27/11/2024
Une publication dans « The Lancet » en janvier 2024 propose l’option d’omettre la radiothérapie postopératoire chez des femmes avec un cancer du sein petit et peu agressif, unique, sans augmenter les risques de récidive pour ce type de cancers-là.
Il s’agit de réaliser chez la patiente concernée une IRM pré-opératoire, afin de débusquer d’éventuelles autres lésions mammaires non vues à la mammographie, pour éliminer un cancer multi-focal.
En l’absence de lésions multiples, en étant sûr ainsi que la tumeur est parfaitement localisée et de bas stade de malignité, de petite taille, on éviterait la radiothérapie systématique telle qu’elle est pratiquée actuellement en post-opératoire chez toutes les femmes diagnostiquées avec cancer du sein, quel qu’il soit.
La radiothérapie en effet, comporte des risques et des effets adverses même en en limitant les doses, car certaines personnes possèdent une « radio-susceptibilité », inconnue, et qui les expose à des effets plus graves que dans la moyenne de la population.
Lire ici : https://cancer-rose.fr/2019/09/02/quest-ce-quune-radiotherapie/
Méthodes
L’étude s’appelle PROSPECT, c’est un essai prospectif, multicentrique, à deux bras, non randomisé, portant sur l’omission de la radiothérapie chez des patientes sélectionnées sur la base d’une IRM préopératoire et selonl’analyse de la tumeur opérée. Cet essai a été mené dans quatre hôpitaux universitaires en Australie. Les femmes âgées de 50 ans ou plus atteintes d’un cancer du sein unifocal, inférieur à 2cm, et sans envahissement ganglionnaire étaient éligibles à l’omission de la radiothérapie post-opératoire, et cette option a été proposée à 201 femmes australiennes.
Résultat
Le résultat principal examiné était le taux de récidive invasive homolatérale à 5 ans dans le groupe sans radiothérapie complémentaire post-opératoire.
Au bout de cinq ans, le taux de récidive était seulement de 1%, c’est-à-dire inférieur à celui du groupe avec radiothérapie, (1,7%) ; mais ce groupe était, par définition, plus à risque…
L’étude PROSPECT permettrait d’augmenter, selon les auteurs, l’indice de qualité de vie et d’économiser 1 980 dollars australiens par patient.
Conclusion
Les auteurs avancent qu’une désescalade est possible, PROSPECT suggère que les femmes atteintes d’un cancer du sein unifocal à l’IRM et à caractéristiques favorables, de bas stade de malignité, peuvent en toute sécurité omettre la radiothérapie.
En pratique
https://forum.facmedicine.com/threads/radiotherapie-apres-tumorectomie-quand-leviter.99107
Dans quelles situations concrètes pourrait-on s’abstenir de la radiothérapie ? (Citations de l’article)
1- Selon le type de cancer et ses caractéristiques histologiques : Les cancers du sein hormonodépendants (mais également les cancers lobulaires ou in situ) présentent généralement un meilleur pronostic. Les études montrent que les femmes atteintes de cancers moins agressifs, tels que ceux avec un score de grade bas ou un statut récepteur hormonal positif, pourraient être candidates pour éviter la radiothérapie.
2-Taille de la tumeur : Les études indiquent que les tumeurs de petite taille (généralement moins de 2 cm) peuvent avoir un risque de récidive locale plus faible. Les femmes dont la tumeur mesure moins de 1 cm ont une chance considérable d’éviter la radiothérapie, surtout si le cancer est bien différencié.
3-Marges chirurgicales : Les marges de résection, c’est-à-dire la quantité de tissu sain enlevée autour de la tumeur, sont essentielles. Si les marges sont saines (c’est-à-dire qu’aucune cellule cancéreuse n’est présente aux bords du tissu enlevé), le risque de récidive locale diminue. Des marges d’au moins 2 mm sont souvent considérées comme suffisantes pour éviter la radiothérapie dans certains cas.
4-Âge et état de santé général : Les femmes plus jeunes peuvent avoir un risque de récidive plus élevé et peuvent donc être plus susceptibles de bénéficier de la radiothérapie. En revanche, pour les femmes plus âgées, notamment celles de plus de 70 ans avec des tumeurs de petite taille et des marges saines, les études suggèrent que la radiothérapie peut ne pas être nécessaire.
5-Résultats de l’analyse génomique : Avec l’avènement des tests génomiques, il est désormais possible d’évaluer le risque de récidive d’un cancer du sein. Des tests comme Oncotype DX ou Mammaprint peuvent aider à prédire si une patiente bénéficiera réellement d’une chimiothérapie ou d’une radiothérapie après une tumorectomie. Des résultats indiquant un faible risque de récidive peuvent justifier l’évitement de la radiothérapie.
6-Facteurs psychosociaux : Les préférences de la patiente et son état psychologique doivent également être pris en compte. Certaines femmes peuvent choisir de ne pas subir de radiothérapie en raison de la qualité de vie, de la peur des effets secondaires ou d’autres préoccupations personnelles. Une communication ouverte entre le médecin et la patiente est cruciale pour évaluer les bénéfices et les risques.
D’autres essais
l’étude ACOSOG Z0011, publiée en 2011, a montré que certaines femmes atteintes de cancer du sein à un stade précoce et ayant subi une tumorectomie avec des ganglions lymphatiques axillaires négatifs pourraient ne pas nécessiter de radiothérapie après la chirurgie, sans augmentation significative du risque de récidive. (Aucune différence de survie n’était observée chez les patientes traitées par irradiation conventionnelle en champ tangent ou en champ nodal.)
Une autre étude, l’essai ESTRO 1000, a également soutenu l’idée que pour les femmes âgées de 70 ans et plus avec des tumeurs de moins de 2 cm et des marges saines, la radiothérapie n’améliorait pas les résultats à long terme.
Commentaires
Evidemment que le surtraitement des femmes avec cancer du sein très peu ou même pas évolutif est préoccupant, les effets secondaires de certains traitements contre-balancent négativement l’effet bénéfique escompté du traitement.
Ces effets adverses des traitements, entre autres de la radiothérapie, sont décrits ici : https://cancer-rose.fr/2021/12/05/notice-detaillee-pour-les-femmes/
Deux études ont mis en évidence une augmentation des maladies cardio-vasculaires chez les femmes traitées pour cancer du sein, et une augmentation significative des pathologies malignes sanguines.
Mais on revient toujours au constat qu’on observe le problème du surtraitement par le mauvais bout de la lorgnette.
Il faudrait avant tout l’éviter, et en amont déjà. Cela passe par le fait de limiter la surdétection de petites lésions très peu évolutives dont on sait qu’elles ne menaceraient pas la vie de la patiente si elles étaient restées méconnues (surdiagnostics).
Les préoccupations sur le surdiagnostic sont d’autant plus justifiées que des femmes, certaines avec une radiosensibilité élevée et qui l’ignorent, peuvent recevoir une radiothérapie dont elles n’auraient pas eu besoin, et sont précipitées par le dépistage dans une maladie grave qu’elles n’auraient pas eue en son absence, avec les éventuels risques inhérents aux traitements, entre autres les hémopathies secondaires.
On en revient toujours à l’obligation d’information des femmes, souvent bafouée, qu’on se doit pourtant de leur délivrer, AVANT de les soumettre à une procédure de dépistage.
Combien de messages de regrets recevons-nous sur le contact du site Cancer Rose, de femmes non informées, avec des découvertes de très petites lésions de très bas grade lors d’un dépistage parfois imposé, aux dires du médecin lui-même qui les suit, d’un dépistage prescrit contre leur gré, sans information. Ces femme se voient alors obligées, parce que c’est « le protocole », de suivre des traitements très lourds, même si on leur promet lors des campagnes d’octobre notamment, des « traitements plus légers grâce au dépistage ». Ceci est un mensonge, et la « légèreté » des traitements est très relative, parlez-en à celles qui les ont subis… Ou à celles qui se retrouvent avec un cancer cutané secondaire, ou un chondrosarcome de la côte sous-jacente au site d’irradiation (pire cas vu dans mon parcours de radiologue), mais auxquelles on explique cyniquement que la relation de cause à effet avec la radiothérapie n’est pas du tout sûre….
Respectons les femmes, soyons honnêtes sur les risques du dépistage et aidons-les à faire un choix éclairé et raisonné ; c’est le but de nos efforts, avec un site dédié aux outils d’aide à la décision, que vous trouverez ici : https://parlonsmammo.fr/

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