Matthieu Yver/Cécile Bour, novembre 2016
ETUDE DE L’UNIVERSITE DE TORONTO La mortalité du cancer du sein après un
diagnostic de carcinome canalaire in situ
Traiter les cancers canalaires in situ ne réduit pas la mortalité par
cancer du sein
http://oncology.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=2427491
Auteurs : Steven A. Narod, MD, FRCPC1,2; Javaid Iqbal, MD1; Vasily Giannakeas, MPH1,2; Victoria Sopik, MSc1; Ping Sun, PhD1
JAMA Oncol. Published online August 20, 2015. doi:10.1001/jamaoncol.2015.2510
Traiter les cancers canalaires in situ ne réduit pas la mortalité par cancer du sein, tel est le résultat d’une récente étude observationnelle menée par des scientifiques du Women’s College Hospital de Toronto et de l’Université de Toronto, publiée dans le journal «JAMA Oncology» ce mois d’août.
Leurs conclusions sont fondées sur la plus grande collecte de données jamais analysées, basées sur 18 registres américains incluant 100.000 femmes suivies pendant 20 ans chez lesquelles avait été posé le diagnostic de carcinome canalaire in situ (CCIS).
Rappelons qu’il ne s’agit pas d’un cancer contrairement a ce que sa dénomination pourrait sembler indiquer. C’est une lésion précancéreuse/ adenomateuse qui reste à l’intérieur du canal mammaire sans envahir les tissus qui l’englobent. C’est une lésion de bon pronostic, elle correspond au grade 0 du cancer du sein . On diagnostique beaucoup plus fréquemment ce type de lésion précancereuse depuis l’utilisation plus répandue de la mammographie. Certaines de ces lésions seraient des précurseurs du cancer du sein. Il existe un risque pour les patientes des rechutes locales soit en CCIS, soit en carcinome canalaire infiltrant qui lui, est potentiellement metastasiant et donc mortel. Toutefois, on ne sait pas encore comment déterminer quel CCIS évoluera en cancer infiltrant et lequel ne le fera pas. La patiente subit en général une mastectomie partielle ou totale selon l’étendue, et de toute façon totale lors de la récidive, suivie d’une radiothérapie. Jusqu’ici on considérait que ce traitement avait une vertu préventive sur le développement d’un cancer invasif et était donc bénéfique concernant la survie de la patiente.
Il semblerait à présent que le traitement ne fait pas de différence sur la survie et que les femmes atteintes de cette pathologie et même lourdement traitées (parfois par mastectomie bilatérale) ont la même probabilité de décéder d’un cancer du sein par rapport aux femmes dans la population générale.
La prévention des récidives par radiothérapie ou mastectomie ne réduirait pas non plus le risque de mortalité par cancer du sein.
Le traitement des lésions précancéreuses (CCIS) semble donc excessif en pathologie mammaire. D’ailleurs en pathologie colique, les lésions précancéreuses ne sont jamais traitées par radiothérapie.
Selon Philippe Autier, de l’International Prevention Research Institute (IPRI) la situation est impossible à résoudre d’un point de vue légal et pratique, d’autant qu’on ne sait jamais à 100% affirmer le diagnostic de CCIS avant d’avoir examiné la pièce opératoire sous le microscope. Le problème d’après lui est inhérent à la mammographie, en particulier numérique qui est trop performante concernant la détection des petites calcifications qui sont le signe radiologique le plus fréquent de ces formes de lésions précancereuses.
Il estime que le problème du surdiagnostic, c’est à dire de la détection de cancers in situ ou invasifs qui ne se seraient pas manifestés et n’auraient pas mis en danger la vie de la patiente, ne sera pas éliminé tant que le dépistage restera basé sur cette méthode.
On peut pousser ce raisonnement plus loin : il semble bien inutile que la technologie tende à inventer des méthodes de détection de plus en plus sensibles qui ne serviront qu’à détecter des lésions précancéreuses dont beaucoup n’évolueront jamais en cancer…
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