Résumé Dr Bour C., le 14 février 2022
Cancer du sein : un algorithme prédit la fatigue sévère dès le diagnostic
De très nombreuses femmes (plus du tiers) ayant eu un cancer du sein allèguent une fatigue importante et durable persistant même plusieurs années après le diagnostic.
En se basant sur une cohorte de femmes dite cohorte Canto (cohorte de femmes sur lesquelles un programme d’étude des effets secondaires des traitements est effectué) un algorithme prédictif a été développé pour calculer le risque de cette hyper-fatigue et ce dès le diagnostic, afin de mettre en place une prévention personnalisée de ce phénomène.
L’étude vient d’être publiée dans la revue Journal of Clinical Oncology.
https://ascopubs.org/doi/full/10.1200/JCO.21.01252
MÉTHODES
Les participantes atteintes d’un cancer du sein de stade I à III ont été incluses de manière prospective à partir de la cohorte CANTO avec des données au moment du diagnostic (avant le début de tout traitement anticancéreux) et 1, 2 et 4 années après le diagnostic.
Le critère de jugement principal était la fatigue globale sévère rapportée sur un questionnaire de qualité de vie.
Les critères de jugement secondaires comprenaient la fatigue physique, émotionnelle et cognitive.
RÉSULTATS
Parmi presque 15000 patientes incluses à différents temps (1 an, 2 ans, 4 ans), on retrouvait environ le tiers des femmes qui étaient concernées par une fatigue globale sévère post-traitement.
Six facteurs de risque majeurs ont été identifiés.
Les chercheurs ont mis en lumière six principaux facteurs de risque cliniques et comportementaux déterminants d’une fatigue sévère : le jeune âge (en lien avec le statut de la pré-ménopause), un indice de masse corporel (IMC) élevé, le tabagisme, l’anxiété, l’insomnie et la douleur ressentie avant le début des traitements, ainsi que la fatigue préexistante au moment du diagnostic de cancer du sein
- La fatigue avant le traitement représentait le facteur prédictif le plus fort et le plus cohérent. La fatigue avant le traitement peut ouvrir la voie à une fatigue élevée même des années après la fin du traitement, en raison d’une perturbation des mécanismes biologiques, psychologiques ou comportementaux qui existent avant le début du traitement.
- Cependant, on relève une relation plus étroite entre la fatigue physique et l’augmentation de l’IMC, et entre la fatigue émotionnelle/cognitive et la détresse et vulnérabilité psychologiques.
- À plus court terme on constate que l’impact lié à la chimiothérapie semble transitoire et surtout marquant au lendemain du traitement.
- En revanche, une association délétère plus marquée entre l’hormonothérapie et la fatigue a été confirmée après une exposition plus longue (après 4 années). Ces résultats appuient l’idée que l’impact de l’hormonothérapie sur la qualité de vie ne semble pas se réduire avec le temps. L’hormonothérapie semble impacter la récupération des fonctions rapportées par les patients qui s’améliorent généralement avec le temps, y compris la fonction émotionnelle et les perspectives futures.
Les données de la présente étude soulignent que certaines patientes recevant une hormonothérapie, en particulier les jeunes femmes préménopausées, peuvent nécessiter une attention particulière. Ceci est d’autant plus important à considérer dans la prise en charge que des stratégies d’intensification de l’hormonothérapie ont été récemment mises en œuvre en prolongeant sa durée au-delà de 5 ans. - Des preuves substantielles montrent que la fatigue liée au cancer est sous-traitée.
- Certaines des patientes souffriraient déjà de fatigue avant le traitement et nécessiteraient l’utilisation initiale de prises en charge pour traiter ce symptôme.
CONCLUSION
- La fatigue est un effet secondaire très fréquent chez les patientes atteintes d’un cancer du sein, mais il existe peu d’outils pour prédire son risque.
- Environ une patiente sur trois endurerait une fatigue persistante et sévère au fil du temps.
- Les auteurs proposent un modèle prédictif pour évaluer la fatigue chez les survivantes du cancer du sein, dans un cadre personnalisé de soins aux survivantes, au moyen d’un outil en ligne pour le calcul du risque de fatigue.
- Cela peut aider les cliniciens à fournir des interventions de prise en charge précoces ou à corriger les facteurs de risque modifiables ; ils peuvent ainsi offrir un suivi et une éducation plus adaptés aux patientes à risque de fatigue post-traitement sévère.
- Ceci permettrait aussi à mettre en place un cadre de soins cliniques où les patientes entrantes seraient systématiquement dépistées pour la fatigue et les facteurs de risque au moment du diagnostic du cancer du sein, avant le début de tout traitement contre le cancer.
Les stratégies de prise en charge pourront ainsi être adaptées au cas par cas. Selon leur score et leur profil, les patientes se verront proposer un soutien psychologique, des séances d’activité physique adaptée et un accompagnement pour correction des facteurs de risque comme par exemple la proposition d’un sevrage tabagique ou encore des conseils nutritionnels.
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