Espacer les contrôles après cancer du sein

Par Cancer Rose

Habituellement, une femme ayant été soignée pour cancer du sein rentre dans un protocole de suivi et de surveillance avec mammographie annuelle.
Un essai britannique, appelé Mammo50 et dont les résultats ont été publiés dans le Lancet, suggère qu’après trois années sans récidive, une femme pourrait voir espacer ses suivis à tous les deux ans ou même tous les trois ans seulement, avec des résultats de survie au cancer non-inférieurs par rapport au protocole actuel.

(Note : il s’agit d’un essai dit de non-infériorité. Les essais de non infériorité sont des études utilisées dans le cas où une intervention donnée est reconnue efficace ou utile (ici le suivi annuel), mais est associée à des toxicités importantes (ici anxiété, fausses alertes, surdiagnostics), et qu’on veut démontrer qu’une nouvelle intervention alternative (ici l’espacement des contrôles) est au moins aussi efficace sur un critère choisi (ici la survie à long terme spécifique au cancer), mais généralement associé à une diminution des toxicités.)

Un rythme de suivi après cancer du sein un peu arbitraire

Les auteurs eux-mêmes relèvent « une littérature incertaine » sur le rythme adopté selon les pays.

En Europe comme aux Etats Unis, le protocole prévoit une mammographie annuelle pendant un temps indéterminé. Certaines femmes finissent par étirer d’elles-mêmes les délai et espacent leurs rendez-vous au fil des ans, certains médecins adaptent eux-aussi le rythme de surveillance en fonction du dossier de la patiente.
Le Royaume Uni préconise déjà cette surveillance tous les trois ans seulement, à condition de n’avoir pas eu de récidive durant 5 suivis annuels.

Une étude précédente sur 53 essais cliniques randomisés incluant plus de 86 000 patients entre 1990 et 2011, a mis en évidence que la proportion de toutes les récidives locorégionales était passée de 30 % à 15 %. Cette constatation suggère que les pratiques chirurgicales modernes et le traitement systémique ont été efficaces pour prévenir la récidive locale.

De plus il est à noter qu’en grande majorité les diagnostics de récidives locales chez les femmes opérées pour cancer du sein sont faits par un symptôme clinique relevé par la femme elle-même, et non pas à la suite d’une mammographie de surveillance.

Des effets néfastes de contrôles trop fréquents

Les auteurs mettent en avant une volonté de réduire les effets néfastes des mammographies trop fréquentes, entre autres l’anxiété générée par les contrôles répétés, les faux positifs et le surdiagnostic.
L’anxiété liée à la réalisation d’une mammographie est plus élevée chez les personnes ayant survécu à un cancer du sein que chez celles qui n’ont pas d’antécédent de cancer du sein, expliquent les auteurs. A l’inverse, un délai rallongé pourrait être, pour certaines patientes, davantage anxiogène.

D’autres inconvénients sont associés à la mammographie, tels que les faux positifs et le surdiagnostic, qui se produisent chez les femmes dépistées régulièrement et tout autant chez les femmes avec antécédent de cancer et soumises à de trop fréquents recontrôles mammographiques. Le nombre de faux positifs augmente avec la fréquence des mammographies. Le surdiagnostic est d’autant plus fréquent que les les patientes sont plus âgées et chez celles dont c’est le premier cancer.
Ces données suggèrent que le nombre de mammographies dans le cadre du suivi des femmes avec antécédent de cancer du sein devrait être limité.

Sans compter les enjeux économiques sur les systèmes de santé nationaux, et un volume de femmes suivies important, ayant des répercussions sur l’accès aux soins et exerçant une pression sur les prises de rendez-vous dans les cabinets de radiologie pour tous les autres patients.

En conclusion

Il semble tout à fait envisageable d’espacer progressivement les contrôles mammographiques annuels habituels pour les femmes après cancer du sein, à un rythme de tous les deux ou trois ans après trois années sans récidive, selon l’étude.


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