche à contrôler toute forme d’épidémie (avec son obsession vaccinale) ou de développement de facteurs agressifs (comme le cancer) ; Pour cela, elle doit aussi contrôler le pouvoir médical, les médecins.
Par nécessité de gestion, le biopouvoir s’est doté d’outils de performance. Il n’y a plus d’individu, il n’y a plus que des imageries médicales, des protocoles, des populations, des statistiques. Pire, ce biopouvoir est entaché de consumérisme cynique et sans âme et il sait parfaitement parler aux « consommatrices de soins de santé » sous couvert d’arguments simplistes, douçâtres et culpabilisants mêlant peur, sécurité et précaution et enjoignant au bien-être individuel comme seul horizon eschatologique.
Le droit de dire « NON »
Pourtant, non, nous ne sommes pas condamnées à vivre notre vie de femme sous une épée de Damoclès médicale, tétanisées par les troubles de la fertilité et de la ménopause, des cancers féminins et des grossesses médicalisées.
Non, nous ne sommes pas condamnées à vivre notre vie après 50 ans cahin-caha, déprimées et pétries d’angoisse entre une mammographie et une biopsie avec la peur de se retrouver un jour mutilée (et reconstruite ?), tout en avalant notre TSH avec un verre d’alcool pour faire passer.
Nous pouvons nous ré-approprier nos corps dans toute leur beauté et leur puissance fécondante et érotique.
Nous avons la liberté de ne pas accepter d’être une précancéreuse qui s’ignorait, de ne pas accepter de céder au fatalisme , à la peur et au contrôle, à la surenchère d’examens longs, douloureux, parfois humiliants, parfois dangereux , et nous pouvons construire nos vies avec nos compagnons dans une relation complémentaire, responsable et respectueuse sans s’en remettre à des médecins désinformés qui n’ont été formés que pour répondre à nos interrogations de femmes normales et en bonne santé par des prescriptions d’examens et des ordonnances.
Nous pouvons réclamer le respect de nos valeurs et de nos préférences, dans une relation digne et respectueuse avec les médecins.
Pour cela, il y a un remède naturel formidable qui s’appelle la confiance en la Vie.
Références
[1] En France (dernière source disponible : INSEE, 2011) , où l’espérance de vie d’une femme est de 85 ans, les principales causes recensées (et non estimées) de mortalité chez le femmes sont les suivantes :
73 842 de maladies cardio vasculaires (28% contre 36% en 1996)
16 106 de maladies pulmonaires (6% contre 8% en 1996)
10 286 de maladies digestives (4% contre 5% en 1996)
5 800 de maladies infectueuses et parasitaires (2% contre 2% en 1996)
et pour les cancers :
7 734 de cancer des voies respiratoires et du poumon (3%contr 3% en 1996)
8 113 de cancer du côlon, rectum, anus (3%contre 3% en 1996)
11 623 femmes sont mortes de cancer du sein (2% contre 4% en 1996)
[2] la suppression du Dépistage Individuel a même été imaginé par la Haute Autorité de Santé en 2011 (ici)
[3] la France, avec ses 2.3 morts pour 1000 naissances est en 17e position en Europe en 2013
[4] http://svt.ac-creteil.fr/IMG/pdf/4emecauseregles-.pdf
[5] Campagne de l’agence de biomédecine « Devenez donneuse de bonheur »
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