Surmortalité reliée au dépistage, une étude brésilienne troublante

11 novembre 2017

Mortalité par cancer du sein et facteurs associés dans l’Etat de São Paulo, Brésil: une analyse écologique

http://bmjopen.bmj.com/content/7/8/e016395

Auteurs :

  • Carmen Simone Grilo Diniz
  • Alessandra Cristina Guedes Pellini,
  • Adeylson Guimarães Ribeiro,
  • Marcello Vannucci Tedardi,
  • Marina Jorge de Miranda,
  • Michelle Mosna Touso,
  • Oswaldo Santos Baquero,
  • Patrícia Carlos dos Santos,
  • Francisco Chiaravalloti-Neto

Objectif de l’étude

L’objectif de l’étude est d’identifier les facteurs associés aux taux de mortalité par cancer du sein standardisés selon l’âge dans les municipalités de l’Etat de São Paulo, Brésil, entre 2006 et 2012.

Dans cette étude, le risque accru de mortalité par cancer du sein était associé, au niveau municipal (12.4 millions d’habitants à Sao Paulo), aux facteurs suivants: taux de mammographie, proportion de femmes en âge de procréer nullipares, et proportion de femmes ayant accès à des soins privés.

Le système d’information sur la mortalité utilisé pour obtenir les données de mortalité par cancer du sein repose sur un recensement quasi-complet des décès au niveau national, avec des données exhaustives pour l’État de São Paulo et avec seulement une faible proportion de décès sans cause définie.

L’étude permet d’examiner des effets invisibles sur le plan individuel, les effets du surdiagnostic et du surtraitement sont en général mieux étudiés en population.

Résultats de l’étude

Les femmes qui ont eu leur première grossesse avant l’âge de 18 ans ont seulement le tiers du risque de cancer du sein comparativement aux primigestes de plus de 30 ans et aux nullipares.

L’association directe entre la mortalité par cancer du sein plus élevée et la proportion de femmes qui utilisent le secteur privé de la santé concorde avec les études sur le sujet publiées au Brésil. Cette conclusion contre-intuitive d’un meilleur accès aux soins de santé entraînant une augmentation de la mortalité peut s’expliquer par un «surdiagnostic», mais les auteurs soulignent aussi le fait que les femmes les plus riches sont plus exposées aux carcinogènes potentiels.

Enfin selon les auteurs, le dépistage par mammographie n’a pas eu d’effet positif : il a plutôt été associé à une augmentation de la mortalité par cancer du sein.

Cette étude, ainsi que plusieurs autres études récentes citées par les auteurs (voir la bibliographie article BMJ) ont montré des taux élevés de faux positifs, d’examens invasifs supplémentaires et de diagnostic de cancers inoffensifs (surdiagnostic) entraînent des traitements inutiles et des préjudices associés (surtraitement) ; tout cela entraînant un équilibre négatif entre les inconvénients et les avantages du dépistage.

Le traitement du cancer du sein a de nombreux effets indésirables dont peuvent résulter des complications chirurgicales, de la radiothérapie, de la chimiothérapie et des traitement anti-œstrogéniques.

Les auteurs mentionnent que l’absence de réduction de la mortalité, toutes causes confondues, entre les populations dépistées et non dépistées, a été attribuée aux risques supplémentaires de traitements, plus fréquents chez les femmes dépistées.

Les risques accrus de maladies cardiovasculaires dues à la toxicité cardiaque du traitement par l’anthracycline et le trastuzumab et à la radiothérapie sont bien documentés, et les auteurs citent aussi le cancer radio-induit imputable au rayonnement de la mammographie et aussi à celui de la radiothérapie.

Pour conclure

Les constatations faites selon lesquelles le taux de mammographie était associé, au niveau municipal, à une mortalité accrue, sont une preuve supplémentaire pour les auteurs d’une surestimation probable des avantages du dépistage et de la sous-estimation de ses risques associés.  Pour les auteurs cela indique la nécessité d’appuyer le choix informé des patients et d’accentuer les actions de prévention primaire.

Selon eux, des études supplémentaires devraient être menées pour explorer les lien de causalité potentiels dans ces associations.

Mais dans tous les cas, cela indique la nécessité d’élargir les actions de prévention primaire et de dépistage individualisé, de solliciter la vigilance des femmes par rapport à leurs seins, d’améliorer l’accès à l’information des femmes en leur « traduisant » cette information de manière conviviale (connue sous le nom de «alphabétisation au risque»).

Les auteurs soulignent aussi la nécessité d’approches novatrices pour contrôler les résultats positifs et négatifs des programmes de santé publique.


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