Life is rose

Imaginerait-on une marque de tabac qui sortirait une « cartouche spéciale » en édition limitée dont un euro serait reversé sur chaque vente à une association de lutte contre le cancer du poumon ? On crierait au cynisme et à la provocation .

Nous sommes habitués au pink-washing qui consiste à surfer sur une « cause » caritative pour légitimer un objectif commercial.

Nous demandions ici : http://cancer-rose.fr/qui-fait-quoi/partenairescommerciaux-marques/

que soit exigé des enseignes un cahier des charges « éthique », les obligeant à décliner les pourcentages des dons reversés à la « cause », leur budget marketing, les recherches financées, et aussi de répondre à la question de la toxicité du produit labellisé rose et de ses potentielles retombées sur la santé publique, et plus spécifiquement ici sur la santé des femmes.

Mais ce n’est pas près de voir le jour….

L’association « life is rose » http://www.lifeisrose.fr/ venant en aide aux malades du cancer précarisés par la maladie propose une cuvée spéciale de vin rosé en édition limitée, dont 1 euro de chaque vente sera reversé par la maison Osmin et Cie à cette association sponsorisée par les laboratoires Roche et Pfizer, mais par bien d’autres « mécènes » encore ….

Renseignement pris auprès de la maison Osmin et Cie, la cuvée n’est vendue qu’à des cavistes et non aux particuliers, la bouteille de rosé tourne autour de 10 euros mais les cavistes, selon les régions, peuvent pratiquer les tarifs qu’ils souhaitent comme on me l’a expliqué au téléphone.

Un mail a donc été envoyé à l’association Life is rose pour comprendre comment on peut imaginer, créer et vendre une bouteille d’alcool au profit d’une association aidant les malades précarisés à cause du cancer, sachant que l’alcool est lui–même un facteur de risque pour tous cancers y compris celui du sein, et que la précarité est un facteur incitatif à l’alcoolisme ?

Voici la réponse de Mme Nathalie Savariaud, à l’origine de l’association :

"Bonjour

Vous n'avez rien d'autre à faire ?
Je trouve cela assez dommage de ne pas comprendre que ce n'est pas une démarche de consommateur mais plus de collectionneur afin de récolter des fonds qui nous sont précieux afin de venir en aide à celles et ceux qui en ont besoin.
Vous faites fausse route et vous devriez conserver votre énergie pour mener des combats qui sont utiles.
Ou éventuellement envisager de porter plainte contre tous les viticulteurs de France et de Navarre, voir les grossistes en alcool.
Vous ne croyez pas qu'il est plus utile de choisir les bons combats au lieu de perdre son temps en propageant des messages négatifs et erronés ?
Je pense que l'ensemble des patients et patientes a qui nous avons permis de manger ou de garder un toit sur la tête ces 4 dernières années seront ravis de voir votre façon de mettre des battons dans les roues sur une simple récolte de fonds...
Si vous souhaitez apporter une contribution utile penchez vous sur des vrais sujets et je vous y aiderai avec grand plaisir... Car il y a de quoi faire ? Peut être des ravages de la mauvaise ou fausse communication faite sur le droit à l'oubli ? Cela serait utile aux patients qui sont en train de se mettre dans des situations qu'ils ne soupçonnent pas.
Cela est un sujet...
Et si nous n'avons pas répondu à votre mail c'est parce qu'il ne faut pas confondre les buts et les moyens. Et c'est malheureusement ce que vous faites.
Mais je me ferai un plaisir de répondre à vos interrogations. Si tant est qu'elles soient constructives.
Bien cordialement.

Nathalie Savariaud, et l'ensemble des bénévoles et partenaires life is rose."

Etre utiles à des malades qui se mettent dans des situations qu’ils ne soupçonnent pas fait bien partie de nos objectifs, et même mieux, nous cherchons à faire en sorte que des femmes ne se mettent pas dans une situation de malades qu’elle ne soupçonnent pas faute d’information, incitées qu’elles sont par ce genre de marketing rose, désinformant, véhiculant des slogans pernicieux lors d’octobre rose précisément. On devrait se rejoindre sur nos objectifs donc…

Dans ce triumvirat gagnant association-enseigne commerciale-industrie pharmaceutique chacun des trois acteurs y trouve tellement bien son intérêt qui existe entre les « partenaires », qu’on arrive à justement à ne plus s’interroger sur l’absurdité de ses actions.

L’industrie pharmaceutique sponsorise volontiers ces associations ayant un certain poids médiatique et qui leur permettent une visibilité vertueuse. La marque, elle, pratique tout bonnement son commerce en vendant plus, sous couvert de favoriser une bonne cause avec un reversement assez ridicule n’impactant pas son budget, avec mise en scène glamour et publicité gratuite. L’association est sponsorisée ainsi par les enseignes et l’industrie pharmaceutique à la fois, tout se petit monde s’y retrouvant sur le mode gagnant-gagnant-gagnant.

Les problèmes habituels dans ces montages sont l’interdépendance des intérêts, de ce fait l’ouverture à la controverse et à la critique sont, comme on peut le voir dans l’échange, mis à mal.

L’information-santé au profit du malade souffre également, ce qui ne paraît malheureusement pas évident à l’association caritative.

Et de plus se referme sur les femmes à nouveau le sempiternel piège de leur corps, rosifié, dans des stéréotypes rosifiants, et même malade utilisé comme jouet commercial, les femmes elles-mêmes comme population « concernée- acheteuse » en puissance.

 

Bon, finalement, le collectif opte pour un dépôt de plainte auprès le l’ARRP (autorité de régulation professionnelle de publicité) ainsi qu’auprès de l’ANPAA d’Anglet ( Association Nationale Prévention Alcool Addictologie), ne serait-ce que pour avoir un avis sur la question, pouvant déboucher sur l’interrogation : les marques et les industriels peuvent-ils ainsi sans condition tirer profit d’une maladie pour améliorer leurs affaires en se donnant bonne conscience, développer un plan commercial en utilisant des produits notoirement toxiques, de plus sans aucune démarche d’information-santé ou d’information sur les mesures préventives potentielles des maladies ?

Ne serait-ce pas enfin temps d’introduire un peu de moralité dans le maladie-business ?

Affaire à suivre…..

 

P.S. : peu après notre plainte, cette publicité a été retirée du site Life is rose

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Cancer du sein, travail de nuit et inégalités professionnelles de genre

Cancer du sein, travail de nuit et inégalités professionnelles de genre

Annette LEXA

Docteur en Toxicologie EUROTOX

Le sujet du risque de cancer du sein au travail est un sujet négligé.

Alors que, selon les statistiques européennes, environ 7% des salariés de l’UE travaillent de nuit (7.2% en France en 2010), les études sur le risque de cancer du sein en milieu professionnel fait l’objet de peu d’attention. Il y a peu de littérature scientifique à ce sujet. Ce manque d’intérêt est d’autant plus paradoxal que le dépistage précoce du cancer du sein chez la femme fait l’objet d’une attention extrême - voire tatillonne - de la part des technocrates et leurs bataillons de fonctionnaires territoriaux de la santé depuis l’arrêté ministériel de 2006 .

En France, la prévention primaire sur le lieu de travail, l’amélioration des conditions de travail, le suivi par la médecine du travail des femmes à risques (travail de nuit, hôtesses de l’air) ne font pas partie du plan cancer ni de l’arrêté de 20063.

Pourtant, depuis 2008, le travail de nuit posté (avec alternance irrégulière de périodes de travail de jour et de nuit) a été classé par le Centre International de Rechercher sur le Cancer (CIRC) comme cancérogène probable pour l’être humain. Le CIRC s’est appuyé sur des modèles animaux et des études épidémiologiques réalisées auprès d’infirmières de nuit et d’hôtesses de l’air soumises au décalage horaire. Ces études mettent en évidence un risque accru de développer un cancer du sein parmi ces femmes par rapport à celles qui travaillent de manière classique . Le travail de nuit provoquerait de perturbations de l’horloge biologique interne qui régule l’alternance de veille et de sommeil . A long terme, l’exposition nocturne à la lumière bloque la synthèse de mélatonine (hormone du sommeil) et cela entraîne une baisse des défenses immunitaires. On pense également que cette exposition à la lumière pourrait altérer l’expression de certains gènes pouvant aboutir à la formation de cellules cancéreuses. Le rôle de la mélatonine sur les estrogènes expliquerait l’excès de risque de cancer du sein1 et 6. Par contre, le rôle des expositions professionnelles dans l’apparition de cancer du sein chez l’homme (l’individu de sexe masculin) est connu depuis longtemps (solvants, rayonnements ionisants) .

La sociologue Marie Ménoret va plus loin 4 : « Zeneca Pharmaceutical , le plus grand vendeur au monde de médicaments anticancéreux pour le cancer du sein, grâce à son brevet pour le Tamoxifène est également producteur de pesticides et autres produits délétères, connus pour être cancérigènes » .

Selon une étude réalisée par le Breast Cancer Fund en 2015, le risque de développer un cancer du sein est augmenté de 50% chez les infirmières. Il est multiplié par 5 chez les coiffeuses et les esthéticiennes ainsi que dans l’industrie alimentaire. Il est multiplié par 5 parmi les travailleuses du nettoyage à sec et de la blanchisserie et par 4 chez les ouvrières de l’industrie papetière et des arts graphiques ainsi que dans la production de produits en caoutchouc et plastique. Les facteurs de risque sont multiples et peuvent en outre s’ajouter les uns aux autres : le stress au travail est pointé du doigt, le travail de nuit et les décalages horaires fréquents, les rayonnements ionisants et les substances chimiques telles que le benzène, les solvants organiques, les hydrocarbures aromatiques polycycliques, les pesticides et de nombreux perturbateurs endocriniens peu ou pas identifiés par la réglementation.

Une prévention professionnelle féminine au rabais

En France 2, 61 % des salariés mentionnent connaître le CHSCT (Comité de Sécurité, d’Hygiène et Conditions de Travail) mais 62.7% des hommes contre seulement 59% des femmes. Les femmes sont donc moins bien informées. Seulement 35% des hommes salariés connaissent l’existence du document d’évaluation des risques contre 24% des travailleuses. Ce %age doit descendre beaucoup plus bas lorsqu’il s’agit de la connaissance de la fiche individuelle d’exposition pourtant obligatoire. Pire, être une femme multiplie par 2 la probabilité d’être oubliée par la médecine du travail (sans doute parce qu’elle considère que les femmes consultent plus facilement à titre privé). Et cette situation de déni rend encore plus compliqué - voire impossible - la reconnaissance en maladie professionnelle d’un cancer du sein.

« Penser politiquement le cancer du sein »

L’invisibilité des risques spécifiques de cancer du sein pour les femmes au travail démontre de manière criante l’inégalité de genre des politiques de prévention des risques professionnels, alors que des millions de femmes en Europe, souvent employées par de petites structures, mal informées et insuffisamment suivies, sont exposées à des produits chimiques, des horaires de nuit, des rayonnements ionisants (y compris dans le diagnostic médical) ainsi qu’au stress de la double journée5 d’autant plus pénible pour les femmes en situation de monoparentalité .

Pour paraphraser Marie Ménoret, le cancer du sein est décidément une affaire politique que les féministes ont totalement oublié de traiter. Il en va de la vie des femmes elles-mêmes. Il est urgent que les jeunes générations s’en emparent.

Bibliographie

1/ Travailleurs de nuit : des travailleurs en rupture, HESA Mag n°5 , 1er semestre 2012, 31-35

2/ « Chausser les lunettes du genre » pour comprendre les conditions de travail, Laurent Vigel, HESA mag,N°12, 2e semestre 2015, 12-17

3/ Arrêté du 29 septembre 2006 relatif aux programmes de dépistage des cancers

4/ Ménoret M., 2006, « Prévention du cancer du sein : cachez ce politique que je ne saurais voir », Nouvelles questions féministes, 25(2), 32-47.

5/ Le temps de travail hebdomadaire moyen des femmes s’élève à 64 heures contre 53.4% pour les hommes. Le différence provient du travail domestique non rémunéré (26.4h pour les femmes contre 8.8h pour les hommes)

6/ Document pdf « Travail posté de nuit et cancers » par  M. Druet-Cabanac, Y. Aubert, D. Dumont, Consultation de Pathologies Professionnelles, CHU de Limoges

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Le cancer et l’abîme effrayant de la mort

L’arbre qui cache la forêt

Par Annette Lexa, 2016

Il est aisé de voir dans la frénésie de dépistage et l’explosion du recrutement des patients dans les essais cliniques un jeu de dupes qui sert avant tout l’industrie. Cependant, il est à peu près certain que la réalité est plus complexe et que cet angle d’analyse n’est pas le seul qui puisse expliquer cette situation, il n’en est qu’une conséquence et non la cause première.

II apparaît de plus en plus certain que le dépistage précoce tant promu dépiste sans discrimination les cancers de bon et de mauvais pronostic. Le problème est juste que les traitements qui suivent ne discriminent pas non plus. (« Nous allons vous guérir d’une maladie que vous n’avez pas encore » ,dit un médecin dans le documentaire de France 5, Au nom de tous les seins). Cela conduit à surtraiter un certain nombre de patients avec des nouveaux médicaments anticancéreux censément « innovants » extrêmement coûteux et pas plus efficaces que ceux existant déjà sur le marché et dont les effets indésirables graves (morts, second cancer) sont largement méconnus du grand public.

En terme de politiques publiques le cancer bénéficie de toutes les attentions, avec un tropisme certain pour les cancers féminins en partie du fait d’une clientèle captive et docile (voir sur ce même site « Le dépistage du cancer du sein, dernier avatar de la misogynie médicale »). Il est des maladies mortelles tout aussi graves telles que la sclérose en plaque, les maladies cardiovasculaires, le SIDA, le diabète qui ne bénéficient pas de la même attention que le cancer avec ses grand plans nationaux . Et ne parlons pas des maladies nosocomiales et iatrogènes. Il ne s’agit pas ici d’un silence du corps mais d’un silence sociétal voire d’une indifférence ou une sorte de fatalité difficilement explicable si l’on suppose que la vocation de l’Etat dans le domaine de la santé est de réduire la mortalité prématurée et augmenter l’espérance de vie de ses concitoyens.

A la différence des autres pathologies, même les plus graves et les plus mortelles, le cancer est traité à part comme s’il était « le diable, le prédateur invincible » . Car le cancer est plus qu’une maladie, il est un symbole d’une puissance extraordinaire.
Il a remplacé la peste du moyen âge, la tuberculose et la syphilis de nos ancêtres. Il représente le mal sournois, le tueur silencieux, il semble surgir sans cause évidente (sauf les cas avérés de cancers du fumeur) . Pour les experts, il demeure extrêmement difficile de prouver le lien de causalité entre une exposition à une substance et l’apparition d’un cancer, tant l’environnement , la génétique, semblent se mêler pour créer un terrain propice à son développement jusqu’au stade métastasique et à la mort.

La médecine ne dispose que depuis quelque décennies d’outils d’imagerie médicale lui permettant de confirmer le diagnostic. Avant on mourrait sans trop savoir de quoi. Désormais nous mourrons toujours mais nous savons de quoi et on annonce même avec une froideur technoscientifique sidérante le pronostic (« il ne vous reste que 6 mois à vivre » ) .

La médecine a fait de gros progrès en cancérologie, là n’est pas la question. Ce qui importe ici est de reconnaître que ces progrès ont peu impacté ce qu’on appelle pudiquement les cancers de mauvais pronostic (cancers du poumon, gliomes, sarcomes, leucémie aiguës, certains cancer de la peau.. ) . Alors, pourquoi continuons- nous à focaliser autant sur le « combat contre le cancer » tout azimut ? Il existe pourtant de nombreuses pathologies toutes aussi mortelles sur lesquelles nous pourrions faire des progrès énormes rien que par la prévention ou simplement en nous y intéressant plus au niveau de la recherche et de grand plans nationaux.

L’effroi du néant de la mort

Le cancer cristallise collectivement toutes nos pensées et tabous sur la mort. Or nos sociétés ont « tué » la mort en tuant Dieu. L’existentialisme, l’athéisme (avec la laïcité , devenue religion d’État en France) sont devenues philosophies modernes, marqueurs de progrès et allant dans la sens de l’Histoire.

Dans une vision matérialiste, quand nous considérons qu’il n’y a rien après la mort, cette mort ayant perdu toute signification ; il ne nous reste que le combat contre cette « injustice » absolue. Et le combat contre le cancer est devenu le dernier combat eschatologique (concernant l’ultime destinée du genre humain) des croisés postmodernes dans une société ayant perdu tout projet et tout sens commun.

Il existe même des courants de pensées post-humanistes qui promettent la disparition de la mort (clonage, congélation, transfert de la pensée de cerveau à disque dur…).

La discussion autour de la mort se réduit donc désormais au « droit à » et non aux questions existentielles sur le sens de la mort, qu’il soit individuel ou collectif. L’individu, l’Homme nouveau, forcément émancipé, est censé être renvoyé à lui-même au nom de ses convictions personnelles sur la mort. Et l’individu n’a pas forcément acquis les outils psychiques lui permettant de relever ce défi personnel. Il est seul et il a peur, très peur et où qu’il se tourne, il ne trouve plus de réponse satisfaisante . S’il trouve une religion lui offrant une chemin de vie clé en main , il signe parfois sans hésiter. A-t-il raison ? A-t-il tort ? En tout cas, on ne peut pas trop lui en vouloir devant le vide sidéral.

Dans une toute autre vision, que nous appellerons « spirituelle » (et non pas religieuse) de l’existence, la mort est un passage et cette conviction profonde se vit de manière sereine, calme, avec beaucoup moins d’angoisse. Elle crée un autre rapport de confiance par rapport à la vie et la mort. On peut ressentir du chagrin de ne plus voir ceux que nous aimons bien sûr mais on a la conviction que quelque chose de nous même survit au-delà de la disparition de notre corps et de notre moi et l’on y attache une extrême importance morale par exemple. C’est une vision à 360° de la Vie de la naissance à la mort.

Aujourd’hui la terreur, l’effroi n’est plus devant le Jugement dernier, comme nos ancêtres depuis le Moyen Age jusqu’au XIXe siècle, mais devant le vide, le néant de la mort : les enterrements contemporains en sont le résultat (absence de rites, bricolage…). C’est une situation inédite lorsque l’on sait que les rituels d’inhumation, les premières sépultures remontent à 100 000 ans et sont les premiers marqueurs de civilisation (même Néanderthal enterrait ses morts).

Affirmer que la mort n’est rien comme Epicure n’est pas vrai collectivement. Individuellement et collectivement c’est la pierre d’achoppement de toute vie humaine sur Terre depuis que l’Homme a pris conscience de sa propre mort. Tant que nos sociétés n’auront pas transcendé ce drame qu’est devenu la mort dans les sociétés contemporaines, nous ne pourrons pas sortir de cette individualisme adolescent qui veut tout tout de suite et surtout ne pas mourir. Il n’y aura pas de retour en arrière (avec le retour des religions traditionnelles en l’état) mais il faudra que nos sociétés englobent et transcendent les grandes religions monothéistes et les autres visions du monde transmises par les peuples premiers.

Si nous sommes en mesure de poser ce constat, nous n’avons pas de réponse collective à ce jour, chacun étant renvoyé à lui même devant cette question existentielle vertigineuse. La mort est devenu une affaire personnelle à laquelle la société tente de répondre comme elle le peut. Et le dépistage frénétique des cancers est une réponse sociétale technocratique et économique pour calmer la peur de la mort.

La biomédecine est encore une médecine de combat qui fonctionne sur des prémisses guerrières, « masculines » . Le prix exorbitant des anticancéreux, les grands plans cancer et leur lots d’actions « innovantes » teintées de velléités totalitaires devenant parfois ridicules à force d’obstination dans la réalité de la mort, procèdent de cette vision du monde.

Les dérapages du dépistage obsessionnel visant à traquer chez tous et par tous les moyens de l’imagerie médicale la moindre cellule prétendument cancéreuse pour la « combattre » ; sont le résultat de la domination du petit moi de l’individu possessif, qui veut tout maîtriser, angoissé de la mort qu’il ne peut pas maîtriser. Pire, comme des adolescents immatures, nous avons enrobé ce « combat contre le cancer » trop guerrier, trop viril , dans une dégoulinante guimauve rose émotionnelle et régressive, visant à masquer le manque de préparation des individus face à la mort, leurs occupations quotidiennes les ayant totalement exemptés d’avoir à réfléchir sur le sens de leur vie et de leur mort.

Nos vies, notre lointaine filiation depuis nos ancêtres de Cro-Magnon, les défis qui attendent l’humanité de demain sur une planète qui atteindra bientôt 10 milliards d’individus, méritent mieux que cela. Si au lieu de se replier sur soi et se laisser prendre en charge par un État paternaliste et d’une économie monopolistique, ; chacun d’entre nous se met à retrouver le sens de sa vie , le courage de vivre, le bon sens face aux destins individuels et collectifs, nos sociétés occidentales sortiront grandies et sauront remettre du sens face à la mort. Sinon, ce sont des scenarios tels que Le meilleur des Monde qui nous attend. Nous avons encore le choix, à nous de choisir aujourd’hui et sans attendre.

Guide biblio : Bertrand VERGELY , Entretien au bord de la mort , 2015

ANNETTE LEXA , Docteur en Toxicologie
8 MARS 2016

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étude d’impact du dépistage par Bleyer/Miller, 2015

Décembre 2015

Impact of screening mammography on breast cancer mortality

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26562826

Archie Bleyer1,†,*, Cornelia Baines2 andAnthony B. Miller2
Version of Record online: 15 DEC 2015

DOI: 10.1002/ijc.29925

© 2015 UICC
Issue International Journal of Cancer
International Journal of Cancer
Volume 138, Issue 8, pages 2003–2012, 15 April 2016

Archie Bleyer, MD est président de l'Institutional Review Board pour le système de santé de Saint-Charles dans l'Oregon centrale et auteur / co-auteur de plus de100_original_reports sur reseach clinique qui exigeaient l'approbation de la CISR. Il est également professeur clinique de recherche.

Archie Bleyer, Professeur en recherche clinique de l’Université des Sciences et de la Santé de l’Oregon publiait avec G.Welch, chercheur américain en cancérologie en 2012 dans le NEJM une mise au point concernant les effets de trois décades de dépistage sur l’incidence du cancer du sein, de 1978 à 2008. Le constat qui se dégage de l’étude était que la minime réduction constatée des cancers avancés n’était pas proportionnelle à l’augmentation observée impressionnante (doublement) des cancers à un stade précoce.

Cette année Archie Bleyer et Tony Miller, professeur émérite de l’Université de Toronto qui avait réalisé une étude à 25 ans de suivi de femmes à partir d’essais canadiens*, étudient la question de savoir en quelle mesure la réduction de mortalité par cancer du sein serait attribuable à la mammographie de dépistage. Les auteurs étudient l’impact de la mammographie de dépistage selon trois axes :

1) étude temporelle, afin de vérifier si le déclin de mortalité par ce cancer concorderait avec l’instauration des campagnes de dépistage.
2) étude d’ampleur, afin d’examiner si ce déclin de mortalité serait proportionnel au taux des mammographies de dépistage.
3) Et puis un axe comparatif, en étudiant le modèle de réduction de mortalité pour d’autres formes de cancers, pour lesquels il n’y a pas de dépistage instauré.

Concernant les deux premiers axes d’étude, sur des données de huit pays d’Europe et d’Amérique du Nord, les auteurs ne constatent aucune corrélation entre la mise en oeuvre nationale du dépistage dans une population donnée, et la chronologie de la diminution de la mortalité par cancer observée.

( En effet depuis les années 90 la mortalité par cancer diminue, mais les raisons avancées par d'autres études (Autier, Jorgensen, Kalager) sont essentiellement les progrès thérapeutiques, et peut-être récolte-t-on aussi les effets de vraies campagnes de prévention contre les facteurs de risque. )

La diminution de mortalité concerne plus encore les femmes jeunes, donc non incluses dans le dépistage, ainsi que les groupes de femmes non dépistés, ceci constaté aux Etats Unis.

Il n'existe pas de corrélation entre l'ampleur du dépistage et l'ampleur de cette diminution de mortalité par cancer ces dernières années.

Pour finir, l’approche comparative avec 14 autres types de cancers fait ressortir un déclin similaire des taux de mortalité desdits cancers, alors même que ces autres cancers ne font pas l’objet de campagnes de dépistage.

*Twenty five year follow-up for breast cancer incidence and mortality of the Canadian National Breast Screening Study: randomised screening trial
BMJ 2014; 348 doi: http://dx.doi.org/10.1136/bmj.g366 (Published 11 February 2014)
Cite this as: BMJ 2014;348:g366

https://www.cancer-rose.fr/etude-miller/

__________________________________

CONCLUSION :

Les auteurs concluent que le lien entre mammographie de dépistage et le degré de réduction de mortalité par cancer du sein observée ces dernières années est de plus en plus sujet à controverse.

Une comparaison de huit pays d' Europe et en Amérique du Nord ne démontre pas de corrélation entre la pénétration du dépistage national et la chronologie ou même l'ampleur de réduction de mortalité par cancer du sein.

Les preuves issues des trois approches différentes et d'autres observations supplémentaires ne soutiennent pas l'hypothèse que le dépistage par mammographie serait la raison principale de la réduction de mortalité par cancer du sein observée en Europe et en Amérique du Nord.

 

Lire aussi : https://cancer-rose.fr/2019/10/27/etude-des-trois-paires-de-pays-compares/

 

 

 

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Qu’est-ce que les microcalcifications ?

article actualisé le 5 novembre 2022

Ce sont de petits dépôts calciques dans le sein dont la découverte est de plus en plus fréquente avec l'amélioration des technologies de mammographie.

Lorsqu'on les découvre, on étudie leur forme, leur nombre, mais aussi leur groupement, leur topographie (où dans le sein se trouvent-elles), leur taille, leur morphologie et la morphologie de leur regroupement.

Les calcifications peuvent être intra-galactophoriques (dans les canaux lactifères du sein), vasculaires (dans les vaisseaux du sein), se situer dans l'épithélium qui borde le canal lactifère du sein, ou encore dans le tissu de soutien du sein.

En pratique mammographique, on peut distinguer trois grands cas de figures : les calcifications typiquement bénignes, les calcifications typiquement malignes, et les situations intermédiaires.
Le contexte clinique bien entendu doit être pris en compte pour juger de la malignité ou de la bénignité des images. Par exemple, un nodule typiquement malin cliniquement et échographiquement, avec quelques calcifications non inquiétantes en bordure ne doit pas faire ignorer les autres arguments de lésion suspecte. Inversement aussi, s'il n'y a rien cliniquement, mais qu'il existe des calcifications très inquiétantes, elles doivent amener à poursuivre le bilan et à prélever, le cas échéant.

La classification ACR de votre bilan sénologique sera conditionnée par la présence des microcalcifications et de leur morphologie.
ACR 2 signifie des calcifications typiquement et avec grande certitude bénignes.
Les classifications ACR 4 et 5 demandent une biopsie car très probablement (pour ACR4) et assurément (pour ACR 5) malignes.
ACR 3 correspond à une situation non typiquement maligne mais nécessitant un suivi et d'être recontrôlée, par exemple un foyer de calcifications sans argument inquiétant mais qui n'était pas présent antérieurement, ou un foyer existant qui s'est un peu modifié.
Nous verrons par la suite les difficultés et les pièges de ces situations.

Les calcifications en mammographie systématique :

► Elles sont présentes dans 30 % des mammographies !
► elles sont à l’origine de la découverte de :
- 70 % des petits cancers infiltrants de moins de 5 mm
- 90 % des in situ
Nous reviendrons sur le problème des lésions in situ plus bas dans l'article, et ce que sa découverte sur une mammographie signifie pour une patiente.

Les ACR 2- bénignité quasi certaine

► Elles épousent la morphologie d’une structure anatomique identifiable :
► Micro-ou macrocalcifications : un adénofibrome, une paroi de kyste (calcifications cupuliformes ou arciformes, sédimentées au fond du kyste), une ectasie canalaire sécrétante, une mastite à plasmocytes, un vaisseau, une cicatrice de chirurgie.
► Macro ou microcalcifications arciformes sédimentées (souvent dans des microkystes).
► Microcalcifications cutanées.

Les ACR 5-malignité quasi certaine

Anomalie très suspecte, nécessitant une exérèse chirurgicale
► Microcalcifications vermiculaires, arborescentes, comme des branches…
► Opacité avec des microcalcifications en son sein
► Microcalcifications groupées ayant augmenté en nombre d'un contrôle à l'autre
► Groupement de calcifications qui suivent un trajet galactophorique, ou disposés en triangle comme suivant un secteur de canaux galactophoriques.
► Le dégradé de taille et de densité du centre vers la périphérie d’un amas de calcifications avec un aspect sale délavé des calcifications les plus distales, est un signe très évocateur de malignité.

Les ACR 4, probablement malignes

Il s'agit d'anomalie considérée comme indéterminée ou suspecte nécessitant une vérification histologique :
* Microcalcifications punctiformes régulières nombreuses et ou groupées en amas ni ronds ni ovales
* Microcalcifications poussiéreuses nombreuses et groupées
* Microcalcifications irrégulières, polymorphes, peu nombreuses

Classer en ACR 4 veut dire qu'il y a une anomalie suspecte, qu’il faut vérifier. C’est parfois un cancer, mais pas forcément.  ACR4 implique donc d'office une biopsie, sous échographie (micro-biopsie) ; pour les microcalcifications, uniquement visibles en radiographie, ce sera sous contrôle radiographique, par une procédure appelée mammotome (macro-biopsie), ou parfois directement par biopsie-exérèse si le foyer est assez petit pour être retiré dans son ensemble sous mammotome.
On suspecte bien un cancer mais au final, on peut s'être trompé ; ou il peut s'agir d'un cancer faiblement évolutif, ou encore d'un cancer très agressif ; le type de l'image qui nous a amenés à classer en ACR4 ne dit rien sur l'agressivité ou non du cancer, si ce qu'on a biopsié en est bien un !
En raison d'ailleurs de ces incertitudes une sub-division de cette classification ACR4 a été effectuée, avec attribution d'une fourchette de probabilité de cancer à chacune des subdivisions.

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voir tableau ici : https://cancer-rose.fr/2019/09/04/cancer-du-sein-acr3-acr4-acr5/

Mais en dehors des ACR 2 et des ACR 5, qu'en est-il des autres calcifications ?

C'est là où les choses se compliquent.

Aucun des caractères suivants :
-forme ronde ou ovalaire du foyer
- présence de foyers multiples à morphologie identique
- stabilité dans le temps
► ne sont suffisants pour assurer avec certitude absolue la bénignité.

Le caractère multifactoriel des informations à synthétiser empêche tout classement rigide.
Il existe des variétés infinies de transition pour chaque description. La forme, la taille, le nombre dépendent de la technique, du support de l'information et de la densité hydrique du sein.
Les tentatives de codifications ont abouti à un échec, et nous sommes à présent devant un très gros problème de conduite à tenir devant ces images intermédiaires, dont on ne sait pas toujours quoi faire avec certitude.
Dans ces situations, les lecteurs et relecteurs "experts" ne sont d'accord que dans la moitié des cas.
Il arrive alors souvent que des femmes se retrouvent dans un parcours de "surveillance" plus rapprochée, de clichés supplémentaires, de consultation démultipliées, et elles témoignant toutes du stress engendré, du désagrément généré par ces examens répétés nécessitant leur mise en disponibilité et leur organisation dans leurs activités professionnelles, contraignantes.
Avec l'élévation du niveau d'angoisse des multiples campagnes dites de "sensibilisation", avec les slogans médiatisés selon lesquels "chaque minute compte", on délaisse de plus en plus l'attitude attentiste qui consiste à suivre et à recontrôler les foyers de microcalcifications, (selon ce qui est généralement préconisé, une fois dans 6 mois puis une troisième fois à un an*).
Actuellement ce qu'on constate sur le terrain, c'est que la classification ACR 3, (de surveillance), disparaît progressivement au profit d'une sur-classification "au cas où"
vers l' ACR 4,
qui est maintenant un véritable fourre-tout, qui conditionnera et justifiera pour la patiente une vérification histologique, donc une biopsie, avec la mise en place d'un clip de repérage pour le chirurgien, au cas où une intervention s'ensuivrait.
En effet, devant l'inquiétude accrue à la fois du médecin, alarmé d'une possible judiciarisation si jamais il n'alerte pas très tôt, et celle de la patiente, persuadée que la moindre attente pourrait lui coûter la vie, l'examen est volontiers surclassé d'ACR3 en un ACR 4, et c'est ainsi que le nombre de prélèvements par biopsies percutanées a augmenté de façon exponentielle.
Parallèlement, on observe une baisse du rendement biopsique ( nombre de cancers diagnostiqués / nombre de biopsies pratiquées), il s’établit autour de 30%. Il était, il y a moins de 10 ans, à plus de 50%.

* le référentiel (page 21) est le suivant :
Lésions classées ACR 3 => Pas d’indication à des prélèvements systématiques mais à une surveillance rapprochée: Surveillance à 6 mois pour les calcifications et à 4 mois pour les masses - En cas de stabilité lors de ce premier suivi => nouveau bilan rapproché à 1 an, puis à 2 ans du 1er examen :
o Une stabilité lésionnelle sur 2 ans permet de reclasser la lésion en bénigne ACR2
o La constatation d’une évolutivité en taille (>10%) ou d’apparition de critères morphologiques péjoratifs durant ce suivi fait classer la lésion au minimum en ACR4

Même, la mammographie ayant une sensibilité accrue aux calcifications il peut s'agir d’une primo-découverte de ces calcifications lors de la toute première radiographie. On a lors tendance d'emblée à réaliser une biopsie pour se rassurer, mais cela alimente les examens inutiles, les fausses alertes et un stress important chez les patientes.

Autrement dit, on biopsie de plus en plus des lésions bénignes, alors qu'un simple suivi et recontrôle aurait suffi pour infirmer la suspicion d'un cancer.

Récapitulatif de la classification ACR des calcifications.
VPP = valeur prédictive positive, ou probabilité que le la femme dépistée soit réellement malade quand le test de dépistage est positif. Cela répond à la question « Docteur, avec cette anomalie trouvée, quel est le risque que j’aie vraiment un cancer du sein ? »

Le cas du carcinome in situ

Il est essentiellement de découverte mammographique, en effet 90 % des femmes ayant un diagnostic de CCIS (carcinome canalaire in situ) présentaient des microcalcifications à la mammographie. Dans leur grande majorité ces lésions ne mettent pas en danger la vie des femmes si elles ne sont pas détectées, leur pronostic est très bon, la survie à 10 ans, paramètre très utilisé par les autorités sanitaires, est supérieure à 95%. Il existe la forme canalaire et la forme lobulaire considérée plutôt comme un facteur de risque de cancer du sein.
Les CIS alimentent largement les surdiagnostics. En France ils sont traités comme les "vrais" cancers avec chirurgie et radiothérapie. (Référentiel page 55)
Les essais et études montrent que la croissante détection des CIS n’a pas contribué à la réduction de la mortalité par cancer du sein. Avant l’ère des dépistages, le CIS représentait moins de 5% de tous les cancers du sein pour passer à 15 à 20% dans tous les pays où les campagnes de dépistage existent.


Et l'IRM ?
En raison de sa faible spécificité ( probabilité que la mammographie de dépistage reste négative quand la femme dépistée n’est effectivement pas malade), l'IRM, notamment chez des femmes jeunes, peut être positive sur des foyers de calcifications alors que la patiente n'est pas porteuse de cancer.
Cet examen peut alors générer des faux positifs qui liés à des anomalies bénignes du sein (mastopathies diverses), ou au contraire des faux négatifs en dépit de la présence d'un carcinome in situ.
L'IRM n'est pas adapté dans le cas des microcalcifications.

Des images

bénignes
bénignes

malignes
malignes
vasculaires et galactophoriques bénignes
malignes, avec le dégradé périphérique en taille et en densité
cupuliforme sédimentée au fond d'un kyste, typiquement bénigne

Un cours

Pour les intéressées, pour les sages-femmes, médecins, étudiants, le cours de Dr Bernard Duperray, ancien chef du service d'imagerie de l'hôpital Saint Antoine, Paris : https://cancer-rose.fr/2021/02/24/cours-calcifications-du-sein/

Et aussi : https://cancer-rose.fr/2021/02/24/fausses-microcalcifications/

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Qu’en est-il de l’autopalpation ?

Qu'en est-il de l'autopalpation ?

L'auto-examen des seins ne s'avère pas être une méthode efficace pour la détection précoce du cancer du sein et ne peut être retenue en tant que méthode de dépistage de routine, car on n'est pas parvenu à mettre en évidence si le dépistage par examen clinique des seins pouvait réduire réellement la mortalité par cancer du sein.

En revanche les faux positifs étaient augmentés par la pratique systématique, comme le montre une revue systématique, donnant lieu à des examens complémentaires et des biopsies avec résultats normaux, et ils occasionnaient aussi une augmentation de l'anxiété des femmes.

Les lignes directrices pour le dépistage du cancer du sein par examen clinique du sein sont divergentes. En effet l'examen clinique des seins est recommandé en France, alors qu’il ne l'est ni aux États-Unis ni au Canada, compte tenu du manque de bénéfices clairs et du risque de surmédicalisation.
Une étude de 2019 avait pour but de vérifier l'exactitude de la palpation clinique.
La trop faible exactitude de la palpation des seins ne plaide pas en faveur d’un examen clinique régulier en France, en tous cas pas comme méthode de dépistage de masse, car sa sensibilité (l'efficacité à trouver une réelle lésion), et sa spécificité (la probabilité que ce qu'on a trouvé soit réellement un cancer) sont toutes deux très faibles.

Trois essais randomisés comparatifs ont été menés, en Russie, Chine et au Royaume Uni réunissant presque 400 000 femmes au total, qui n'ont démontré ni diminution de mortalité par cancer du sein, ni diminution des mastectomies.

Enfin un essai indien de 2021 semblait montrer une diminution de la mortalité par cancer du sein dans le groupe autopalpation chez les femmes âgées de 50 ans et plus, mais pas chez les femmes plus jeunes. Ce résultat est cependant fragile, car en réalité, les femmes ont été tirées au sort non pas individuellement, mais en groupe et il n'y a eu que 20 groupes au total, pas strictement comparables. On ne peut donc pas affirmer que l'efficacité de l'autopalpation des seins soit correctement démontrée, et de plus Il n'y a eu aucun retentissement sur la mortalité globale des femmes.

En conclusion, on ne peut pas retenir l'autopalpation des seins comme examen systématique permettant une routine de dépistage de cancer du sein. Il n'y a pas d'efficacité avérée, et on augmente essentiellement les fausses alertes et des examens invasifs supplémentaires.

A titre individuel, une femme qui remarque un changement dans son sein doit être incitée à consulter, lorsqu'elle constate les signes suivants : modification de l’arrondi, de la forme générale du sein (irrégularités, déformations...),  rétraction du mamelon, lésion croûteuse du mamelon, bosse ou tuméfaction d’apparition récente (surtout si peu mobile à la palpation), un méplat (c’est-à-dire zone plus plane du sein, qui en rompt l’arrondi), ou même une zone de rétraction, un écoulement sanglant, une rougeur inexpliquée, une grosseur dans l’aisselle, persistante ou dont le volume augmente, un effet de « peau d’orange » avec apparition dans la zone concernée de petites boursoufflures, une plaie sur la peau due à un cancer ulcérant, un gonflement et durcissement du sein entier, une masse palpable en profondeur survenue sans déformation extérieure visible.

Certains de ces signes peuvent témoigner tout autant d'une lésion bénigne que maligne, mais il faut consulter car une mammographie individuelle à ce moment-là aura son utilité pour établir un diagnostic.

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A propos du plan cancer 2014-2019

Par Dr Bour

En ce temps béni de l’an 2016 où les vocables « concertation citoyenne », « démocratie sanitaire », « information éclairée », « usager impliqué » sont à la mode, est sorti aussi le plan Cancer 2014-2019.

 

Ayant été cordialement invitée à participer à deux tables rondes lors de la concertation citoyenne, ce dont je peux témoigner, c’est que la remise en question du dépistage du cancer du sein, pourtant l’objet d’une âpre controverse, n’est nullement à l’ordre du jour. La concertation n'était encore pas achevée et le rapport final du comité d'orientation pas encore sorti (publié octobre 2016) que la tonalité générale était déjà bien actée dans l’énoncé du plan cancer. Il s’agit bien de faciliter l’accès au dépistage et de l’améliorer, le dépistage étant ainsi entériné de facto au mépris de l’avis du panel et du rapport final. Si le rapport final était allé dans le sens de ce que désiraient les pouvoirs publics, il eut été amplement diffusé. Mais, prônant l'arrêt du dépistage, il a bien failli servir de cale-chaise d’un des bureaux ministériels, et n'a dû sa publication, pas très bruyante, qu'à l'acharnement des membres du comité d'orientation, puis des relais médiatiques ensuite, et de blogs et sites comme le nôtre, entre autres.

 

Examinons à présent, dans ce plan cancer, les points particuliers concernant le dépistage du cancer du sein :

 

1- page 54/55 :

« Axe 1. Guérir plus de personnes malades 

 

Favoriser des diagnostics plus précoces .

Mettre en place des formations-actions régionales de femmes relais pour relayer la sensibilisation au dépistage des cancers (dépistage organisé du cancer du sein) en direction des  femmes en précarité (partenariat avec IREPS2 ) (Picardie) »

 

Justement la notion même du « diagnostic précoce », c’est ce qui est remis en question dans l’épineux problème du surdiagnostic, c’est donc volontairement qu’on fait ici comme si cela n’existait pas, en persistant sur la nécessité de détecter de plus en plus tôt, alors que c’est un des éléments de la contestation précisément.

 

« Formations-actions » ???? Encore un élément de la novlangue chère à nos technocrates ; ça fait dynamique, punchy..

Si cela doit se traduire par la mise en place de cette manière de comités de femmes « sensibilisées », donc prônant le dépistage à l’instar des comités féminins chapeautés par la Fédération des Comités de Femmes, parrainés par l’INCA (et aussi par les détaillants en lingerie), qui ne servent à rien sauf à publier de fausses informations (cf ; leur site), si c’est cela , alors l’enfer est vraiment pavé de bonnes intentions.  Le problème c’est qu’on ne trouve pas un mot sur un éventuel concept d’information loyale, pas d’explication des surdiagnostic et des surtraitements, des inconvénients du dépistage qui sont pourtant le véritable talon d’Achille du dispositif. Ces « cycles d’information aux populations défavorisées afin de sensibiliser au dépistage » comporteront-ils aussi une sensibilisation aux effets délétères qui l’accompagnent ? Rien sur le sujet…

Le dépistage organisé du cancer du sein n’a jamais permis l’égalité des soins, parce que ces populations défavorisées craignent l’accroissement de leur précarisation, la perte de leur emploi, la fragilisation de leurs conditions de vie du fait de la maladie. Les groupes de « sensibilisation-information-action » pousseront-ils la loyauté envers ces femmes précarisées pour ne rien leur cacher des tenants et aboutissants du dépistage ? Du risque d’être surmédicalisées et entraînées abusivement dans un parcours de soins ? D’être malades à cause de lésions qui pouvaient être ignorées ? Leur dira-t on tout cela lors de la « sensibilisation » ?

 

Mais que dis-je ! Foin de précarité puisqu’il est prévu de « favoriser l’accès au dépistage des femmes les plus éloignées du dépistage en organisant la prise en charge des frais de transport pour une mammographie à Cayenne (Guyane) et lutter contre les inégalités d’accès et de recours (Martinique). »
Pour les autres (Guadeloupe, Réunion, Lot et Garonne, Creuse ??), bah tant pis, elles n’avaient qu’à vivre en Martinique.

 

-« Réaliser des états des lieux de l'accès au dépistage organisé du cancer du sein des personnes handicapées dans les établissements sociaux et médico-sociaux (Franche-Comté). »

Les femmes valides étant déjà pour la moitié récalcitrantes au dépistage, il faut l’élargir à une autre clientèle, celle de ces captives d’un handicap physique et /ou mental, captives aussi des centres desquels elles dépendent, et qui ne pourront guère opposer de résistance. On essaie d’imaginer la pertinence de découvrir chez ces personnes fragiles le cancer in situ ou le carcinome micro-invasif, ensuite l’annonce de la maladie,  l’information sur les soins qu’on lui infligera et pour finir le parcours de soin dans lequel elle sera engagée pour améliorer….sa qualité de vie ??  La perte de chance de ces femmes est-elle vraiment dans l’omission d’une petite lésion qui ne mettra jamais en danger sa vie, tout simplement déjà parce que la longévité de certaines est réduite du fait de leur handicap ? Le cynisme n’a pas de limite puisqu’il s’agira aussi de « réaliser des actions de sensibilisation adaptées aux personnes en situation de handicap au sein des Comités locaux d’accompagnement aux dépistages (CLAD) (Nord-Pas-de-Calais) », autrement dit il s’agira bien sûr d’actions d’incitation à des personnes qui pour certaines, entravées par le handicap, ne poseront pas beaucoup de questions..

 

-Enfin « faciliter l’accès au dépistage des personnes détenues en sensibilisant les équipes des Unités de consultations et de soins ambulatoires (Océan Indien) ». Encore des captives….

Alors à la Réunion, si les femmes désirent bénéficier d’un accès plus facile par la prise en charge de leurs frais de transport (voir plus haut), le mieux, c’est qu’elles se fassent incarcérer.

 

L’INCA n’est pas en reste des «actions «, puisqu’il est question d’ «  Accroître l’efficacité des programmes de dépistage organisé du cancer du sein », on persiste, et on signe !

2- Pages 72 et 74:

«  l’objectif d’un taux de couverture du dépistage organisé ou spontané du cancer du sein des femmes de 50-74 ans de 75% au 31/12/2018 « 

« accroître l’efficacité des programmes de dépistage organisé du cancer du sein »,

En avant toutes, et marchons droit dans le mur puisque si l’on en croit les toutes dernières études parues (étude Harding https://www.cancer-rose.fr/analyse-etude-jama/) l’accroissement de la participation des femmes au dépistage de 10% augmente la détection des petites lésions de 16% sans aucun changement sur la mortalité, sans amélioration de la survie. Là non plus, toujours pas question d’information sur le surdiagnostic qui découlera mécaniquement de l’augmentation du taux de participation…

 

3-Page 75 : «  encadrer et limiter les pratiques (de dépistage individuel) dont l’efficacité n’est pas avérée voire délétère. »

On ne se rend même pas compte du caractère scandaleux et stalinien de cette phrase : c’est partir d’un pré-requis du caractère anodin du dépistage organisé, et en plus faire fi du droit au libre choix des femmes.

Qu’on informe correctement de toutes les données du dépistage, le pour, le contre, celui qui est organisé et celui qui est non-organisé (individuel), mais qu’on laisse les femmes décider elles-mêmes de ce qu’elles veulent, quand elles le veulent, de la façon dont elles veulent, avec qui et quoi elles le veulent !

Page 75 toujours, on nous parle de " démarches innovantes, ciblées et géolocalisées sur le web afin de toucher très directement les personnes concernées par les dépistages, notamment celles y ayant peu recours”.

Alors là on atteint des sommets, on ne sait toujours pas faire de l’information correcte, on ne voit toujours pas clair dans l’utilité et la nocivité potentielle du dépistage qu’on songe déjà à l’appli Androïd pour ne surtout pas oublier la date de son mammotest, ou peut-être à la puce implantable pour géolocaliser les heureuses bénéficaires et surtout faire en sorte qu’elles viennent bien se présenter. Brave new world…

 

____________________________________

 

CONCLUSION :

Ce plan cancer 2014-2019, qui n’aborde que le côté technocratique du dispositif et anticipe dans ses termes ce que les hautes instances ont envie de promouvoir, confirme que tout est décidé d’ores et déjà, au mépris des alertes, au mépris de l’information sur les doutes à laquelle la population féminine a droit.

 

 

 

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Résumé des actions 2016

ClÔTURE CONCERTATION, le 28 mai à l’Institut Pasteur, Paris

voir ici : https://www.cancer-rose.fr/category/concertation/

Les différentes étapes y sont détaillées et vous trouverez aussi le rapport du comité d'orientation à télécharger, ici : https://www.cancer-rose.fr/nouvelles-du-front-premiere-manche/

au bas de l'article.

 

Collectif Cancer-Rose reçu au ministère, le 17 juin 2016

par Dr Bour

Etaient présents : Mr Pierre Buttet du Bureau des maladies chroniques somatiques, Mme Saline de l’Institut National de Veille Sanitaire et Mr Patrick Ambroise Chef du bureau de la santé des populations à la direction générale de la santé. J’ai pu expliquer mon parcours personnel, la composition de notre collectif, notre vision et nos objectifs d’information.

Ensuite j’avais la parole, j’ai parlé une heure et il y a eu une discussion à peu près de vingt minutes ensuite. Nous avions sélectionné deux sujets : premièrement le problème de l’arrêté du 29 septembre 2006 et deuxièmement l’encadrement des messages d’octobre rose.

 

1° L’arrêté https://www.cancer-rose.fr/article-pour-labrogation-de-larrete-de-2006/

-L’arrêté est obsolète car a 10 ans et les données de la science DEPUIS 2006 apportent la fin du mythe selon lequel le dépistage sauve des vies. Objectif non atteint.
La balance bénéfice /risque n’est pas en faveur d ‘un bénéfice clairement démontré. Il est plutôt négatif avec la survenue de risques graves que sont : surdiagnostic, fausses alertes, cancers radio-induits. Donc par là-même l'arrêté est également dangereux car incitatif .

IL FAUT REVOIR, ACTUALISER ET MODERNISER LES DOCUMENTS D’INFORMATION. AVEC L’INVITATION DONNER L’INFORMATION

2° PROBLEMES RELATIFS AUX COURSES ROSES/PUB/SLOGANS

1-distorsion de l’information par slogans, spots télé, pas de support scientifique, greffe opportuniste des enseignes, mensonges, interpellation de femmes jeunes, utilisation de la peur des femmes
-comment encadrer la communication ?
2-financement des associations roses:
*il faut exiger transparence
*profiter d’évènements pour donner meilleure information loyale aux femmes
3-stéréotypes entretenus
Le président Hollande promettait d’engager un plan de lutte contre les stéréotypes : voir le rose dans les courses, le site concertation, dépliants de l’INCA
On pourrait demander un cahier des charges pour courses, associations, marques , enseignes, pub :
-quel %age des dons reversé ?
-quel est le budget marketing ?
-quels destinataires ? Types de programmes financés ?
-retombées scientifiques ? Résultats de cette recherche ?
Publications ? Aboutissement des recherches financées ?
-le produit vendu ou promu a-t il un lien avec la cause ?
-Le produit a-t il une innocuité en matière de santé ? Toxique ?
-s’abstenir de message incitatif ou coercitif à contenu médical ou alors le donner de façon complète, avec pour et contre !

Discussion :

On m’a assurée que de toute façon toute la communication sur le dépistage allait être revue, en tous cas celle émanant du ministère et des pouvoirs publics. Je suis revenue sur le Plan Cancer qui entérine dans ses libellés le dépistage.*

Il m’a été expliqué que l’application dépendait des politiques en place. Mais qu’on allait plancher sur de la documentation plus équilibrée et que ça, c’était la priorité, surtout depuis la concertation où nous avions été entendus. En ce qui concerne d’encadrer la communication d’octobre rose, il s’agissait de liberté d’expression ; j’ai objecté que la même liberté d’expression et dans les mêmes proportions n’était pas donnée aux médecins. Mais là et à mon plus grand étonnement, l’un de mes trois interlocuteurs m’a affirmé qu’il ne comprenait rien au document de la Cochrane (RISK *), alors que ce document est parfaitement éloquent. Il m’a été objecté que je comprenais parce que j’étais une professionnelle de santé, mais j’affirme que lorsque je propose ce genre de document aux patientes, c’est tout à fait bien compris. Nous avons eu ensuite un point de désaccord sur le bénéfice du dépistage, qui selon nous est nul. Mme Saline nous explique que pour l’INVS il n’est pas complètement nul, il y a certes les pb surdiagnostics et fausses alertes mais il est quand-même préférable pour les patientes de détecter tôt. Et là, j’ai eu beau déployer l’argument selon lequel l’histoire naturelle du cancer n’est pas connue et que la détection de la plus petite tumeur n’est pas forcément bénéfique ni utile aux femmes, j’ai pu constater une fois de plus, comme lors de la concertation, que ce problème est trop contre-intuitif pour être accepté. Il va falloir à l’avenir beaucoup de pédagogie pour comprendre et faire comprendre. Cf article Duperray https://www.cancer-rose.fr/le-sur-diagnostic-par-dr-bernard-duperray/

D’après Mme Saline il ne serait pas possible d’envisager la destruction pure et simple du dépistage de masse. De toute façon était attendu le rapport final de la  concertation qui interviendrait fin août. J’ai objecté que le libellé de la concertation c’était « améliorer le dépistage » et qu’on ne pouvait pas améliorer un dispositif qui ne marchait pas. Mme Saline m’a affirmé que le libellé était effectivement maladroit et pas vraiment adapté, mais que je sois assurée qu’il s’agissait de faire en sorte que l’information soit complètement différente à ce qui existe actuellement, et que nos doléances de toute façon seraient remontées. Idem pour l’arrêté, il serait fortement « dépoussiéré ». La discussion s’est achevée, les trois interlocuteurs, très courtoisement m’ont conseillé de nous rassurer, que tout serait pris en compte et que le sens de notre combat et de nos doléances était bien perçu. Nous ne sommes toutefois pas rassurés pour autant et attendons ardemment le résultat du rapport final du comité de la concertation. Il nous semble que sur le plan de la communication vers les femmes , il y aura sûrement un effort de fait, les termes seront plus nuancés, l’incitation moins agressive, et nous espérons que l’information donnée aux femmes sera vraiment plus neutre et plus objective à l’avenir. Mais il ressort de tout cela que l’évolution des dispositifs de santé publique dépend des volontés politiques, et que même un résultat favorable d’une concertation peut très bien être mis sous le boisseau, s’il ne correspond pas à l’idéologie défendue par les politiques en place. Il y a bien des strates à franchir entre la base, qui, désinformée depuis longtemps évolue pas à pas, et les hauteurs ministérielles, plus ou moins enclines à faire des efforts…

 

*

https://www.cancer-rose.fr/a-propos-du-plan-cancer-2014-2019/

 

ON A ECRIT : 

  • A Mr le Maire de Metz, à propos de la course rose La Messine    LETTRE-MAIRE
  • Lettres aux députés, concernant la loi santé 2004

 

LETTRE-BAPT

LETTRE-DEMORTON

LETTRE-ZIMMERMANN

LETTRE-ZUMKELLER

 

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Chimiothérapies anticancéreuses : un marché de dupes

Chimiothérapies anticancéreuses : un marché de dupes

ANNETTE LEXA , Docteur en Toxicologie

8 MARS 2016

A priori, si l’on en croit les messages officiels diffusés dans le plan national cancer 2014-2019 (1), nous assistons à de véritablement progrès dans le domaine des thérapies anticancéreuses et la société (via les associations de patients) est prête à permettre à tout un chacun – au nom de la sacrosainte « égalité des chances » - de pouvoir disposer des meilleurs traitements, en particulier expérimentaux. Dans le cas contraire, la société et les associations de patients considère même que cela s’apparenterait à une « perte de chance ».

Face à l’essor de la chimiothérapie orale, le plan national cancer 2014-2019 – qui est muet sur l’origine de cet essor - donne une grande importance (bien plus qu’à la prévention) à l’amélioration de la «  compliance (adhésion au traitement ) et à la gestion des événements indésirables » des nouvelles thérapeutiques anticancéreuses « innovantes » .

Le terme « compliance » (page 16 du rapport) donne froid dans le dos et en dit long sur la nécessité gestionnaire de les faire accepter coûte que coûte au corps et au psychisme des patients rétifs en « sécurisant » leur « parcours » de soin.

Nous assistons en effet depuis 10-15 ans à un empressement quasi frénétique à mettre sur le marché de nouvelles molécules anticancéreuses. Parallèlement le prix de ces nouvelles molécules explose. Les patients sont quasiment contraints de se voir enrôler dans des essais thérapeutiques. Ce que les patients ignorent, c’est qu’il n’y a pas de corrélation entre le prix, le coût de mise sur le marché et l’efficacité en terme de taux de survie. De plus, ces nouvelles molécules ne font pas l’objet d’une grande rigueur en matière d’essais cliniques ni de recherche de la preuve de leur efficacité. Leur efficacité - si elle existe - est purement statistique et c’est l’uniformisation des traitements qui prévaut par type de cancer et non par type de patient. Une lecture attentive des articles scientifiques parus sur ce sujet ces dernières années laisse même entendre qu’il est plus important de les mettre sur le marché que de s’assurer de leur efficacité et de leur sécurité (3). Ces médicaments bénéficient d’une procédure accélérée de mise sur le marché. Pourtant, il est prouvé que ces médicaments mis prématurément sur le marché ont plus d’effets indésirables graves que ceux mis sur le marché de manière plus rigoureuse. Pire, une fois la molécule mise sur le marché (comme le bevacizumab), il est difficile de les retirer du marché.

Aux USA, sur les 71 molécules approuvées par la FDA (Food and Drug Administration) entre 2002 et 2014 , l’amélioration de la survie, tous cancers confondus, est de 2 mois (5). En ce qui concerne les tumeurs solides, une revue de l’EMA (Agence Européenne du médicament) atteste d’une amélioration de 1,5 mois (3) .

Actuellement, en Europe et aux USA , les agence de régulation acceptent des essais non randomisés, des essais sans témoin, des protocoles biaisés, des essais en phase III alors que la phase II n’était pas convaincante et elles ferment les yeux sur la qualité des publications de ces essais. Pire, elles acceptent comme preuve d’ « efficacité » des nouvelles molécules « innovantes » des « surrogate end points » , mesures de sous-paramètres biochimiques, moins coûteux à mettre à en œuvre, et venus se substituer au seul critère qui devrait prévaloir en oncologie, la survie comme critère d’efficacité. Peu importe que vous mourriez dans 10 jours, l’oncologue regardera avec satisfaction vos biomarqueurs remonter.

Le ciel s’assombrit encore un peu plus lorsque l’on apprend (9) qu’un grave retour en arrière est annoncé dans la nouvelle loi de santé aux USA (21st Century Cures Act) dont l’objectif avoué est de rentabiliser au mieux les investissements en réduisant le temps et le nombre de patients des essais cliniques voire de supprimer tout essai clinique pour le remplacer par des « surrogate end point » ( sous-paramètres biochimiques) , des études in vitro et in silico. Les USA ouvrent la voie d’une régression d’autant plus grave qu’actuellement, aux USA, un tiers de médicaments sont approuvés après des essais de moins de 6 mois et que le nombre moyen de patients est de 760. Les négociations en sous-main autour du futur traité transatlantique rendent ce scenario de plus en plus probable en ce qui nous concerne.

Aux USA, un certains nombre d’experts en oncologie pensent même que la ligne rouge morale entre profits raisonnables et bénéfices a été dépassée 3, 6. D’une part parce que les plus pauvres ne peuvent se permettre de payer, n’ayant plus assurance médicale (un traitement de cancer coûte à l’assuré environ 20000 à 30 000 $). En France, les coûts sont les mêmes mais nous ne nous en rendons pas compte car nous sommes tous couverts par une assurance maladie et un remboursement optimal.

En matière de « combat contre le cancer », il est important de rappeler aussi que 85% de la recherche est publique donc financée par le contribuable et les dons, le marché oligopolistique (qui a trait à l'oligopole, marché caractérisé par un petit nombre de vendeurs face à un grand nombre d'acheteurs ) de ces entreprises pharmaceutiques ne dépensant que 1.5% de ses revenus à cette recherche, entre 5 à 13% pour les essais cliniques et entre 20 à 45% en marketing.

Après cette petite mise au point, on a une lecture toute différente du dernier plan cancer 2014-2019 : l’explosion du recrutement de patients dans les essais cliniques de phase précoce de médicaments « innovants » (ont-ils d’ailleurs réellement le choix ?), la participation financière publique à cette marche forcée saluée comme il se doit, laissent un étrange goût amer : est-ce la santé des patients ou le marché qui prime? Non seulement on ment aux patients mais cela dessert gravement et les patients et la recherche. Ne serait ce que pour leur sécurité, les patients et les médecins doivent exiger une plus grande rigueur. Il en va aussi de l’équilibre budgétaire de la santé. Enfin il est permis de se demander si les agences de santé sont au service de l'intérêt des patients ou de celle des laboratoires : à la lumière de la nomination du Pr Agnès Buzyn à la tête de la Haute Autorité de Santé, on peut raisonnablement s’interroger 7 8. Les agences de santé devraient retrouver leur vocation première qui est d’assurer la protection du public et elles lui devraient une information claire et transparente.

BIBLIOGRAPHIE

1. Plan Cancer 2014-2019 , 2E RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE , Février 2016

2. Au nom de tous les seins, documentaire France 5

3. Light D.W., Lexchin J., Editorials, Why do cancer drugs get such an easy ride? Rushed approvals result in a poor deal for both patients and cancer research , BMJ 2015;350:h2068

4. Prasad V et coll., The Strength of Association Between Surrogate End Points and Survival in Oncology: A Systematic Review of Trial-Level Meta-analyses. JAMA Intern Med. 2015 Aug;175(8):1389-98

5.Fojo T, Mailankody S, Lo A. Unintended consequences of expensive cancer therapeutics

- the pursuit of marginal indications and a me-too mentality that stifles innovation and

creativity, JAMA Otolaryngol Head Neck Surg 2014;140:1225-36.

6. Hagop Kantarjian et coll., High Cancer Drug Prices in the United States: Reasons and Proposed Solutions J Oncol Pract 2014 Jul 6;10(4):e208-11.

7. Les petits arrangements de la nouvelle présidente de la Haute autorité de santé (7 mars 2016) https://www.mediapart.fr/journal/france/070316/les-petits-arrangements-de-la-nouvelle-presidente-de-la-haute-autorite-de-sante

8. Le professeur Agnès Buzyn nommée Directeur de la HAS. La victoire de big onco (8 mars 2016) http://docteurdu16.blogspot.fr/2016/03/le-professeur-agnes-buzyn-nommee.html

9. Avorn J and Kesselheim A.S., The 21st Century Cures Act — Will It Take Us Back in Time? N Engl J Med 2015; 372:2473-2475

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Présentation à la journée sur la surmédicalisation du 12 janvier 2016, organisée par le groupe Princeps

Accès à la présentation : https://cancer-rose.fr/2016/07/30/tribulations-dune-radiologue-en-depistoland/

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