Emission télé sur l’enjeu du dépistage par la revue d’information italophone Patti Chiari

Film documentaire sur le dépistage du cancer du sein diffusé par Patti Chiari le 26 avril 2019 :

https://www.rsi.ch/la1/programmi/informazione/patti-chiari/Inchieste/inchieste-andate-in-onda/Mammografia-serve-davvero-11683454.html

Patti Chiari est revue hebdomadaire d'information sur les droits des citoyens et des consommateurs, de la télévision publique suisse italienne RSI , et elle a consacré son édition du 26 avril au dépistage du cancer du sein par mammographie.

Présentation du documentaire sur le site  :

Il vaut mieux prévenir que guérir : une maxime populaire ancienne que la médecine moderne emprunte souvent. Beaucoup considèrent la prévention comme le fait de se soumettre à un examen diagnostique qui pourrait détecter une maladie avant qu’elle ne se déclare. Mais anticiper le diagnostic, est-ce vivre plus longtemps ?

Il est important d'en discuter afin de permettre à chacun de faire des choix éclairés.

C’est le cas de la mammographie de dépistage pour le dépistage précoce du cancer du sein : depuis 2014, le canton (il s'agit du canton italophone du Tessin dans le sud de la Suisse NDLR) le propose à toutes les femmes à partir de 50 ans. Un programme de santé publique qui, selon les promoteurs, augmenterait les probabilités de survie.

Mais c’est vraiment vrai ?

Patti Chiari, magazine d'information, analyse de façon approfondie des recherches et des évaluations, parfois contradictoires, des spécialistes. La controverse scientifique est ouverte sur la mammographie de dépistage de masse : des chercheurs illustres affirment même qu’elle serait plus dommageable que bénéfique. Mais sur un point, tous les experts sont d’accord : le dépistage par mammographie comporte des risques que les femmes doivent connaître. Pour le canton, la décision de participer au programme doit être libre et consentie.

Mais comment prendre une telle décision si vous n’êtes pas expert ? Les femmes invitées à participer au dépistage mammographique organisé reçoivent-elles du canton et des médecins toutes les informations nécessaires pour faire un choix conscient ?

Et encore : que se passe-t-il lorsqu'une femme de 40 ans en bonne santé demande conseil aux spécialistes tessinois sur le risque de cancer du sein ? Une envoyée de Patti Chiari est allé incognito dans plusieurs cabinets médicaux de la Suisse italienne en se présentant comme une patiente désireuse de connaître les bénéfices et les risques du diagnostic précoce. Recevra-t-elle des informations correctes ou un test inutile lui sera-t-il proposé ?

Patti Chiari explique ici les avantages, les doutes et les dangers de la mammographie de masse en donnant à deux oncologues de renom la parole en studio : Michael Baum, professeur émérite de chirurgie à l’Université de Londres, oncologue, autorité mondiale sur le thème du cancer du sein et père de la mammographie de dépistage (au début du lancement du programme de dépistage du NHS au Royaume Uni), et à Olivia Pagani, spécialiste à l’EOC ( Institut d'oncologie de la Suisse italophone) du cancer du sein, oncologue et responsable du programme de dépistage du sein du canton tessinois.

Débat

L’émission était articulée autour de deux enregistrements réalisés par Serena Tinari, s'ensuivaient plusieurs discussions en direct sur le plateau.

Il a été question de la balance bénéfice/risque, des biais de devancement du diagnostic par le dépistage, du surdiagnostic, de l'impact sur la mortalité et du problème du consentement éclairé.

L’objectif de l'émission était aussi de se faire une idée quant à ce que les femmes comprennent des informations qui leur sont remises par les autorités de santé dans le cadre du programme de dépistage organisé du canton du Tessin. Dans le cadre d’un test, dix femmes ont donc été interrogées après avoir pris connaissance de cette brochure officielle d’information : six d’entre elles ont répondu par « oui » à la question « La mammographie permet-elle de prévenir le cancer du sein ? ». Ces réponses montrent que les informations diffusées par les organisateurs du programme de dépistage ne leur permettent pas d’apprécier correctement le rapport bénéfice/risque du dépistage par mammographie ni de prendre une décision éclairée.

Le deuxième sujet était consacré à un autre test : une femme de 39 ans asymptomatique et sans histoire familiale de cancer du sein a pris rendez-vous dans plusieurs centres de sénologie de la région, en précisant qu’elle voulait juste s’informer. Elle a été rassurée dans plusieurs centres qui lui ont dit qu’à son âge, elle n’avait pas besoin de faire de mammographie. Dans d’autres, en revanche, on lui a conseillé de faire directement une mammographie et/ou une échographie.

Le plateau en direct a accueilli Michael Baum (chirurgien, professeur émérite, University College London) et Olivia Pagani (oncologue, professeure, Ospedale Regionale di Lugano, Institute of oncology of southern Switzerland). Olivia Pagani a estimé que l’un des avantages du dépistage organisé comme il est pratiqué dans le programme du canton du Tessin, offrait notamment un avantage : celui de permettre aux radiologues accrédités de réaliser et de lire davantage de mammographie, ce qui améliore selon elle la précision des diagnostics. Michael Baum a jugé quant à lui « inacceptabe l’idée qu’on utilise des femmes pour "permettre aux radiologues de s’entraîner à la lecture". Il a souligné également que le dépistage n'avait aucun impact la mortalité toutes causes confondues et que le surdiagnostic montrait clairement à quel point nous comprenions encore mal l’histoire naturelle du cancer du sein, rappelant que les carcinomes canalaires in situ n’étaient pas les seuls cancers concernés par le surdiagnostic.

La balance bénéfice/risques

Dans l'émission, une information essentielle sur le rapport bénéfices/risques du dépistage a été rappelée aux femmes :

Sur 1000 femmes qui se font dépister pendant 10 ans :

24 auront un diagnostic de cancer du sein

1 décès sera évité. Autrement dit, 999 femmes sur 1000 n’auront aucun bénéfice en termes de mortalité.

De nombreuses recherches soutiennent que le bénéfice du dépistage en terme de mortalité serait plutôt de l’ordre d’une demi-femme pour mille et pour d’autres il serait nul. Dans ce film, Michael Baum, professeur émérite de chirurgie à l’Université de Londres, rappelle que le dépistage du cancer du sein n’a pas d’impact sur la mortalité toutes causes confondues.

200 femmes seront inquiétées inutilement par un faux diagnostic positif

4 femmes seront surdiagnostiquées (c’est le chiffre qui figure dans la brochure du canton du Tessin) et subiront un traitement inutile avec toutes ses conséquences.

L’émission rapporte que d’autres études estiment le surdiagnostic à 7 et non 4 pour 1000 (Cochrane) et même 12 pour 1000 (New England Journal of Medicine).

Pour une femme ayant tiré bénéfice du dépistage , 4 à 12 vies seront gâchées pour rien au nom de la médecine préventive.

Selon Pr Baum, dans une publication de 2013, https://www.bmj.com/content/346/bmj.f385,  les effets nocifs du dépistage du cancer du sein l'emportent même sur le bénéfice si le taux de décès causés par les traitements est inclus dans le calcul (NDLR).

Au total, participer au dépistage revient à jouer à la loterie ou à la roulette russe avec un goût immodéré du risque.

Liens

Grand merci à Catherine Riva, journaliste d'investigation à https://twitter.com/RecheckHealth__pour l'aide à la synthèse de l'émission.__________________

Notre vidéo sous-titrée en Italien est disponible ici : https://www.youtube.com/watch?v=XIT-EcrerGA

Voir aussi cette sympathique animation en 2 minutes pour illustrer la balance bénéfice/risques du dépistage : https://www.facebook.com/watch/?v=2329129337319429

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Coût de l’extension de la fourchette d’âge du dépistage du cancer du sein du NHS en Angleterre

10 avril 2019

https://www.bmj.com/content/365/bmj.l1293.full

https://www.healthwatch-uk.org/projects/breast-cancer-screening-age-extension/122-age-extension-trial-of-mammography-screening-part-5-april-2019.html

 

Susan Bewley , professeure émérite d'obstétrique et de santé des femmes 

Mitzi Blennerhassett , rédacteur médical 

Mandy Payne , rédactrice indépendante 

[i]

Contexte et préoccupations

 

AgeX est l’acronyme de l'essai inspiré et financé par le gouvernement britannique : il s'agit d'un essai contrôlé randomisé pour l'extension de la fourchette d'âge prévue par le NHS (Service de santé national britannique) dans le programme du dépistage du cancer du sein en Angleterre. L’essai vise à évaluer les risques et les bénéfices de prolonger le dépistage par mammographie du cancer du sein en dehors de la fourchette actuelle de 50 à 70 ans, en offrant une mammographie supplémentaire aux femmes âgées de 47 à 49 ans et jusqu’à 73 ans. Annoncé comme « probablement le plus grand essai contrôlé randomisé jamais entrepris dans le monde », AgeX a aléatoirement randomisé trois millions de femmes dans les groupes d’âge élargis et dépisté un million.

Des inquiétudes sont soulevées par Susan Bewley du groupe d'observateurs Health Watch quant à la pertinence de l’information sur les bénéfices et les risques fournie aux femmes incluses dans l’étude. Il y a, selon ces observateurs de la santé, un risque de préjudice par surtraitement chirurgical et d'autres risques pour les participantes. Les femmes apprennent leur inclusion dans le projet de recherche au moyen d’une lettre comportant un rendez-vous de dépistage déjà décidé.

Il y a un possible sur-risque chirurgical pour les femmes âgées de 47 à 49 ans et les auteurs demandent si la poursuite du dépistage du cancer du sein est toujours appropriée, car l’accumulation de données probantes remet en question ses avantages supposés.

Politique de dépistage du cancer du sein au Royaume Uni et controverses

Le dépistage par mammographie vise à détecter le cancer du sein avant qu’une grosseur ne soit palpable, ce qui donne l’occasion de commencer le traitement plus tôt. Le programme de dépistage britannique actuel, lancé en 1988, offre une mammographie triennale à toutes les femmes âgées de 50 à 70 ans. Sur les 2,85 millions de femmes invitées en 2015-2016, 75 % y ont participé.

À l’instar des programmes à l’échelle mondiale, la tranche d’âge de dépistage a été définie sur la base de preuves indiquant à quel moment la mammographie est la plus efficace pour détecter les tumeurs dans le sein.

On estime que le programme préviendrait chaque année 1300 décès dus au cancer du sein.

Mais des preuves montrent que les bons taux de survie au cancer du sein depuis l’introduction du dépistage de masse résultent probablement d’améliorations concomitantes de l’hormonothérapie adjuvante et de la chimiothérapie. Il y a aussi des preuves de ce que le dépistage ne réduit pas le nombre de tumeurs avancées et qu’il entraîne un surdiagnostic important, avec radiothérapies, tumorectomies et mastectomies supplémentaires.

L'essai d'extension de l’âge du Royaume Uni (XAge trial)

En 2007, la stratégie de réforme du cancer du gouvernement travailliste a reconnu le diagnostic tardif comme un facteur contribuant aux mauvais taux de survie en oncologie au Royaume Uni.
Les propositions du gouvernement incluaient l’élargissement de la fourchette d’âge pour le dépistage du cancer du sein. En 2012, le gouvernement promettait que les femmes recevraient neuf dépistages entre 47 et 73 ans, avec une première mammographie garantie avant l’âge de 50 ans. Mais les capacités de réalisation de ce projet étant limitées, la décision a été prise de procéder plus progressivement à l’extension prévue. Selon les organisateurs, la randomisation « offrirait une occasion unique d’obtenir des preuves impartiales sur les effets nets de la nouvelle politique », et l'extension d'âge, selon les organisateurs, irait de toute façon de l’avant, que l’étude se poursuive ou non.

L’essai randomisé à l’échelle nationale visant à prolonger la plage d’âge du dépistage du cancer du sein du NHS a été lancé par Public Health England [ii] en juin 2009 avec une participation prévue à l'origine de 1,1 million de femmes sur 13 ans. La conception de l'essai randomise des lots de 1000 invitations envoyés de façon randomisée normalement à des femmes âgées de 50 à 70 ans, invitations étendues pour inclure des personnes âgées de 47 à 70 ans ou de 50 à 73 ans. La moitié des femmes âgées de 47 à 49 ans et la moitié des femmes âgées de 71 à 73 ans sont invitées à un dépistage, tandis que toutes les femmes âgées de 50 à 70 ans sont invitées au dépistage habituel. L’essai compare l’incidence du cancer du sein et la mortalité entre les participantes dépistées et non dépistées de la population étudiée. En 2016, l’essai d'extension de l’âge a été rebaptisé AgeX. L’objectif de recrutement a été porté à « au moins six millions ».

Une assise peu solide

Il est louable de vouloir mettre à l’essai une politique gouvernementale avant qu’elle ne soit mise en oeuvre. Toutefois, la conception de cet essai n'apporte pas de preuves suffisamment solides pour une future mise en pratique.

Il est de bon aloi de faire précéder les expériences scientifiques par un examen préalable systématique des données disponibles afin d’éviter du gaspillage dans la recherche, et de répéter des préjudices inutiles.

Dans le protocole d’essai original en sept pages d’AgeX on a mentionné brièvement les préoccupations émergentes au sujet de l’absence d’efficacité et des méfaits potentiels du dépistage, ceux-là décrits comme du « soi-disant surdiagnostic ». Le commanditaire de l’essai (Université d’Oxford), lorsqu’on lui a demandé si le protocole avait fait l’objet d’un examen scientifique indépendant par des pairs, a simplement répondu aux auteurs que ce protocole avait été examiné par le comité consultatif du ministère de la Santé sur le dépistage du cancer du sein.

Résultats : La principale mesure des résultats d’AgeX est la mortalité causée par le cancer du sein. Le nombre total de décès par cancer n’est pas enregistré, et la mortalité globale a été ajoutée en 2016 comme résultat secondaire, cette donnée ne sera pas incluse dans l’analyse primaire. La mesure de la mortalité par cancer du sein seule exclut les décès résultant des effets secondaires du traitement ou des cancers causés par la mammographie.

Cette mesure de la mortalité globale, incluant les décès secondaires aux traitements et aux cancers radio-induits serait pertinente, car les essais effectués et convenablement randomisés sur le dépistage du cancer du sein ne révélèrent aucun effet sur la mortalité totale par cancer.

Biais potentiels—Les estimations de la mortalité par cancer du sein dans le dépistage sont particulièrement soumises à des biais, parce qu’il faut faire du dépistage sur un grand nombre de personnes avant de constater un faible effet, et cela sur un long délai pour récolter des résultats probants.

Les biais observés dans les essais randomisés de qualité moyenne ont vraisemblablement entraîné une surestimation des bénéfices.

Au cours de la dernière décennie, AgeX a augmenté sa durée prévue et la taille de l’échantillon initial, les résultats de l’étude ont été modifiés, et une proposition d’analyse statistique a été rétrospectivement annexée. Ces facteurs, conjugués au plan énoncé dans le protocole de poursuivre l’essai au-delà d’une « taille d’échantillon fixée et prédéterminée » jusqu’à ce que des résultats clairs émergent, augmentent la probabilité d’une évaluation biaisée. (NDLR : On ne change normalement jamais un protocole a posteriori).

Problème du manque de consentement explicite et pleinement éclairé

Selon les bonnes pratiques cliniques, les participantes à l’essai doivent être informées qu’elles participent à un essai et elles doivent recevoir des détails sur tous les bénéfices et les risques connus, et cela dans un langage qu’elles peuvent comprendre.
Lorsque l’essai d'extension de l’âge de dépistage a été conçu pour la première fois, on savait déjà que le dépistage était associé à des risques, mais on ne croyait pas que ceux-ci l’emportaient sur les bénéfices de la détection précoce. Les risques vont des résultats faussement positifs avec détresse psychologique associée,  jusqu'au surdiagnostic – avec des anomalies qui n’auraient pas nui à la femme au cours de sa vie, entraînant potentiellement un traitement dangereux, douloureux et mutilant.

La documentation de l’essai AgeX précoce fait référence à un « soi-disant surdiagnostic ». Mais l’hypothèse de l’équipe selon laquelle le surdiagnostic était sans importance a été remise en question en 2012 lorsque le Panel britannique indépendant sur le dépistage du cancer du sein, présidé par Michael Marmot[iii], a publié un examen détaillé des données de preuves. Le rapport a reconnu et quantifié le surdiagnostic – pour chaque décès dû au cancer du sein évité, trois « cancers » qui n’auraient jamais impacté les femmes au cours de leur vie seraient détectés et traités.

Les dommages physiques et psychologiques résultant d’un tel traitement sont importants. Pourtant, en 2016, lorsque la cible de recrutement d’AgeX a été portée à six millions de femmes, cette potentielle augmentation des risques concomitante n’a pas été mentionnée ou justifiée dans une demande d’approbation éthique connexe.


Avec la publication du rapport Marmot, la confirmation que les avantages attendus étaient accompagnés de risques significatifs et quantifiables pour les participantes aurait dû déclencher un examen réfléchi de ce projet de recherche et de la conception de l’étude.

Surtout, il aurait fallu déterminer que les participantes puissent maintenant recevoir toute cette information sur les risques et les bénéfices, et qu'on puisse obtenir un consentement explicite et éclairé de leur part.

 Pour AgeX, une décision précoce avait été prise de renoncer à ce consentement. Dans le protocole original il est dit : « une couverture de 100 % est essentielle à la validité scientifique de l’étude, ainsi que l’exclusion des participantes pour lesquelles nous ne pouvons obtenir le consentement ce qui pourrait gravement biaiser les résultats.

Le consentement est donc implicite pour ceux qui se présentent au dépistage. »

Les femmes des groupes invités apprennent leur inclusion au moyen d’une lettre comportant un rendez-vous de dépistage défini, des notes générales à consulter sur la mammographie avec le commentaire approbateur : « Se souvenir…que le dépistage sauve des vies », et un bref dépliant décrivant l’essai, mais il n'y a rien sur les risques potentiels d'y participer. Les femmes reçoivent le livret standard sur le dépistage du cancer du sein, rose, écrit pour les femmes de 50 à 70 ans.

Le livret sur la participation à l’essai a été étoffé en 2014, passant de une à quatre pages, mais la description du risque se limite à « être possiblement reconvoquée pour d’autres tests. »

On ne vérifie jamais explicitement si les participantes à l’essai comprennent bien qu'elles participent volontairement à la recherche plutôt qu’à un dépistage systématique dans le cadre du NHS, qu'elles s'exposent à un sur-risque de sur-détection et d'une potentielle intervention chirurgicale inutile ainsi qu'à d’autres préjudices.

Les essais randomisés sur groupes peuvent être menés sans obtenir le consentement explicite et pleinement éclairé des participants. Comme les participantes sont randomisées en grands groupes, l’obtention du consentement préalable des personnes des groupes est normalement impossible.
L'attitude internationale sur la conduite de tels essais randomisés en groupes stipule que l’exigence de consentement peut être levée lorsque la participation à l’étude présente tout au plus de minimes risques.

Les auteurs pensent à l'inverse que le niveau de risque pour les participantes de cet essai AgeX exige un consentement éclairé.

En effet le public surestime le plus souvent les bénéfices et a une fausse idée des risques des tests de dépistage en général, ainsi les chercheurs ont la responsabilité de dissiper ces idées erronées.

Les médecins eux-mêmes ne comprennent souvent pas les balances bénéfice/risques et sont donc mal équipés pour conseiller leurs patients.

Des aides à la décision bien conçues pourraient soutenir les médecins et leurs patients, mais AgeX ne fait référence à aucun.
Les membres de Health Watch se sont plaints auprès de l’enquêteur principal d’AgeX au sujet du manque d’information des participantes, la plainte a été réfutée en arguant que l’approche avait été approuvée par le comité d’éthique. Une plainte similaire dirigée au comité d’éthique a été retournée en recommandant de s’en remettre aux assurances du chercheur principal....

Les effets de l’élargissement de la tranche d’âge

L’information sur l’équilibre entre bénéfices et préjudices peut être particulièrement pertinente pour les femmes de plus de 70 ans. Le risque de développer le cancer du sein augmente avec l’âge. En 2014, une étude prospective du dépistage du cancer du sein à l’échelle nationale chez les femmes âgées de 69 à 75 ans aux Pays-Bas montrait que le nombre de cancers « précoces » avait fortement augmenté dans le groupe dépisté, sans réduire considérablement le nombre de cas de cancer avancés, et avec peu d’effet sur les décès réels dus au cancer du sein.[iv]

Bien que de telles preuves observationnelles ne soient pas aussi puissantes que celles d’un essai randomisé, une étude de cette taille aurait dû alerter. Au lieu de cela, en 2016, AgeX a été amendé pour prolonger davantage le programme pour les femmes plus âgées, qui seraient désormais invitées triennalement de 71-76 ans, ou de 71-79 ans sous réserve de financement.
Les femmes âgées sont moins en mesure de tolérer la chirurgie que des femmes plus jeunes, en raison de la probabilité accrue de co-morbidité, ce qui fait que le surdiagnostic et le surtraitement ont un effet plus important sur leur qualité de vie et leur fonction physique.

Cette information devrait être mise à la disposition des femmes qui envisagent un dépistage.

On ne peut pas encore connaître tous les effets — bons et mauvais — de l’élargissement de la fourchette d’âge pour le dépistage du cancer du sein, mais une étude de Devon, dans le sud-ouest de l’Angleterre, met en lumière un fait : un nombre d’interventions chirurgicales supplémentaires chez les femmes plus jeunes.

Au Devon, toutes les femmes âgées de 47 à 49 ans sont invitées au dépistage parce que le fournisseur de dépistage du cancer du sein de la région n’est pas autorisé à participer aux essais cliniques. Les résultats de la première année montraient que 4250 (76 %) des 5624 femmes invitées dans ce groupe d’âge ont été dépistées, ce qui a donné lieu à 125 consultations chirurgicales en clinique externe et à 53 opérations. Cela donne une indication de la charge de travail en dehors de l'activité chirurgicale découlant à court terme du dépistage chez des femmes de moins de 50 ans, bien que, comme le soulignent les auteurs de l’étude, l’estimation des effets chirurgicaux et financiers à plus long terme soit plus complexe.

Les femmes participant à l’essai AgeX doivent avoir la possibilité d’établir une balance entre la détection plus précoce (avec plus de possibilités de chirurgie conservatrice du sein), et les risques et préjudices réels auxquels cela les expose.

En extrapolant les chiffres du Devon à toutes les femmes en Angleterre dépistées avant l’âge de 50 ans sur la durée d’AgeX, les auteurs estiment que plusieurs milliers de femmes auront alors recours à une intervention chirurgicale. Compte tenu de ce que nous savons sur le surdiagnostic dans le dépistage du cancer du sein à partir de sources telles que le Panel indépendant du Royaume-Uni sur le dépistage du cancer du sein (Marmot), nous savons qu’une proportion importante de cette chirurgie sera inutile.

Les coûts financiers et humains d’AgeX comprennent également des visites supplémentaires chez les omnipraticiens et des préjudices physiques et psychologiques découlant de diagnostics de cancer qui, méconnus, n’auraient pas causé de problèmes au cours de la vie de ces femmes.

Le traumatisme d'une vie avec cancer peut perdurer pendant toute l'existence, comme les effets de la chirurgie ou d’autres traitements peuvent être durables, la peur de la récidive, la perte d’estime et de confiance en soi..

La recherche montre que lorsque les femmes sont pleinement informées des risques et des avantages d'un dépistage régulier, moins de femmes font le choix de se faire dépister.

Malgré les pressions exercées sur les budgets du NHS, AgeX augmentera de 14 % la charge du programme de dépistage du NHS. Les traitements supplémentaires qui en découleront créeront également un fardeau considérable pour le NHS.

Conclusion des auteurs

La balance entre les bénéfices et risques du dépistage du cancer du sein demeure incertaine. Trois ans après la création d’AgeX, un co-fondateur (Pr Michaël Baum) des programmes de dépistage du cancer du sein du NHS a fait valoir que les décès après traitement d'un cancer du sein diagnostiqué par dépistage pourraient dépasser ceux du cancer du sein dans une population non dépistée. (https://www.bmj.com/content/346/bmj.f385)

Le conseil médical suisse (Swiss Medical Board) a conseillé à son gouvernement de cesser de recommander le dépistage par mammographie.

En 2015, des scientifiques français[v] demandaient par lettre ouverte à leur Ministère de la Santé un arrêt du programme pour les femmes de plus de 50ans, ceci à la suite d' une consultation citoyenne et scientifique sur le dépistage du cancer du sein en France, laquelle préconisait l’arrêt du dépistage du cancer du sein chez les femmes à faible risque de moins de 50 ans.

Il faut donner aux gens suffisamment d’informations pour qu'ils puissent décider s’ils veulent participer à la recherche, surtout lorsque les risques ne sont pas clairs.

Nous demandons que le Comité national de dépistage utilise des encadrés de haute qualité et des tableaux avec pictogrammes visuels pour s'assurer du consentement des patientes dans l'essai AgeX ainsi que dans tous les programmes de dépistage.

Nous faisons appel aux enquêteurs et aux vérificateurs de toutes les données découlant d’AgeX, afin que soit utilisé le taux de décès "toutes causes confondues" comme résultat principal.

Une enquête indépendante sur la qualité scientifique, les mécanismes de gouvernance et les questions éthiques à la suite de cet essai déboucherait sur de futures normes de haute qualité pour la conception et la conduite de futurs essais menés par le gouvernement.

Sur le site de Health Watch

Les observateurs, dont fait partie Susan Bewley, affirment :

Des milliers de mastectomies inutiles pourraient être la conséquence d'une incitation auprès de femmes à participer à l'étude gouvernementale AgeX.

L’étude, annoncée comme «le plus grand essai contrôlé randomisé de l’histoire», a déjà invité plus d’un million de femmes à se soumettre à un dépistage mammographique du cancer du sein sans s’assurer, au préalable, qu'elles aient connaissance du fait que le test pourrait autant leur nuire que leur être bénéfique.

https://www.healthwatch-uk.org/news.html

Commentaire Cancer Rose :

Même si la conception d'essais est basée sur des groupes randomisés, les femmes devrait être informées au moyen de prospectus, d' affiches, de la presse, par la radio, des réseaux de télévision, sociaux, etc. Dans notre époque de communication, il n'y a aucune raison pour laquelle le droit d'accès des femmes à l'information soit limité par des prétendues nécessités scientifiques. En effet, un manque de transparence et d'information donnée au public est assez souvent lié à de la mauvaise science.

La même chose pourrait être dite de l'essai MyPeBS [vi]: les problèmes sont analogues, dans le groupe de dépistage à bas risque, les mammographies commenceront à 40 ans, au lieu de l'âge 45 ou 50 dans le groupe de dépistage habituel. Des femmes de risque modéré auront plus de mammographies que des femmes dans le groupe dépistage habituel. Quelques femmes de plus de 50 auront moins de mammographies et d'autres en feront plus.
Les coûts financiers seront accrus et, plus important encore, il y a des risques accrus pour femmes en terme de surdétection. Pour quel résultat scientifique ? Nous en connaissons déjà le résultat. Le design de cet essai de non-infériorité, avec un seuil de 25 % signifie que si le nouveau dépistage aboutit à 25 % de cancers du sein avancés en plus, on considérera ce nouveau dépistage néanmoins comme "non inférieur" au dépistage habituel. Même si le nouveau dépistage n'a aucun effet du tout sur l'incidence de cancer du sein avancée et la mortalité, on le considérera comme équivalent au dépistage habituel.

Est-ce une coïncidence simple si dans MyPeBS, comme dans AgeX, les informations aux participantes sont minimales ? Dans le prospectus MyPEBS donné aux femmes, le surdiagnostic est grandement minimisé et le surtraitement, une conséquence tangible pour des femmes, n'est pas mentionné du tout.
De mauvaises informations données aux patientes sont aussi, dans l'essai Mypebs, reliées à de la mauvaise science.

Notre "rapid response" publiée dans le BMJ

https://www.bmj.com/content/365/bmj.l1293/rr

A télécharger ci-dessous, BMJ2019-364-I1293

The issues of My PEBS, for our english speaking readers

Références

[i] https://www.healthwatch-uk.org/

[ii]  agence exécutive du ministère de la Santé et des Affaires sociales du Royaume-Uni,  découlant de la réorganisation du National Health Service (NHS) en Angleterre,  assumant le rôle d'une agence de protection de la santé

[iii] Independent UK Panel on Breast Cancer Screening. The benefits and harms of breast cancer screening: an independent review. Lancet 2012;380:1778-86. 10.1016/S0140-6736(12)61611-0 23117178

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3693450/

[iv] https://www.bmj.com/content/349/bmj.g5410

voir aussi notre article : https://www.cancer-rose.fr/la-campagne-pour-le-depistage-de-la-femme-agee-par-le-college-national-des-gynecologues-et-obstetriciens-de-france-cngof/

[v] Organized screening of breast cancers by mammography: to evolve. Letter to the Minister of Health. Prescrire 2016 Oct 14.

http://www.prescrire.org/fr/3/31/52235/0/NewsDetails.aspx

[vi] http://mypebs.cancer-rose.fr/

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Dépistage et intelligence artificielle

8 avril 2019

Dr M.Gourmelon

Dr C.Bour

A propos d'un article paru dans PARIS MATCH du 03/04/2019

Récemment sortait dans Paris Match un article , vantant les mérites d'un appareil de tomosynthèse et de la marque General Electrique qui, associé à l'intelligence artificielle, constituerait une " innovation révolutionnaire" en matière de dépistage du cancer du sein.

Le moins qu'on puisse dire, c'est que les affirmations approximatives et les assertions non validées sont le coeur de cet article.

1° La mise en avant de l'appareil de TDS (tomosynthèse)

Cet appareil de GE, vanté comme "technologie de pointe", est une technique de tomosynthèse.

La tomosynthèse (ou mammographie 3D), est une nouvelle technique d’imagerie radiologique qui permet de diminuer l’effet de superposition des tissus mammaires, car elle reconstitue de manière tridimensionnelle l’image du sein à partir de plusieurs radiographies à faible doses acquises sous différents angles de projection.

Nous avions analysé récemment cette technique : https://www.cancer-rose.fr/association-de-la-tomosynthese-versus-mammographie-numerique-dans-la-detection-des-cancers/

Les deux problèmes essentiels que pose la TDS sont le surdiagnostic et l'irradiation, raison pour laquelle elle n'est justement pas intégrée pour l'instant dans le dépistage organisé.

L'article met d'emblée en avant que l'appareil détecte des microcalcifications plus 'petites que des grains de sable'.
Mais....que va-t-on faire de tous ces grains de sable ?
On sait que la mammographie a une sensibilité élevée pour les carcinomes in situ, se manifestant justement par des petites calcifications. Ces tumeurs sont à 80% peu agressives. Or elles sont traitées comme les cancers invasifs.
Une étude de grande ampleur[1] , a montré que traiter les CIS comme les tumeurs invasives, ne permet ni de réduire les récidives des CIS ni le risque de mortalité par cancer invasif.

Les études qui prennent en compte dans le comptage et les CIS et les invasifs avancent alors un taux de surdiagnostic de 30 à 50%.
Les CIS représentaient moins de 5% de tous les cancers avant les campagnes de dépistage, et dans les zones à forte participation au dépistage les taux de CIS atteignent 15 à 20% des tumeurs.

L'utilisation de la TDS ne fait que renforcer le phénomène de surdétections inutiles et délétères pour les femmes.

L'article parle de 30% de cancers trouvés en plus grâce à l'appareillage, et c'est bien là toute la problématique du surdiagnostic qui est soulevée : la détection en majorité de cancers de bas grade qu'on pouvait ignorer et qui n'auraient pas altéré la vie de la femme.

On s'étonne donc lorsque le Dr Benillouche parle de limiter le surtraitement, qui est la concrétisation et la conséquence directe du surdiagnostic, alors que la technique de TDS dont il se fait le promoteur va augmenter, comme il l'avoue lui-même, le nombre de cancers détectés.
Un article récent conteste l'utilité-même de l'adjonction de la TDS à la mammographie : https://www.bmj.com/content/366/bmj.l4506

2° Les doses

Même si des faibles doses sont utilisées, celles-ci ne sont pas pour autant anodines.

Nous savons [2] [3] que des doses faibles, voire très faibles, peuvent conduire à des cancers radio-induits par défaut de réparation des cassures double brins de l’ADN , et que ceci conduit certains sujets prédisposés génétiquement à un risque de cancer 10 fois plus élevé que les radiorésistants.

De plus l’accumulation de petites doses peut conduire à un risque d’effet d’amplification. Or ce risque n’est actuellement pas pris en compte par les médecins pour les patientes jeunes et/ou à risque familial de cancer du sein.

Enfin, la susceptibilité au cancer du sein chez les porteuses de mutations (de type BRCA1ou BRCA2 ou d’autres…) pourrait être fortement corrélée avec la radiosensibilité de ces femmes, selon l'avis du radiobiologiste N.Foray. (3)

Par ailleurs on ne connaît pas grand-chose sur l’effet de l’étalement dans le temps des doses reçues : les doses reçues par minute, heure, jour, année, ont-elles les mêmes conséquences ?

Citation de l'article : Si votre profil est anodin, vous n’aurez pas à vous astreindre à « une mammo par an ». C’est autant d’irradiations en moins. Ceci signifie donc que les femmes "à profil pas anodin" subissent, alors qu'elles sont à fort risque d'être radiosensibles, une mammographie annuelle ?? C'est cela qui est fait dans les grands centres parisiens ?

Outre l'insuffisance d'information délivrée aux femmes sur les potentiels méfaits de cette technique, notons encore l'énumération d’affirmations fausses.

Dire qu’une femme sur huit sera confrontée au cancer du sein est une présentation trompeuse, ce risque étant un risque cumulé tous âges confondus, calculé sur une population fictive en fonction des risques observés en 2012.

Or il convient de considérer ce risque selon la tranche d’âge. Avec un suivi de 20 années, pour une femme de 40 ans ce risque est de 4%, pour une femme de 60 ans il est de 6%. Nous sommes très loin des 12,5 % affirmés. Cela est expliqué dans le dossier de Que Choisir d’octobre 2017.[4]

"Selon Catherine Hill, épidémiologiste à l’Institut Gustave-Roussy, à Villejuif (94), il (ce chiffre de 1 femme sur 8 NDLR) s’agit d’une surestimation basée sur un calcul portant sur une population fictive suivie de la naissance à cent ans et plus. « Ce qui est pertinent, c’est le calcul pour une femme d’un âge donné suivie sur une durée donnée. Ainsi, le risque de diagnostiquer un cancer du sein dans les dix années suivantes est de 1,9 % pour une femme de 40 ans, de 2,1 % pour une femme de 50 ans, de 3,2 % pour une femme de 60 ans. »

Si ce cancer tue plus que les autres, c’est parce qu’il est le plus fréquent. Mais cela ne veut pas dire que si l’on en est atteint, on a un risque important d’en mourir.  « .... le cancer du sein n’est pas une cause fréquente de décès. En 2013, 4,2 % des femmes en sont mortes ; à titre de comparaison, 27 % ont succombé à une maladie cardio-vasculaire. Si on estime que le dépistage organisé permet une baisse de 20 % de la mortalité par cancer du sein, c’est à peine une femme sur cent qu’il pourrait sauver (20 % de 4,2 %). »

 3° L'intelligence artificielle

Le Dr Dr Mahasti Saghatchian, œuvrant à l'hôpital Américain de Neuilly, vante le logiciel de prédiction du risque. Certains de ces critères qui sont intégrés dans l'algorithme et énumérés dans l'article retiennent notre attention.

la densité mammaire

Plusieurs études sont disponibles, depuis l’étude de Wolfe[5] sur la relation entre densité mammaire et risque de cancer du sein.

Cette étude ancienne a été fortement contestée à l’époque, même par les tenants du dépistage.

D’autres études ont vu le jour depuis, étudiant la pertinence de relier ce facteur de densité avec d’autres facteurs de risque, pour pouvoir élaborer des modèles de calculs du risque de contracter dans les 5 ans un cancer du sein.[6]

Aujourd’hui, aucun outil d’estimation du risque de cancer du sein utilisant la densité mammaire n’a, pour l’heure, fait la preuve de sa pertinence.

La HAS, dans un travail sur l’identification des facteurs de risques, écrit :

 « La densité mammaire élevée avant la ménopause n’a pas été retenue comme un facteur de risque à l’issue des travaux du volet 1 ».

l’âge

L’âge est bien reconnu depuis longtemps comme facteur de risque du cancer du sein avec un pic statistique entre 50 et 60 ans.

les antécédents

Les antécédents familiaux de cancer mammaire prêtent à discussion.

Avec le surdiagnostic que les évaluations les plus récentes et fiables situent aux alentours de 40%,( jusqu’à même 50%), le dépistage a généré de la maladie, et a ainsi augmenté artificiellement le nombre des familles à risque.

Un cancer surdiagnostiqué entraîne irrémédiablement l'estampillage de toute la lignée féminine comme "à risque".

Le générateur des femmes à risque intégrées dans la grande moulinette du logiciel est donc en tout premier lieu....la médecine.

On peut donc sans risque s’inquiéter sur le fait que de très nombreuses femmes se verront attribuer un facteur de risque de cancer du sein au seul prétexte d’examens et de biopsies plus liés au « toujours plus médical » qu’à de réelles problématiques de santé.

4° Les liens d’intérêt du Dr Benillouche

Le Dr Benillouche possède de très nombreux liens d’intérêt avec les industriels. (Voir ceux pour 2016/2017, cliquez sur l'image)

Il aurait dû les indiquer dans cet article comme la loi l’y oblige (article L.4113-13 du Code de la santé publique).

Le Dr Benillouche dirige le CSE de Paris,( "l'un des plus grands centres d'imagerie").

Ce radiologue est généreusement mis en avant, alors qu’un article de loi, l'article 19 du code de la santé publique,  interdit toute publicité à visée commerciale... Enfin, le Dr Benillouche est le cofondateur d’une start-up spécialisée dans la collecte de données cliniques pour la mise en place d'un score de risque personnalisé, il s'agit de la Start up Pink of view.[7] C'est bien vainement que nous y avons cherché les publications scientifiques des "progrès" mis en avant…

Une question se pose devant l’étendue des conflits d’intérêt de ce médecin : parle-t-il en tant que commercial de GE, de patron d’une start-up qu’il cherche à valoriser, ou comme médecin soucieux des patients qui lui sont confiés ?

CONCLUSION

La question cruciale est : où est l’intérêt des femmes, éblouies, sans doute, par les termes « innovation » « médecine personnalisée », "data mining", "maladie décelée tôt", "séminaires bien-être" ?

Confieront-elles leurs seins afin d'alimenter le lucratif business à la fois de l'imagerie médicale mais aussi de concepteurs de "logiciels prédictifs" dont on cherche encore la validation scientifique ?

N’oublions pas que la concertation citoyenne avait appelé de ses vœux de véritables études sur l'étude de l'histoire naturelle de la maladie cancéreuse.  Mais on n’en voit nulle part.

C'est pourtant sa compréhension qui permettrait un barrage à la course effrénée à la détection de la plus petite lésion et limiterait les innombrables diagnostics inutiles infligés aux femmes.

On ne le répétera jamais assez :

Tout petit ne veut pas dire détecté tôt, ne veut pas dire forcément de meilleur pronostic, ne veut pas dire diagnostic d'une lésion qui aurait forcément évolué, ne signifie pas gage contre le cancer mortel.

C'est cela qu'il faut comprendre, et pourquoi la course à la détection du toujours plus petit ne règle pas le problème du cancer mortel ; ne fait pas diminuer le taux des cancers graves ; mais fait augmenter artificiellement les taux de nouveaux cas annuels sans aucune influence sur la survie ou la longévité des femmes.

Tous ces « vendeurs » n’ont-ils décidément rien compris, en cherchant à améliorer un dispositif qui ne marche décidément pas ?

Ou leur but est-il ailleurs que dans l’intérêt des femmes ?

La conclusion de cet article est en ce sens symptomatique.

Beaucoup de sociétés de data nous approchent pour acheter nos images radiologiques. Elles en ont besoin pour développer des outils d’IA qui feront le diagnostic via des machines. Cela pose des questions éthiques… » Comment réagir ? Se replier sur sa « vie privée » ou se montrer ouvert pour aider le progrès ?

C'est vraiment ça le progrès ?

Le trafic de data, la constitution de banques de données gérées par des start-ups cotées en bourse, est-ce cela l’avenir de la médecine ?

Sous un aspect « merveilleux », cet article, décortiqué par nos soins montre que le business est la principale préoccupation, très loin devant la santé des femmes, que l’on veut éblouir avec des mots comme « innovation » et « intelligence artificielle ».

BIBLIO

[1]                                              http://oncology.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=2427491
Auteurs : Steven A. Narod, MD, FRCPC1,2; Javaid Iqbal, MD1; Vasily Giannakeas, MPH1,2; Victoria Sopik, MSc1; Ping Sun, PhD1
JAMA Oncol. Published online August 20, 2015. doi:10.1001/jamaoncol.2015.2510

[2]                               Perez A.F. et col, Les faibles doses de radiations : vers une nouvelle lecture de l’évaluation de risque, Bull.Cancer, 2015 .

[3]                            Nicolas Foray, Catherine Colin et Michel Bourguignon , Radiosensibilité : L’évidence d’un facteur individuel, Médecine/sciences 2013 ; 29 : 397-403.

[4] https://www.quechoisir.org/actualite-octobre-rose-des-slogans-pro-depistage-a-nuancer-n47168/

[5]                                              Wolfe JN. Breast patterns as an index of risk for developing breast cancer. AJR 1976;126:1130-9.

[6]                                                   études sur la densité mammaire et le risque de cancer :

  • Annals of Internal Medicine Personalizing Mammography by Breast Density and Other Risk Factors

for Breast Cancer: Analysis of Health Benefits and Cost-Effectiveness

John T. Schousboe, MD, PhD; Karla Kerlikowske, MD, MS; Andrew Loh, BA; and Steven R. Cummings, MD

The Contributions of Breast Density and Common Genetic Variation to Breast Cancer Risk

Article (PDF Available) in JNCI Journal of the National Cancer Institute 107(5) · May 2015 with 77 Reads

DOI: 10.1093/jnci/dju397 · Source: PubMed

Celine M Vachon

  •  McCormack VA, dos Santos Silva I. Breast density and parenchymal patterns as markers of breast cancer risk: a meta-analysis. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev. 2006;15(6):1159–1169
  •  KERlikowske K, Cook AJ, Buist DS, et al. Breast cancer risk by breast density, menopause, and postmenopausal hormone therapy use. J Clin Oncol. 2010;28(24):3830–3837.

Breast Cancer Research and Treatment

May 2012, Volume 133, Issue 1, pp 1–10

Risk prediction models of breast cancer: a systematic review of model performances Thunyarat Anothaisintawee, Yot Teerawattananon, Chollathip Wiratkapun

[7]

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La campagne pour le dépistage de la femme âgée par le Collège National des gynécologues et obstétriciens de France (CNGOF)

Dr Cécile Bour

7 avril 2019

Le 29 mars 2019 le CNGOF, société savante des gynécologues obstétriciens français, lançait, avec la Ligue contre le cancer une grande campagne nationale pour l'extension du dépistage au-delà de la limite supérieure des 74 ans en dépit des recommandations de la HAS, les limites d'âge fixées par cette autorité n'étant pas arbitraires, mais reposant sur des arguments médicaux de balance bénéfice-risques défavorable au-delà de ces limites, déjà que cette balance n'est pas très à l'équilibre pour la tranche d'âge recommandée. Ses recommandations reposent aussi sur des arguments scientifiques (études épidémiologiques) et économiques faisant entrer en jeu les coûts de la mortalité et morbidité induites sur les terrains très fragiles des personnes au grand âge. [1].

Le titre de la campagne est "Trop vieille pour ça ? Seuls les autres le croient".

Mais quels sont ces "Autres" dénoncés de façon si binaire ? Les méchants, les "fake-newseurs", les indignes de notre espèce essayant d'informer de façon objective les femmes sans les effrayer inutilement, sans sortir du chapeau un dossier historique de cancer nécrosé d'une patiente n'ayant jamais consulté ? Brandir un épouvantail, même hors contexte comme les "Uns" l'osèrent, cela  sert toujours à terroriser efficacement les foules d'un châtiment divin en cas de non-observance de l'église, ici l'église de dépistologie. [2]. Eh oui, même des professionnels de santé n'ont ni honte ni sens du ridicule pour faire dans le spectaculaire...

Il est vrai qu'après la baisse de participation au dépistage de la tranche d'âge des 50-74 ans, enfin informée de la controverse scientifique et de l'épineux problème du surdiagnostic, les bons "Uns" (puisque nous sommes les Autres, vous suivez ?) se sentent obligés de relancer par tous les moyens ce dépistage moribond. Vers les tranches d'âge en dessous des 50 ans, on n'ose encore pas trop, quoiqu'en 'of ' les gynécologues ont la fâcheuse habitude de proposer le dépistage hors toute recommandation officielle à des quadragénaires.

La tentation est grande d'une percée vers les tranches d'âge au-dessus...

Des études, toujours des études !

Après un échange sur twitter avec Mr le PR Nisand, président de cette société savante qui, pour toute justification de ses campagnes lance des "cris d'alarme et de colère" dans les journaux alsaciens, ce dernier s'émouvait de notre absence de preuves et d'arguments scientifiques sur les avanies de ce dépistage tardif.

Nous, les "Autres" donc, qui nous éclairons encore à la bougie et hantons les couloirs à la recherche d'âmes perdues, nous en avons pourtant bien, des études.

Alors voilà déjà en vrac, avant que nous détaillions plus loin le pourquoi du comment, quelques études pour satisfaire l'inquiétude des "Uns" sur l'absence d'études chez les "Autres".[3]

On peut lire aussi les conséquences de ce genre de folies semées par les "Uns" sur les femmes plus âgées, en Grande Bretagne.[4]

Pourquoi on ne dépiste pas les femmes au grand âge ?

Peu d'essais ont été consacrés au dépistage chez les femmes au grand âge. L'étude des chercheurs de l'université de Leyden, sur les données des Pays Bas, publiée en 2014 dans le BMJ, rattrape ce manque [5].

Selon les auteurs, après 70 ans, le dépistage organisé du cancer du sein serait inutile. En effet, à cet âge, la pratique du dépistage n'améliore pas de façon significative la détection des cancers aux stades avancés mais fait en revanche bondir le nombre de surdiagnostics et donc de surtraitements.

Aux Pays-Bas, le dépistage du cancer du sein est proposé aux femmes jusqu'à 75 ans depuis la fin des années 1990. «Pourtant, rien ne prouve que le dépistage chez les femmes plus âgées est efficace », expliquent les auteurs de l'étude, mentionnant aussi le fait que peu d'essais aient été réalisés spécifiquement sur ces groupes d'âge.

Pour les chercheurs néerlandais, le dépistage systématique après 70 ans entraînerait surtout la détection et donc les traitements de lésions qui n'auraient pas évolué en maladie durant la vie des patientes.

Ces traitements inutiles entraînent un impact sur la santé trop important, et une co-morbidité trop lourde chez ces personnes âgées, qui supportent moins bien les effets secondaires des traitements, chirurgicaux, des radiothérapies et des chimiothérapies.

C'est pourquoi ils recommandent la non-extension du dépistage généralisé chez les plus de 70 ans et recommandent une décision personnalisée, en fonction de l'espérance de vie, du risque de cancer du sein, de l'état général et de la préférence des femmes concernées.

Rappelons aussi que le système immunitaire s’affaiblit avec l’âge. Ce qui suppose qu’on contracte davantage de cancers, de maladies infectieuses.  Tous les organes s'épuisent et fonctionnent moins bien, les facultés de cicatrisation, de régénération tissulaire sont moindres, tout cela est en prendre en compte dans l'administration de traitements lourds.

Pour conclure

Au-dessus de l'émotion venant du coeur, de la peur du cancer nouant nos tripes, nous possédons un cerveau qui nous permet de prendre des décisions balancées, neutres et utiles pour les populations. Si la société savante des gynécologues garde comme habitude la terrorisation des femmes, nous nous en tenons comme toujours à l'énoncé des faits.

Oui, même les "Autres" aiment leur maman.

Notre réaction, le 2 mai par l'envoi d'une lettre au Conseil National de l'Ordre des Médecins : https://cancer-rose.fr/2019/05/02/lettre-au-conseil-national-de-lordre-des-medecins-concernant-la-campagne-du-cngof/

Lire aussi : https://cancer-rose.fr/2019/02/06/depistage-chez-la-femme-agee/

Références

[1] https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1741170/fr/depistage-du-cancer-du-sein-en-france-identification-des-femmes-a-haut-risque-et-modalites-de-depistage

[2] https://www.lalsace.fr/actualite/2017/06/21/des-femmes-qui-se-condamnent-a-mort

[3]

  • de Glas NA, de Craen AJM, Bastiaannet E, etal . Effect of implementation of the mass breast cancer screening programme in older women in the Netherlands: population based study. BMJ 2014;349:g5410. 10.1136/bmj.g5410 25224469
  • de Glas NA, Kiderlen M, Bastiaannet E, etal . Postoperative complications and survival of elderly breast cancer patients: a FOCUS study analysis. Breast Cancer Res Treat 2013;138:561-9. 10.1007/s10549-013-2462-9 23446810

CrossRefPubMedWeb de la ScienceGoogle Scholar

  • Van de Water W, Bastiaannet E, Hille ET, Meershoek-Klein Kranenbarg EM, Putter H, Seynaeve CM, et al. Non-persistance d'un traitement endocrinien spécifique à l'âge chez les patientes ménopausées chez lesquelles un cancer du sein à récepteurs hormonaux positifs a été diagnostiqué: analyse de l'étude TEAM. Oncologue 2012 ; 17 : 55 -63.

Résumé / Texte intégral GRATUITGoogle Scholar

  • Hurria A, K Brogan, KS Panageas, C Pearce, L Norton, A Jakubowski, et al. Profils de toxicité chez les patientes âgées atteintes d'un cancer du sein et recevant une chimiothérapie adjuvante. Cancer du sein Res Treat 2005 ; 92 : 151 -6.

CrossRefPubMedWeb de la ScienceGoogle Scholar

  • http://bmjopen.bmj.com/content/7/8/e016395
  • Synthèse dans Revue « Médecine » mai 2011, 228; concepts et outils "Faut-il dépister le cancer du sein après 75 ans ?"
  • New Breast Cancer Screening Technologies in Older Women—Is It Time to Pump the Brakes? Ilana B. Richman, MD Cary P. Gross, MD

https://jamanetwork.com/journals/jamainternalmedicine/article-abstract/2720130?utm_source=twitter&utm_campaign=content-shareicons&utm_content=article_engagement&utm_medium=social&utm_term=011419#.XD0BRFQZ7Ao.twitter

[4] https://www.mirror.co.uk/news/uk-news/thousands-elderly-women-face-crazy-12476451

[5] https://www.bmj.com/content/349/bmj.g5410

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Lettre de Michael Baum, The Times

Lettre de Pr Michael Baum dans Le Times du 24 mars 2019

Professeur Michael Baum est professeur émérite de chirurgie et professeur invité en sciences humaines University College London.

 

La lettre :

"Prolongation of survival is not a reliable outcome measure of screening for cancer but more of an artefact. There are two reasons for that, firstly lead time bias and secondly over-diagnosis. Lead time reflects a frame shift in observing the natural history of the disease that can be understood with this analogy. If you get on a train bound for Edimburgh at Durham that crashes at Newcastle you live for 20 minutes yet if you board the same train at King Cross you live for two and a half hours. Over diagnosis results from the detection of sub-clinical foci of  disease that microscopically look like cancer yet are not programmed to progress. These account for about 30% of screen detected "cancers" that are then over-treated by surgery, radiotherapy and chemotherapy, all of which have toxic consequences.

For that reason the only meaningful outcome measure is the comparison of all-cause mortality between a screened and unscreened population. Sadly screening seems to be zero sum game in that for every breast cancer death avoided there is one death from over-treatment of pseudo-cancers. I write as one of the architects of the NHSBSP in 1987/88 and it saddens me to suggest it is time to de-implement screening. At the same time i am delighted that we have a dramatic fall in breast cancer mortality since its peak in 1985 thanks to improvement on treatment."

 

_______________________________

 

Traduction

 

L’allongement de la survie n’est pas une mesure fiable du dépistage du cancer, mais plutôt un artéfact. Il y a deux raisons à cela, d’abord un biais d’avance au diagnostic (lead time bias) et ensuite un surdiagnostic.

Le "lead time bias" (ou biais de devancement) reflète un glissement de fenêtre d’observation dans l’observation de l’histoire naturelle de la maladie qui peut être comprise avec cette analogie : Si vous montez à Tours dans un train qui va à Paris et que ce train s’écrase à Orléans, vous vivez pendant 30 minutes ; si vous montez dans le même train à Bordeaux, alors vous vivrez pendant trois heures et demie*.

Le surdiagnostic résulte de la détection de foyers infra-cliniques de la maladie. Au microscope, ils sont semblables à des cancers, mais ne sont pas programmés pour progresser. Le surdiagnostic représente environ 30% des "cancers" détectés au dépistage qui sont ensuite surtraités par la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie, tous ces traitements ayant des conséquences néfastes.
C’est pourquoi la seule mesure adéquate des résultats est la comparaison de la mortalité toutes causes confondues entre une population dépistée et une population non dépistée. Malheureusement, le dépistage semble être un jeu à somme égale en ce sens que, pour chaque décès par cancer du sein évité, il y a un décès dû au surtraitement des pseudo-cancers.

J’ai été l’un des créateurs du NHSBSP (English National Breast Screening Programme, programme national anglais de dépistage du cancer du sein) en 1987/88 et cela m’attriste de suggérer qu’il est temps de supprimer le dépistage. Dans le même temps, je suis ravi que nous ayons une chute spectaculaire de la mortalité du cancer du sein depuis son pic en 1985 grâce à l’amélioration des traitements.

(NDLR : Au Royaume-Uni, entre 1985 et 1993, baisse de 11 % de la mortalité par cancer du sein alors que le dépistage n’a été opérationnel qu’en 1988.)

 

*l'auteur a utilisé une analogie adaptée à la géographie britannique !

Ce que l'auteur explique est que le dépistage anticipe bien la découverte du cancer mais cela ne change en rien l'espérance de vie, votre survie apparaît plus longue en raison d'une anticipation de la 'date de naissance du cancer' du fait de sa détection avant l'arrivée de symptômes (ou alors il n'y aurait même jamais eu de symptôme....), mais sans influence sur votre longévité. L'issue sera la même que vous soyez monté à Tours ou à Bordeaux.

 

 

 

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Généralités sur les examens de santé systématiques ; Cochrane/Canada

La multiplication des bilans de santé systématiques : utiles ou délétères ?

 

Par Dr C.Bour, à propos de deux publications.

19 mars 2019

 

 

La revue de la Collaboration Cochrane

https://www.cochrane.org/fr/CD009009/les-bilans-de-sante-generaux-pour-la-reduction-de-la-mortalite-et-des-maladies

 

En janvier 2019, la Collaboration Cochrane, collectif de chercheurs nordiques auteurs de l'importante méta-analyse sur le dépistage du cancer du sein (voir dans les références de notre brochure en page d'accueil), nous propose une revue sur les bilans de santé systématiques proposés aux populations saines. Réduisent-ils les maladies ou les décès  ?

 

L'objectif de ces bilans de routine est de détecter précocement la maladie, de prévenir son développement ou de rassurer les personnes. Dans certains pays, les bilans de santé font partie intégrante des soins médicaux.

Etant donné que pour certains dépistages la balance se trouve, d'après les données les plus récentes, parfois davantage du côté des effets néfastes que des bénéfices pour les personnes, les auteurs se sont posé la même question concernant les bilans de santé systématiques. Pour ce faire, les auteurs ont passé en revue 17 essais randomisés comparant une des bilans de santé généraux proposés à des adultes versus l’absence de tout bilan de santé.

Ils ont trouvé des résultats dans quinze essais cliniques incluant 251 891 participants. Onze de ces essais ont porté sur le risque de décès et ont inclus 233 298 participants, pour 21 535 décès. Les auteurs assurent pouvoir donner des conclusions avec grande certitude, compte tenu de l'abondance des données disponibles.

Les conclusions sont en effet assez tranchées : proposer de façon systématique des bilans de santé est probablement peu bénéfique, en revanche cette attitude peut conduire à des examens et des traitements inutiles. Notamment sur la mortalité par maladie cardio-vasculaire et sur les AVC , les bilans n'ont que très peu d'effets.

Deux raisons sont invoquées : soit les personnes à risque de maladie pourraient être déjà détectées lors d'une consultation médicale pour tout à fait autre chose, prises en charge et suivies par le médecin traitant, ou alors les personnes à risque ne se présentent pas aux bilans proposés et n'effectuent pas les examens suggérés...

 

 

Deuxième article, édité dans le journal de l'association médicale canadienne, (cliquez sur le lien dans le titre)

 

Il pose d'emblée la nécessité d'une réforme sur ces bilans systématiques jugés sur-utilisés. L'article pointe du doigt le problème des directives émises en Amérique du Nord par les associations de spécialistes, pratique plus courante qu'en Europe.

Cette situation s’avérerait globalement plus néfaste que bénéfique, compte tenu du fait que chaque test médical, chaque procédure et chaque traitement comporte des risques. L’ensemble de ces interventions ferait au bout du compte plus de mal que de bien, et de plus monopoliserait des ressources qui pourraient être utilisées à meilleur escient, notamment pour traiter des personnes réellement malades.

Les auteurs citent l’Association canadienne des radiologues qui, en 2016, publiait une directive recommandant aux femmes ayant un risque moyen de cancer du sein de commencer leur dépistage par mammographie à l’âge de 40 ans ( https://car.ca/wp-content/uploads/Breast-Imaging-and-Intervention-2016). .pdf )

Le Groupe d’Etude Canadien sur les Soins de Santé Préventifs (GECSSP) ainsi que plusieurs organisations européennes, dont la" European Society for Medical Oncology", préconisaient plutôt de commencer un tel dépistage à 50 ans.

Et de fait, des données de la recherche suggèrent que le taux de mortalité par cancer du sein aux États-Unis, où la mammographie de dépistage est recommandée à partir de 40 ans, est le même que celui observé en Europe de l’Ouest où le dépistage débute à 50 ans. Ces données montrent donc qu’un dépistage plus précoce n’accroît pas la survie des patients. (http://www.cmaj.ca/content/190/49/E1441?ijkey=bb39b8c952649eabd2b6095a904d7c92b44a604e&keytype2=tf_ipsecsha )

La source de ces divergences, selon les auteurs de l'article du CMAJ, serait les conflits d'intérêts des médecins préconisant ces recommandations, mais aussi ce que les auteurs appellent le « biais de spécialité », c'est à dire que les spécialistes auraient tendance à proposer ce pour quoi ils ont été formés à pratiquer et à proposer, justement.

Finalement, les recommandations canadiennes ont donc été revues à la baisse en 2018 :

recos Ca 2018

 

Concernant le dépistage du cancer de la prostate par exemple, le "National Comprehensive Cancer Network", un groupement de centres de cancérologie, comprenant 25 urologues recommandait dans le guide pour le dépistage du cancer de la prostate le dosage du PSA à partir de 45 ans et au-delà de 75 ans chez les hommes en bonne santé, alléguant très peu ou aucune co-morbidité !  La Société européenne d'oncologie médicale, elle, recommande de ne pas réaliser cette recherche chez les hommes sains pour tout groupe d'âge, ceci repris en France dans les recommandations de la HAS. (voir aussi l'article sur le sujet : https://www.cancer-rose.fr/en-parallele-au-depistage-du-sein-celui-de-la-prostate-du-surdiagnostic-aussi/

Ces recommandations du National Comprehensive Cancer Network pourraient bien être attribuées au "biais de spécialité", à des conflits d'intérêts, ou même aux deux.

Aux États-Unis, les taux de mortalité par cancer de la prostate ont bien diminué 10 ans après la mise en œuvre du dépistage du PSA, mais des tendances similaires en matière de mortalité ont également été signalées au Royaume-Uni, où le dépistage du PSA était non recommandé, en raison d'un surdiagnostic important et d'un risque accru de mutilation d'hommes jeunes avec fort retentissement sur leur vie ultérieure.

 

Autre exemple, le dépistage du cancer colo-rectal : une recommandation élaborée par un panel de six membres de l'American College of Gastroenterology, tous des gastro-entérologues, donnait la coloscopie comme stratégie de dépistage à privilégier.

En revanche, le US Preventive Services Task Force, ne comprenant pas de gastroentérologue ni de chirurgien spécialisé dans la chirurgie gastro-intestinale dans son pannel de 16 membres, recommandait un dépistage avec seulement des tests de recherche de sang occulte dans les selles, ou sigmoïdoscopie, ou colonoscopie.

Les 7 membres du pannel de la Société européenne d'oncologie médicale, composé de 6 oncologues médicaux et d'un seul chirurgien gastro-intestinal proposait quant à elle la recherche de sang occulte dans les selles, et précisait que les preuves d'efficacité du dépistage par coloscopie étaient limitées.

 

D'autres exemples de divergences dans les recommandations selon le nombre de spécialistes dans les panels existent aussi dans le domaine de la cardiologie.

 

 

Analyses et pistes d'explication

 

Selon les auteurs de l’article, lorsque plusieurs options sont disponibles, les sociétés de médecine spécialisée ont tendance à privilégier les procédures et les interventions liées à leurs spécialités.

les directives les plus fiables sont celles qui sont déterminées par des « comités multidisciplinaires » comprenant des individus dotés « d’une expertise en épidémiologie, en biostatistique et dans la méthodologie des essais cliniques », et qui seraient ainsi « indépendants des organes directeurs des sociétés de spécialistes ».

 

 

Opinion recueillie de Dr Viens, président de l’Association médicale canadienne (AMQ)

 

 

Le Dr Hugo Viens, président de l’Association médicale canadienne (AMQ)

a été interrogé dans Le Devoir,  quotidien d'information publié à Montréal, au Québec (Canada)

Le Dr Viens voit plutôt l’effet d’un "biais de perspective". Selon ce praticien, « Le médecin est plus face à l’arbre et voit moins la forêt derrière. Le médecin qui est face à son patient veut détecter un cancer. Mais quand on prend du recul et qu’on passe de l’intérêt d’une personne à celui de la population, on se rend compte que, pour sauver un individu, on a dû soumettre inutilement des milliers de personnes à un test de dépistage comportant souvent des risques de complications et de souffrance. De plus, quand les ressources sont limitées, c’est de l’argent qu’on ne met pas sur des aspects sur lesquels on pourrait avoir encore plus d’impact sur la santé".

Autre citation du Dr Viens issu de Le Devoir : « toutes les fois que le résultat d’un test de dépistage de PSA (dépistage prostate) est un peu élevé, on soumet le patient à des biopsies ayant des risques de complication. Pour sauver un patient, on rend 10 000 hommes stressés par un possible diagnostic de cancer de la prostate qui auront des saignements et des douleurs, qui manqueront des journées de travail et qui consommeront des ressources du système de santé ».

 

 

Conclusion

 

D'après les auteurs de l'article du CMAJ, les sociétés de médecine spécialisées devraient reconnaître qu'elles ont tendance à servir les intérêts de leurs membres, qui ne correspondent pas toujours aux intérêts du public.

Les groupes de référence devraient être de composition multidisciplinaire, indépendants des organes directeurs des sociétés de spécialistes et viser à réduire les conflits d'intérêts liés à la rémunération des actes qui découlent de leurs recommandations.

Les panels composés uniquement de spécialistes risquent de manquer d’hétérogénéité et d’opinions divergentes.

Les panels de directives devraient idéalement comprendre des personnes ayant une expertise en épidémiologie, en biostatistique et en méthodologie d’essais cliniques.

Pour l'instant les directives émanant d’organes indépendants demeurent les seules à satisfaire aux normes adéquates....

 

 

 

 

 

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Retours et considérations sur les programmes de dépistages

https://mdedge-files-live.s3.us-east-2.amazonaws.com/files/s3fs-public/issues/articles/kim_cancerscreening.pdf

A propos d'un article paru dans le CLEVELAND CLINIC JOURNAL OF MEDICINE du mois de mars 2019.

Dr Myung S. Kim, interniste, department of Internal Medicine, PeaceHealth Medical Group, Eugene, OR

Dr Vinay Prasad, hémato-oncologue*, auteur de nombreuses publications mettant en doute l'utilité des dépistages systématiques. voir https://www.cancer-rose.fr/de-la-pertinence-des-depistages-de-nos-jours-a-propos-de-deux-articles/

Il est question de ce que les programmes de dépistage, depuis la reconnaissance par les scientifiques de la survenue d'effets adverses tels que les fausses alertes et le surdiagnostic, tendent à viser non plus la totalité de la population mais davantage les groupes de personnes dits "à haut risque" pour un cancer donné, augmentant ainsi le bénéfice attendu dans cette population et en limitant les risques.

Bien que le débat sur le dépistage du cancer s'oriente actuellement davantage vers une discussion plus équilibrée sur les avantages et les inconvénients, de nombreux patients sont encore soumis à des dépistages plus agressifs que ne l'imposent les recommandations officielles (NDLR : en France des femmes jeunes sont envoyées au dépistage du cancer du sein dès 40 ans, donc hors recommandations,  et parfois même avant, selon des "habitudes" de spécialistes.).

La conviction que le préjudice potentiel d'un dépistage routinier est mineur par rapport au fait de "sauver une vie" sous-tend cette attitude. Mais malgré la détection plus précoce de lésions tumorales, beaucoup de gens continuent de décéder du cancer en dépit de dépistages plus répandus.

Réalité "comptable"

Du point de vue simplement comptable, en examinant les chiffres du tableau ci-dessous, le dépistage du cancer n’est pas très efficace, même en se basant sur des estimations optimistes ...

Davantage d'agressivité en matière de dépistage serait-elle une réponse ?

Exemple du cancer de la prostate : 27 "hommes à diagnostiquer" pour sauver une vie sur 13 années, le nombre "d'hommes à traiter" est de 33, la moitié seront soit impuissants, soit incontinents soit les deux pour éviter un décès. Une large proportion des hommes traités, peut-être la moitié, l'aura été inutilement. Au total, il y aura aux alentours de 15 hommes dont l'existence sera détruite à jamais, pour un décès évité.

Les auteurs, de façon un peu provocatrice, estiment que si on partage l'avis que seuls les bénéfices doivent être pris en compte lors de la rédaction de recommandations sur le dépistage, alors la conclusion logique va bien au-delà du dépistage. On doit pouvoir proposer une approche différente pour réduire les décès par cancer dans la population générale :
à savoir enlever les seins de tout le monde, la glande prostatique, et le côlon avant que le cancer ne survienne...

Couper c'est prévenir

Si la chirurgie prophylactique des organes est étendue à toute la population, il y aura une réduction considérable du taux des décès par cancers. Ôter tous les organes pré-cancéreux pourra sauver la vie de nombreuses personnes qui seraient décédées à cause de ces organes. Le taux d'efficacité approcherait les 100%..

Si les partisans d’un dépistage agressif pensent que l’objectif est de réduire autant que possible la mortalité par la cause spécifique de mortalité, en accordant peu d'importance aux problèmes du surdiagnostic et du surtraitement, alors ils doivent aussi défendre logiquement la chirurgie prophylactique universelle.

La chirurgie prophylactique pourra certes conduire à des préjudices tels que les complications per-opératoires et /ou postopératoires. la mastectomie totale bilatérale pourra conduire au stress émotionnel de l’image altérée du corps. La prostatectomie conduira à certaines complications du long terme telles que l’incontinence urinaire et le dysfonctionnement sexuel. Néanmoins, la chirurgie prophylactique d'organes permettrait ainsi de sauver beaucoup plus de vies que les pratiques actuelles de dépistage. Cela pourrait aussi réduire le poids mental, car les patients inquiets pourraient être assurés de ne jamais développer de cancer, alors que le dépistage implique souvent des résultats ambigus, des suivis répétés et des interventions parfois multiples, ce qui augmente le niveau d'anxiété général des patients.

Bien évidemment on ne peut sérieusement être partisan d'une ablation prophylactique de la prostate, des seins ou du colon pour prévenir tout cancer.

Ce raisonnement ad absurdum doit être en tête de ceux qui rédigent des recommandations de dépistage, pour équilibrer les avantages et les inconvénients.

Un compromis à trouver

A l'heure actuelle il est impossible de savoir, pour un patient donné qui suit un dépistage, s'il évitera un cancer ou subira des traitements lourds, préjudiciables pour lui et non nécessaires. Le surdiagnostic est identifié par l'étude en population, mais pour le patient ou le médecin il n'y a que diagnostic, ou pas diagnostic.

Trouver l'équilibre entre bienfaits et méfaits est particulièrement difficile lorsqu’on essaie de comparer l'éviction d’un seul décès par cancer à un mal moins grave, mais plus fréquent, comme l'est le surdiagnostic.

Il faut, avant de trancher, faire intervenir d'autre paramètres dans la réflexion, considérer que chaque individu peut avoir un jugement de valeurs différent à propos des avantages du dépistage et des préjudices possibles. (NDLR : une patiente m'a expliqué qu'il lui était préférable de considérer que la 'vie sauvée', ce pourrait être elle, et qu'elle était d'accord pour prendre en compte les éventuelles avanies d'un surtaitement. Et même si cette 'vie sauvée' était celle d'une autre, elle se sentait suffisamment solidaire pour accepter toutes les conséquences possibles d'un dépistage de routine. Ma foi, qui sommes-nous, médecins, pour contredire....?)

A l'avenir

Nous devons faire preuve de prudence lorsque nous assujettissons un grand nombre d’hommes et de femmes à la possibilité d’un fardeau psychologique et d’une diminution de la qualité de vie à cause d'examens de dépistage imposés.

Compte tenu de l'apparition croissante au fil du temps et au fil des études de risques inhérents du dépistage, que nous connaissons à présent, il est probable que les orientations futures continueront de se diriger vers un dépistage général moins fréquent, ou vers une mobilisation des ressources vers des populations à risque élevé, où l’ampleur absolue du bénéfice est plus apparente par rapport au risque particulier de ces populations de décéder de la maladie.

Dans la population générale, le dépistage du cancer est susceptible de devenir une décision individuelle, fondée sur des valeurs personnelles et des décisions éclairées, si tant est que les patients bénéficient d'une information équilibrée contenant toutes les données de façon objective.

  • V.Prasad : Division of Hematology Oncology, Knight Cancer Institute; Department of Public Health and Preventive Medicine; Senior Scholar in the Center for Ethics in Health Care, Oregon Health and Science University, Portland

Résumé C.Bour, 15 mars 2019

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Cancer du sein, mode et thune

7 mars 2019

Par Dr Annette Lexa

Lorsque la mode et la banque informent les femmes du risque de cancer du sein au nom des Droits des Femmes, ça donne ça : 

A l’occasion de la Journée Internationale pour les Droits des Femmes, la Caisse d’Epargne, Ines de la Fressange Paris et l’association militante « Le Cancer du Sein, parlons en ! » s’associent pour proposer une collection de cartes bancaires au tarif de deux euros. Pour chaque carte souscrite, la Caisse d’Epargne abondera de deux euros, soit quatre euros par carte reversés à l’association « Le Cancer du Sein, Parlons-en ! ».

Donc, une banque, la Caisse d’épargne, et une association activiste profitent ensemble de la Journée Internationale des Droits de la Femme en France pour lancer une campagne publicitaire en reprenant le slogan biaisé juste destiné à faire peur  « 1 femme sur 8 aura un cancer »  et le hashtag malheureux #1FemmeSur8Mars.

Et le sinistre chiffre de 1 femme sur 8 continue toujours d’occuper les premières pages des moteurs de recherche.

Pourtant Cancer Rose s’est attaché le plus honnêtement possible à démontrer que ce chiffre accrocheur n’avait aucun fondement :

https://www.cancer-rose.fr/mensonges-et-tromperies/

« Dire qu’une femme sur huit sera confrontée au cancer du sein est une présentation trompeuse, ce risque étant un risque cumulé tous âges confondus, calculé sur une population fictive en fonction des risques observés en 2012. Or il convient de considérer ce risque selon la tranche d’âge. Avec un suivi de 20 années, pour une femme de 40 ans ce risque est de 4%, pour une femme de 60 ans il est de 6%. »

A savoir aussi que sur 100 décès de femmes, 4 sont attribuables au cancer du sein, 20 à d’autres cancers, 30 à des maladies cardio-vasculaires. (réf. : Hill C. Dépistage du cancer du sein. Presse med. 2014 mai;43(5):501–9.)

Voir aussi dossier Que Choisir d’octobre 2017 : Que Choisir

Selon Catherine Hill, épidémiologiste à l’Institut Gustave-Roussy, à Villejuif (94), il s’agit d’une surestimation basée sur un calcul portant sur une population fictive suivie de la naissance à cent ans et plus. « Ce qui est pertinent, c’est le calcul pour une femme d’un âge donné suivie sur une durée donnée. Ainsi, le risque de diagnostiquer un cancer du sein dans les dix années suivantes est de 1,9 % pour une femme de 40 ans, de 2,1 % pour une femme de 50 ans, de 3,2 % pour une femme de 60 ans. »

Donc en France en Mars 2019, les femmes sont instrumentalisées pour des intérêts privées, au moyen d’une information médicale  déformée émanant d’association activiste pro-dépistage aux conflits d’intérêts avérés *: c’est bien connu les femmes n’aiment pas les chiffres, elles n’iront pas vérifier si c’est vrai ou faux, l’objectif est de les maintenir en tension et en peur, en appuyant sur l’émotionnel, en les culpabilisant, en créant une fausse solidarité féminine autour de la peur du cancer du sein pour entretenir la machine à dons dont ne bénéficient que quelques-uns.

Pendant ce temps, en Angleterre, les femmes n’ont pas besoin de hashtag #PrendsMoiPourUneBécasse, de mauvaise campagne orchestrée par des banques car les Autorités leur fournissent une vraie information sur le meilleur moyen de réduire leur risque de cancer du sein, les facteurs de protection, le vrai bénéfice et le vrai risque lié au dépistage, la vérité sur tous les traitements existants, leur effets secondaires.  Et tout ceci de manière dépassionnée, ceci afin que le femmes puissent juger avec la raison en toute responsabilité.

https://www.cancerresearchuk.org/health-professional/cancer-statistics/statistics-by-cancer-type/breast-cancer/risk-factors

Nous demandons à la Caisse d’épargne d’avoir la décence de ne pas participer à la désinformation des femmes en n’utilisant pas des slogans accrocheurs pour se faire de la publicité à bon compte.

* LES ENSEIGNES, rôles et obligations

https://www.cancer-rose.fr/les-enseignes-roles-et-obligations/

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HAS et tests génomiques prédictifs de récidive de cancer du sein

6 mars

Article dans EGORA du 4 au 10 mars 2019, 207-208 ; synthèse Dr C.Bour

https://www.egora.fr/actus-medicales/gynecologie-obstetrique/46227-cancer-du-sein-avis-defavorable-au-remboursement-des?page=0%2C1

 

Afin de déterminer si on doit prévoir une chimio-thérapie adjuvante après un cancer du sein, c'est à dire une chimiothérapie prescrite à la suite de la chirurgie d'un cancer du sein et destinée à prévenir les récidives, on se base sur certains critères dits anatomo-cliniques qui sont :

  • l'âge
  • l'existence de ganglions atteints
  • la taille tumorale
  • les caractéristiques biologiques de la tumeur

 

Développement de la génomique

 

Les techniques de génomique pour estimer un risque de récidive à partir d'un panel de gènes présents dans la tumeur se sont développées ces derniers temps, et en France on dispose de 4 systèmes (Mammaprint, Oncotype DX, EndoPredict, Prosigna).

Il s'agit donc d'évaluer l'utilité de ces tests afin de déterminer leur prise en charge ou pas.

 

Conclusions de la HAS

 

La HAS a constaté que l'utilité des tests concernerait seulement 5 à 10% des femmes, celles à risque intermédiaire de récidives.

Pour l'agence, le test est inutile en cas de cancer à faible risque de récidive pour lequel la chimiothérapie adjuvante n'est pas nécessaire ; le test est inutile également pour le cancer à fort potentiel de récidive, pour lequel la chimiothérapie adjuvante sera de toute façon recommandée.

Les tests ne présentent pas de valeur ajoutée par rapport aux critères anatomo-cliniques déjà existants et de plus, selon le test appliqué, il existe des variations pour la décision de la mise en oeuvre d'une chimiothérapie adjuvante chez une femme sur 4.

Déjà en 2014, dans un article de la revue Annales de Pathologie oct 2014 volume 34 n°5, intitulé "uPA/PAI-1, Oncotype DX, Mammaprint, valeurs pronostique et prédictive pour une utilité clinique dans la prise en charge du cancer du sein", les auteurs (dont JP Bellocq*, président de la société française d'assurance qualité en anatomie pathologique) concluaient à l'impossibilité de dégager une valeur ajoutée d' Oncotype DX et de Mammaprint par rapports aux outils prédictifs actuels. Cet article pointait déjà le manquement dans les données de la littérature pour apprécier le poids d'une éventuelle valeur ajoutée, l'utilité clinique dépendant de cette donnée. De plus les études coûts/efficacité étaient jugées de qualité insuffisante et entachées de mauvaise procédure pour décider d' employer ces outils dans une démarche de décision thérapeutique.

*https://www.afaqap.fr/lassociation/organisation/conseil-dadministration

 

Recommandations

 

La HAS recommande donc d'effectuer tout d'abord d'autres recherches cliniques, notamment une étude clinique prospective et comparative (avec test et sans test), et avec recueil exhaustif des données.

Pour l'instant, pas de remboursement systématique des tests génomiques prédictifs de récidive de cancer du sein.

 

 

 

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Les recommandations européennes

par Dr C.Bour, 9 février 2019

Nouvelles recommandations sur le dépistage du cancer du sein, de la Commission Initiative on Breast Cancer (ECIBC)

recos ECIBC

La "European Commission Initiative on Breast Cancer" (ECIBC), autrement dit l’initiative de la commission européenne sur le cancer du sein, publie ses nouvelles recommandations (ici : https://ecibc.jrc.ec.europa.eu/recommendations/)

Au total, 80  recommandations seront accessibles au public et classées en trois groupes, selon leurs destinataires :

  1. professionnels de la santé,
  2. patients / individus,
  3. créateurs de politiques.

Ces recommandations abordent : la fréquence des dépistages, les moyens d'invitation et d'information, les stratégies de communication envers les populations plus vulnérables psychologiquement, les stratégies d'organisation du dépistage, les types de tests, les méthodes de diagnostic, l'utilisation des technologies plus avancées comme la tomosynthèse, la communication des résultats et la formation des professionnels.

Cette initiative part des recommandations émises lors de Journée mondiale du cancer 2018 (journée mondiale cancer 2018) soutenue par Unicancer [1].

Qui sont les personnes composant l'équipe émettant les recommandations ?

Quelques scientifiques en particulier, qui font partie du groupe de développement des recommandations, que nous appellerons le GDR, retiennent notre attention : Stephen Duffy, Lennarth Nyström et Mireille Broeders.

Stephen Duffy a participé au tristement célèbre essai pionnier suédois sur le dépistage du cancer du sein dans deux comtés suédois, co-auteur de Tabar, et sur lequel se base le programme national de dépistage du cancer du sein au Royaume-Uni notamment. Cet essai a été mis en cause avec véhémence, tant en raison de ses biais majeurs que des conflits d'intérêts de Tabar. Voir l'article de P.Autier :

Autier "un enjeu majeur" , chapitre "bilan des premiers essais, les études".

Ces auteurs ont contribué à plusieurs publications mettant en avant les "extraordinaires bénéfices" du dépistage. La bibliographie du site de la Commission Européenne sur le cancer du sein[2]  fait la part belle aux travaux de Tabar, Pulliti, Duffy, Nyström etc, sous le titre de "preuves des effets", mais mentionne également les études de Miller, Harding, Cochrane, Autier, plus récentes et mettant en doute les bénéfices avancés.

Le libellé "preuve des effets" est très affirmatif car tout bon épidémiologiste et statisticien sait qu'en matière d'études scientifiques populationnelles il n'y a jamais de "preuves". Il y a des présomptions, les études qui suggèrent que, ou une conjonction d'études qui oriente vers telle ou telle conclusion...

Remettons les choses en lumière concernant ces premiers essais promoteurs du dépistage systématique.

En 2005 déjà, le statisticien norgévien Per-Henrik Zahl membre de la collaboration Cochrane, signale des différences entre ce qu’il constate dans le registre suédois et ce qui a été publié par Tabar en 1985 dans l’essai des Deux Comtés. « Par rapport aux statistiques officielles suédoises, nous avons constaté que 192 cas de cancer du sein et 43 décès par cancer du sein semblent ne pas figurer dans la publication principale de l’essai de Deux-Comtés ». Le Lancet avait à l'époque refusé de publier l'article de Zahl que celui-ci a dû proposer à d'autres revues scientifiques...[3] [4]

Outre les différences notées entre le registre suédois et la publication de Tabar, l’article de Zahl remarque également des discordances dans les résultats de l’essai suédois des Deux-Comtés. « Le nombre de femmes incluses dans l’étude donne un total de 133 065 femmes résidant dans les deux comtés lors de l’allocation aléatoire dans l’article de 2011, alors que celui de 1985 comptabilisait 134 867 femmes incluses dans l’étude, soit 1802 de plus. »

« En 1992, Tabar et ses collègues ont signalé 465 décès par cancer du sein dans le groupe d’âge des 40 à 74 ans, soit 16 de moins que le nombre indiqué dans l’aperçu des essais suédois »

PH Zahl, et all font remarquer en plus que les données sur les décès varient selon qu’elles proviennent des publications de Tabár ou Nyström co-auteur de l’étude : Tabár annonce moins de décès par cancer du sein dans le groupe dépisté que Nyström, et plus de décès par cancer du sein dans le groupe témoin que Nyström

Les recommandations pour les patientes selon les tranches d'âges :

Quatre tranches d'âge sont examinées : 40-44 ans, 45-49 ans, 50-69 ans, 70-74 ans.

Pour la première tranche d'âge, entre 40 et 44 ans, le groupe de scientifique du GDR recommande de ne pas recourir au dépistage pour les femmes asymptomatiques. Nous saluons ceci car dans beaucoup de départements en France les gynécologues le prescrivent assez systématiquement dès 40 ans. https://ecibc.jrc.ec.europa.eu/recommendations/details/Professional/screeningage/40-44

Concernant la tranche suivante, pas de dépistage annuel selon le groupe, mais le GDR suggère un dépistage mammographique triennal ou biennal dans le cadre d'un programme de dépistage organisé, en précisant l'existence d'un faible niveau de preuves.

La tranche des 50 à 69 ans se voit attribuer une recommandation forte de dépistage biennal.

Enfin, petit changement pour le groupe de femmes le plus âgé, un dépistage triennal est suggéré.

Nous nous posons la question de la légitimité de cette structure plutôt promotrice du dépistage sous le logo (rassurant ?) de l'UE.

La gouvernance est détaillée, avec les rapports de conflits d'intérêts des membres, mais dont les montants perçus ne sont pas tous mentionnés.

Néanmoins force est de constater qu'au-delà de la recommandation du maintien du dépistage systématique pour les femmes de 50 à 74 ans, le GDR fait preuve de prudence, mentionne le surdiagnostic en donnant, selon les tranches, une évaluation moyenne entre 12 et 22%, parle du risque des fausses alertes et de l'exposition au risque de mastectomies supplémentaires ainsi qu'à l'anxiété inutile.

Pour chaque tranche d'âge les recommandations sont argumentées, et vous trouverez pour chaque catégorie d'utilisateur 5 rubriques : la puissance de la recommandation, sa justification détaillée avec la mortalité réduite ou pas et les risques de surdiagnostic, fausses alertes et mastectomies, les considérations générales sur ce qu'il faudrait faire à l'avenir, une rubrique évaluation avec un questionnaire, et pour finir une bibliographie assez détaillée.

Pour les professionnels (https://ecibc.jrc.ec.europa.eu/recommendations/list/Professional) une incitation à la promotion du dépistage est donnée dans un chapitre (descendre avec le curseur) : ' Quel type de communication faut-il utiliser chez les femmes vulnérables pour accroître leur participation aux programmes de dépistage? '

"Pour que les programmes de dépistage du cancer du sein entraînent une réduction de la mortalité par cancer du sein, une proportion importante de la population doit y participer. Les programmes à faible taux d'utilisation peuvent être inefficaces et favoriser les inégalités dans les services de santé."

Or, on sait depuis l'étude d'Autier sur les Pays Bas que même les pays à forte participation ne connaissent pas de réduction significative de la mortalité imputable au dépistage et un taux stable des cancers avancés.[5] [6]

Autre ajout  (descendre un peu plus bas avec le curseur), le chapitre :

" Un outil d'aide à la décision expliquant les avantages et les inconvénients du dépistage par rapport à une lettre d'invitation "régulière" devrait-il être utilisé pour informer les femmes des avantages et des inconvénients du dépistage du cancer du sein?"

Au-delà de la promotion du dépistage, à la lecture des nouveaux chapitres édités et de la formulation nuancée des recommandations on peut constater davantage de prudence avec plus d'honnêteté sur les risques, même si l'estimation retenue du surdiagnostic est comprise dans un intervalle bas (entre 10 et 17% pour les 50-69 ans), et au regard des efforts d'argumentation et de justification des directives énoncées.

La synthèse du NIH

 

La synthèse du National Institute of Health américain[7] nous semble résumer plus clairement et synthétiquement les tenants et aboutissants pour les professionnels de santé, à la fois sur le dépistage mammographique, mais aussi concernant l'examen clinique des seins ou l'auto-examen, et il nuance le bénéfice escompté des premiers essais.

" Des études de population réalisées plus récemment soulèvent des questions sur les avantages pour les populations dépistées qui participent au dépistage sur des périodes plus longues."

"La validité des méta-analyses d'ECR démontrant un bénéfice en termes de mortalité est limitée par les améliorations apportées à l'imagerie et au traitement médicaux au cours des décennies qui ont suivi leur achèvement. Les 25 années de suivi de l’Essai national canadienne sur le dépistage du cancer du sein (CNBSS) [ 4 ], achevée en 2014, n'ont montré aucun bénéfice en termes de survie associé aux mammographies de dépistage."

"Sur la base de preuves solides, la mammographie de dépistage peut avoir les effets nocifs suivants..."

Le surdiagnostic potentiel ici est annoncé entre 20 et 50%, le taux de rappel à 10%, le risque de cancer radio-induit est cité ("en théorie, les mammographies annuelles chez les femmes âgées de 40 à 80 ans peuvent provoquer jusqu'à un cancer du sein sur 1 000 femmes"), et, chose rare, l'effet faussement rassurant est également évoqué en cas de faux négatif.

Conclusion

On peut saluer un effort dans les nouvelles recommandations européennes avec plus d'argumentation et de nuances dans la relation de la balance bénéfice /risques, mais regretter que la grande majorité des membres de cette commission européenne soit composée des emblématiques promoteurs, très contestés, du dépistage organisé du cancer du sein, que la bibliographie énumérée fasse la part belle aux études favorables aux premiers essais cliniques, et enfin que le risque du surdiagnostic soit minimisé.

BIBLIO

[1] Unicancer, qu'est-ce que c'est ?

Unicancer est un réseau hospitalier composé de différents établissements, dédié à 100 % à la lutte contre le cancer, le groupe soutient Octobre rose.

http://www.unicancer.fr/actualites/groupe/octobre-rose-2018-reseau-unicancer-se-mobilise

Unicancer a touché plus de 15 millions d’euros des industriels, du moins de ceux dont on peut connaître le montant, selon la base de données Eurofordocs. C’est aussi Unicancer qui organise le très curieux essai MyPeBS http://mypebs.cancer-rose.fr/  sur le dépistage « personnalisé » du cancer du sein.

[2] Pour trouver la bibliographie, aller à https://ecibc.jrc.ec.europa.eu/recommendations/details/Patient/screeningage/40-44, voir "à quel âge...", puis cliquer sur le 5ème onglet, le plus à droite.

[3] Zahl Ph, Gøtzsche PC, Andersen JM, Maehlen J, Withdrawn Results of the Two-County trial of mammography screening are not compatible with contemporaneous official breast cancer statistics in Sweden. Eur J Cancer, 2006; mars.

[4] Zahl PH, Gotzsche PC, Andersen JM, Maehlen J. Results of the Two-County trial of
mammography screening are not compatible with contemporaneous official Swedish breast cancer statistics. Dan Med Bull. 2006 Nov ;53(4) :438-40.

[5] https://app.core-apps.com/sabcs2016/abstract/d65d1d601c44a12e649faed52440f92e

[6] https://www.cancer-rose.fr/efficacite-et-surdiagnostic-du-depistage-mamographique-aux-pays-bas-etude-populationnelle/

[7] https://www.cancer.gov/types/breast/hp/breast-screening-pdq#link/_13_toc

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