Instantané d’oncologie, interview de Karsten Juhl Jorgensen

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L'auteur

Avons-nous un problème de surdiagnostic dans les programmes de dépistage par mammographie pour la détection précoce du cancer du sein chez les femmes asymptomatiques ?
La question est plus urgente que jamais depuis que le U.S. Preventive Services Task Force a modifié sa recommandation concernant l'âge de début du dépistage par mammographie, qui est passé de 50 à 40 ans.

Karsten Juhl Jørgensen (Département de recherche clinique - Københavns Universitet, Cochrane Danemark) a été interviewé lors de la réunion Medicine & the Media à Florence.

TRANSCRIPTION

Le surdiagnostic

"Avons-nous un problème de surdiagnostic dans les programmes de dépistage par mammographie pour la détection précoce du cancer du sein chez les femmes asymptomatiques ?
(NDLR, lire ici : surdiagnostic)

Oui, le surdiagnostic est vraiment un problème inévitable dans pratiquement tous les types de dépistage. Et il est lié au fait que les gens meurent de toutes sortes de causes autres que la maladie pour laquelle on fait le dépistage.
Et donc si vous détectez cette maladie à un stade précoce, il y a un risque que les gens meurent d’une autre cause avant que la maladie que vous cherchez à dépister ne progresse vers quelque chose de grave.

Une autre raison est que lorsqu’on procède au dépistage d'une maladie, on détecte souvent un autre type de maladie. Ceci est différent du cas où on détecte des symptômes chez des patients et ensuite on pose le diagnostic.

Ainsi nous savons que de nombreuses maladies, dont le cancer du sein, ne constituent pas une entité unique. Nous avons affaire à des maladies qui s'étendent sur un spectre de différents degrés de gravité.
(NDLR, lire ici : l'histoire naturelle du cancer)
Et si nous procédons à un dépistage, du fait que les cancers les moins agressifs sont ceux qui mettent le plus de temps à se développer, ce sont principalement ceux-là que nous allons trouver par le dépistage.
Cela s'explique simplement par le fait qu'on a plus de temps pour les détecter.

Alors que toutes les tumeurs agressives, celles qui tuent le plus souvent, se développent rapidement. Ces cancers passent donc à travers les mailles de notre filet et ne sont pas détectés par le dépistage, mais apparaissent entre les cycles de dépistage.

Voilà donc quelques-unes des limites bien connues du dépistage du cancer. C'est ce qu'on appelle le biais de longueur de temps. Plus vous avez de temps pour détecter le cancer, plus vous en détecterez.
Et cela contribue au surdiagnostic, car les cancers les plus lents et les moins agressifs sont principalement ceux qui sont surdiagnostiqués, mais ce sont toujours des cancers."

Effets néfastes du dépistage et implications

"Ils (les cancers lents) sont donc toujours traités et les gens deviennent des patients cancéreux avec toutes les implications que cela a sur leur bien-être.

Nous savons donc que le dépistage du cancer du sein et de nombreux autres types de dépistage présentent des inconvénients, tout comme n'importe quelle autre intervention médicale. C'est vraiment la seule chose dont nous pouvons être sûrs pour toute intervention. Tout traitement a toujours des effets néfastes.

La question est donc de savoir si ces effets néfastes sont contrebalancés par les bénéfices. Et c'est justement la question à se poser quand les patients s'adressent à nous les médecins, en quête de traitement, d'aide au problème qu'ils ressentent.

Ils cherchent de l'aide pour le problème qu'ils  pensent avoir. Nous avons donc la responsabilité de faire de notre mieux, même si nous n'avons pas une compréhension complète, une connaissance complète des effets des interventions que nous pourrions utiliser."

Une obligation morale

"Mais si en tant que société, nous choisissons d'offrir un programme de dépistage à une population en bonne santé, nous avons une obligation complètement différente qui repose sur nous de savoir avec certitude ce que nous faisons.

Nous nous sommes donc inquiétés des nouvelles recommandations visant à étendre le dépistage du cancer du sein à des groupes d'âge où les preuves sont vraiment incertaines.
Il y a des incertitudes sur le dépistage du cancer du sein pour tous les groupes d'âge, mais elles sont particulièrement importantes pour les femmes dans leur quarantaine et pour les femmes de plus de 70 ans.
C'est pour cela que nous n'avons pas procédé au dépistage pour ces groupes d'âge depuis des décennies dans de nombreux pays."

Dépistage des quadragénaires

"Mais récemment, le US Preventive Services Task Force a publié de nouvelles recommandations préconisant le dépistage du cancer du sein chez les femmes dans leur quarantaine, ce qui nous inquiète car les fondements de cette recommandation sont différents de ce que nous avons l'habitude de voir de la part de l'US Preventive Services Task Force (USPSTF)."
(NDLR, lire ici : abaisser l'âge du dépistage ?)

ll (l'USPSTF) était habituellement le porte-drapeau des méthodes de médecine fondée sur les preuves et une organisation de confiance, mais dans ce cas particulier, au lieu de faire confiance plutôt aux preuves que nous avons à partir des essais randomisés et que nous connaissons depuis des années,  il a choisi de faire des calculs à partir des modèles et de baser les recommandations sur la base de ces modèles.

Et cela s'écarte vraiment de certains des principes fondamentaux de la médecine basée sur les preuves. Nous trouvons cela inquiétant car si vous fondez vos recommandations sur des modèles, il est plus probable que vous fassiez des erreurs.

Tous les modèles sont basés sur des hypothèses et pas sur des connaissances -  comme les prévisions météorologiques - et on ne peut pas toujours faire confiance aux modèles.
C'est donc une inquiétude, une inquiétude à la fois parce que nous pourrions prendre une mauvaise décision et nuire à des personnes par le biais du dépistage, mais aussi parce qu'on détourne les ressources aux dépens de choses dont on sait qu'elles fonctionnent.

Si l'on considère la mortalité par cancer du sein chez les femmes de plus de 40 ans, on constate une évolution très positive : le risque de mourir d'un cancer du sein pour une femme de 40 ans a été réduit de moitié au cours des 30 dernières années en absence de dépistage.
(NDLR, lire ici : risque de décès en baisse)
Nous sommes donc devenus bien meilleurs pour traiter les femmes, les jeunes femmes atteintes d'un cancer du sein, ce qui est bien sûr une incroyable réussite dont nous devrions être fiers en tant que profession.
Et nous devrions féliciter les oncologues en tant que responsables de cette évolution très positive.

Mais en même temps, cela signifie aussi qu'il n'y a jamais eu la moindre raison de commencer à dépister les femmes de 40 ans. Car nous faisons déjà beaucoup mieux que nous ne l'avons jamais fait dans l'histoire, contre cette maladie. Il n'y a donc pas de crise du cancer du sein chez les femmes de 40 ans, nous nous en sortons très bien."

Conclusion

"À mon avis, nous devons nous assurer qu’on ne fasse pas plus de mal que de bien en faisant davantage et en invitant ces femmes au dépistage."

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Mammo ou pas mammo ? Le livre pour les femmes en anglais !

22/10/2023

Mammogram: YES or NO?
“Should I get Screened ?”
By Dr. Cécile Bour, Radiologist

Depuis l'alerte de la Collaboration Nordique Cochrane dans les années 2000 mettant en doute l'efficacité du dépistage mammographique et pointant ses risques, de nouvelles études ont vu le jour en 2023, évaluant le surdiagnostic généré par le dépistage à la hausse.

Parallèlement, une revue systématique très récemment parue suggère un gain de durée de vie grâce au dépistage mammographique incertain et très peu probable.

Malheureusement les femmes sont volontairement tenues à l'écart de ces nouvelles connaissances et subissent toujours la promotion du dépistage sans qu'on ne les informe de ses risques et inconvénients.

Il est temps que cette connaissance progresse enfin et soit accessible à toutes les femmes, dans tous les pays.

Le livre "mammo ou pas mammo ?", sorti aux éditions T.Souccar d'abord en français et en version papier en 2021 est à présent accessible en version anglaise en format ebook, pour un public plus large et anglophone.

Un manuel pratique pour les femmes

C'est un ouvrage pratique, qui s’adresse à toutes les femmes qui se posent des questions sur le dépistage du cancer du sein.
Conçu à partir des questions de patientes entendues en consultation, l'auteure, radiologue exerçant en France, fournit les informations nécessaires pour aider chaque femme à mieux comprendre les enjeux de ce dépistage et à en connaître les inconvénients.
Au plus près des données scientifiques elle s'efforce de répondre, par exemple aux questions suivantes :

« En passant une mammo, une écho, ou une IRM, on est sûr de tout voir, non ? »

« Là où je travaille, on est dix femmes. On se fait toutes dépister parce que l’une de nous l’aura forcément. Une sur huit à ce qu’il paraît ! C’est vrai ? »

« J’ai lu que le taux de guérison du cancer du sein était de 90 %. C’est vrai ? »

« Le radiologue m’a trouvé un tout petit cancer. Plus on détecte tôt et mieux c’est, non ? »

« Est-ce qu’on ne devrait pas faire des mammographies plus tôt, avant 50 ans ? »

« C’est quoi le surdiagnostic ? »

« C’est si grave que ça de détecter des cancers inoffensifs ?»

Pourquoi une traduction ?

Parce qu’on ne leur a jamais exposé les données de façon équilibrée, certaines lectrices vont certainement découvrir seulement maintenant que la pertinence du dépistage du cancer du sein est contestée sur le plan scientifique.
Elles trouveront des éclaircissements à des interrogations de base que toutes les femmes, se posent sans trouver nécessairement de réponse sur les sites officiels, pour pouvoir en discuter avec leur praticien afin de faire leur choix, selon le principe de la décision éclairée, qu'elles résident dans un pays francophone ou au-delà de nos frontières.

Communiqué de presse/Press release

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Pas de prolongement de la durée de vie par les dépistages

17/10/2023

En ce mois d'octobre où le mythe salvateur du dépistage nous est ressassé à l'envi, nous re-publions cette étude qui aurait dû conduire autorités sanitaires et décideurs politiques à appuyer ce que la concertation citoyenne sur le dépistage avait demandé, à savoir une information modérée, en tous cas neutre et honnête sur ce dépistage extrêmement décevant, et qui n'a tenu aucune des promesses attendues.
Et ce au lieu de poursuivre une incitation aveugle des femmes par le truchement de la campagne rose promotrice de ce dispositif de santé avec autant de risques maintenant avérés.
Pas de diminution des formes graves de cancers, pas de gain de survie, pas d'allègement des traitements (au contraire), davantage de surdiagnostics délétères à la santé des femmes, dont elle ne sont pas informées.

Un schéma résume ici la situation :

L' ETUDE SUR LE 'GAIN DE DUREE DE VIE'

Estimation de la durée de vie "gagnée" grâce aux dépistages des cancers

28/08/2023, traduction et synthèse par Cancer Rose

Une méta-analyse des essais cliniques randomisés
https://jamanetwork.com/journals/jamainternalmedicine/fullarticle/2808648?guestAccessKey=c7d91084-054d-49f3-97be-9b302f883c9c&utm_source=twitter&utm_medium=social_jamaim&utm_term=11181634494&utm_campaign=article_alert&linkId=232083149

Michael Bretthauer, MD, PhD; Paulina Wieszczy, MSc, PhD; Magnus Løberg, MD, PhDet alMichal F. Kaminski, MD, PhD; Tarjei Fiskergård Werner, MSc; Lise M. Helsingen, MD, PhD; Yuichi Mori, MD, PhD; Øyvind Holme, MD, PhD; Hans-Olov Adami, MD, PhD; Mette Kalager, MD, PhD
Author Affiliations Article Information
JAMA Intern Med. Published online August 28, 2023. doi:10.1001/jamainternmed.2023.3798

Il s'agit d'une revue systématique et méta-analyse publiée par des auteurs de l'Institute of Health and Society de l'University d'Oslo (Norvège), examinant 18 essais cliniques randomisés à long terme, cherchant à estimer la durée de vie 'gagnée' grâce au dépistage du cancer.
Plusieurs tests de dépistage sont analysés : dépistage par mammographie du cancer du sein; coloscopie, sigmoïdoscopie, recherche de sang fécal pour le cancer colorectal; dépistage par tomodensitométrie du cancer du poumon chez les fumeurs et les anciens fumeurs; test d’antigène spécifique de la prostate (PSA) pour le cancer de la prostate.

L'étude implique  2,1 millions de personnes, plus exactement 721 718 hommes pour le dépistage par PSA, 614 431 hommes et femmes pour le dépistage par sigmoïdoscopie, 598 934 hommes et femmes pour la recherche de sang fécal tous les deux ans, 84 585 hommes et femmes pour le dépistage par coloscopie et 73 634 femmes pour le dépistage par mammographie ; un plus petit échantillon pour le dépistage annuel par recherche de sang fécal (30 964 hommes et femmes) et pour le dépistage par tomodensitométrie du cancer du poumon (20 505 hommes et femmes).

La revue porte sur des essais avec plus de 9 ans de suivi ( 10 à 15 de suivi en moyenne) rapportant la mortalité toutes causes confondues et l’espérance de vie acquise estimée pour 6 tests de dépistage du cancer couramment utilisés, en comparant 'dépistage' avec 'absence de dépistage'.

Le critère de jugement était la durée de vie dans les groupes 'dépistage' par rapport aux groupes 'sans dépistage' selon les données déclarées de la mortalité toutes causes confondues mais aussi de la mortalité spécifique par cancer.
Autrement dit les années de vie "gagnées" par le dépistage ont été calculées comme étant la différence de durée de vie observée (en années/personnes) parmi les groupes 'dépistage' par rapport aux groupes 'sans dépistage'.
L’analyse a porté sur la population générale.
MEDLINE et les bases de données de la bibliothèque Cochrane ont constitué les bases de cette recherche.
Il n'y a pas eu d'inclusion d'études observationnelles ni d'études de modélisation en raison des multiples biais possibles.

Points clés et résultats principaux :

Question : Les tests de dépistage du cancer sont promus pour sauver des vies, mais dans quelle mesure la vie est-elle réellement prolongée grâce aux tests de dépistage du cancer couramment utilisés?

Réponse : Les résultats de cette méta-analyse suggèrent que le dépistage du cancer colorectal par sigmoïdoscopie peut prolonger la vie d’environ 3 mois ; le gain de durée de vie pour les autres tests de dépistage semble peu probable ou incertain.

Figure 1

Dans cette figure 1, les flèches horizontales illustrent quatre personnes qui ont subi un dépistage.
Flèches pointant vers la droite : 2 personnes qui ont bénéficié du dépistage vivent plus longtemps grâce à la détection précoce du cancer et à la guérison.
Flèches pointant vers la gauche : 2 personnes qui ont subi un préjudice lié au dépistage et qui sont décédées plus tôt que celles qui n’ont pas subi de dépistage.
Le cercle bleu indique l’effet du dépistage sur la longévité de la population, qui a été calculée comme étant la résultante de l'ensemble des bénéfices individuels moins l'ensemble des préjudices individuels.
On voit que globalement il n'y a pas d'effet net de gain en durée de vie, ce que les dépistages promettaient lors de l'instauration des campagnes nationales.

Le gain de durée de vie

Les auteurs écrivent :

"Selon les risques relatifs observés pour la mortalité toutes causes confondues et le temps de suivi déclaré dans les essais, le seul test de dépistage qui a considérablement augmenté la longévité était la sigmoïdoscopie, de 110 jours (IC à 95 %, 0 à 274 jours) (tableau 2..)

Nous n’avons trouvé aucun résultat statistiquement significatif pour la longévité avec le dépistage par mammographie (0 jour; IC à 95 %, 190 à 237 jours) et le dépistage par recherche de sang fécal avec dépistage annuel ou bisannuel (0 jour; IC à 95 %, 70,7 à 70,7 jours).
Le dépistage par coloscopie (37 jours de gain; IC à 95 %, 146 à 146 jours) et le dépistage par PSA (prostate) (37 jours; IC à 95 %, 37 à 73 jours) peuvent être associés à une longévité d’environ 5 semaines et le dépistage du cancer du poumon chez les fumeurs ou les anciens fumeurs à environ 3 mois (107 jours; IC à 95 %, 286 à 430 jours), mais ces estimations sont incertaines)."

Figure 2

A droite la durée de vie "gagnée" ; à gauche la durée de vie "perdue"

Figure 2 résume ces résultats- Les points en diamants indiquent des estimations ponctuelles des jours de vie gagnés ou perdus pour chaque test de dépistage. Les flèches gauche et droite indiquent l'intervalle de confiance de 95 %.
CT signifie tomodensitométrie pour la recherche du cancer du poumon, FOBT (faecal occult blood test) correspond à la recherche de sang dans les selles, et le PSA est l'antigène prostatique spécifique.

Discussion

Les auteurs développent leurs constatations.

"Notre étude quantifie si l’utilisation de 6 tests de dépistage du cancer couramment utilisés est associée à la durée de vie. Un test (sigmoïdoscopie) a considérablement prolongé la vie et la longévité de 110 jours, bien que la limite inférieure de l’IC à 95 % s’étende à 0. Les tests fécaux et le dépistage par mammographie n’ont pas semblé prolonger la vie dans les essais, tandis que les estimations pour le dépistage du cancer de la prostate et du cancer du poumon sont incertaines.

Au cours des dernières décennies, des programmes organisés de dépistage du cancer ont été mis en place en Europe, au Canada, dans les îles du Pacifique et dans de nombreux pays d’Asie. Aux États-Unis, le dépistage du cancer est offert par de nombreux établissements et encouragé et remboursé par la plupart des payeurs de soins de santé. Plusieurs études se sont penchées sur l’association entre le dépistage et la mortalité toutes causes (6,28).Peu ont traduit leurs résultats en estimations pratiques et faciles à comprendre pour les professionnels de la santé et les particuliers sur la mesure dans laquelle le dépistage du cancer peut augmenter l’espérance de vie. Notre étude fournit ces estimations.

Même si nous n’avons pas observé de vie plus longue en général avec 5 des 6 tests de dépistage, certaines personnes prolongent leur vie en raison de ces tests de dépistage. Le cancer est prévenu ou détecté à un stade précoce, et les personnes survivent au dépistage et au traitement subséquent sans dommages ni complications. Sans dépistage, ces patients peuvent être morts du cancer parce qu’il aurait été détecté à un stade plus tardif et incurable. Ainsi, ces patients connaissent un gain dans la vie.

Cependant, d’autres personnes subissent une perte à vie en raison du dépistage.(35,36) Cette perte est causée par des préjudices associés au dépistage ou au traitement des cancers détectés par le dépistage, par exemple, en raison d’une perforation du côlon au cours d’une coloscopie ou d’un infarctus du myocarde après une prostatectomie radicale.(37,38)

Pour 5 des 6 tests de dépistage étudiés ici, les résultats suggèrent que la plupart des individus n’auront aucun gain de longévité.
Pour ceux dont la longévité a été altérée à cause du dépistage, la perte cumulative pour ceux qui sont lésés doit être compensée en durée par le gain cumulatif pour ceux qui en ont bénéficié, et montrer une durée de vie inchangée chez les personnes qui subissent le dépistage par rapport à ceux qui ne le font pas.
........
........
Notre étude pourrait fournir des estimations faciles à comprendre concernant la prolongation de la vie attribuable au dépistage, estimations qui pourraient être utilisées dans la prise de décision partagée avec les personnes qui envisagent de passer un test de dépistage.
Nos estimations peuvent également servir à prioriser les initiatives de santé publique par rapport à d’autres mesures préventives, comme le traitement de l’obésité ou la prévention des maladies cardiovasculaires.(28)

Le manque de longévité accrue par dépistage peut également se produire en raison de causes concurrentes de décès. Bon nombre des cancers que nous dépistons partagent des facteurs de risque avec des causes de décès plus répandues, comme les maladies cardiovasculaires et métaboliques. L’absence d’une augmentation significative de la longévité par dépistage du cancer peut donc être due à la mort par causes concurrentes en même temps qu’un patient qui serait mort du cancer sans dépistage. Un déplacement de la mortalité du cancer vers d’autres causes de décès sans allongement de la durée de vie est donc plausible.

En raison de la stigmatisation et du fardeau psychologique, un diagnostic de cancer peut également causer des décès non spécifiques au cancer, dus au suicide, aux maladies cardiovasculaires et aux accidents.(41,42) De plus, une surveillance accrue après le dépistage du cancer peut augmenter le risque d’autres maladies accidentelles, qui n’auraient pas été détectés sans dépistage.(43)

L’adhésion à plus d’un seul test de dépistage peut potentiellement augmenter la longévité. La seule étude disponible ne suggère pas qu’il y ait un effet additif du dépistage de plus d’un cancer.
...."

Une autre préoccupation abordée par les auteurs est celle de la qualité de vie après cancer.

" En plus de la durée de vie acquise ou perdue avec le dépistage, la qualité de vie est importante. Les années de vie ajustées en fonction de la qualité (Quality-adjusted life-years ou QALYs)  sont difficiles à mesurer et à interpréter, mais des analyses récentes des QALYs pour les estimations du dépistage par mammographie en Norvège suggèrent que le QALY net dans le dépistage par mammographie moderne en Norvège pourrait être négatif.(29)"

Conclusions et pertinence de l'étude :

Les résultats de cette méta-analyse suggèrent que les données actuelles ne corroborent pas l’affirmation selon laquelle les tests de dépistage du cancer sauvent des vies en prolongeant la durée de vie, sauf peut-être pour le dépistage du cancer colorectal par sigmoïdoscopie.

Tableau 2

Détail des essais randomisés inclus, comparaison 'dépistage/sans dépistage' des décès par le cancer spécifique et des décès toutes causes confondues, résultat illustré dans la figure 2-Cliquez sur l'image

Références de l'étude

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Mammo ou pas mammo ?

PRESENTATION DU LIVRE "MAMMO OU PAS MAMMO?" VENDREDI 13 OCTOBRE à Ma P'TITE LIBRAIRE, à CLOUANGE (MOSELLE), à 18H30;

La présentation sera suivie d'une discussion avec les participant(e)s autour du dépistage du cancer du sein.

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De plus en plus d’arguments pour cesser d’en faire trop



The growing case for doing less: How harmless cancers are being overdiagnosed in America

https://fortune.com/2023/10/02/growing-case-for-doing-less-harmless-cancers-overdiagnosed-america-health-carolyn-barber/
Fortune est un magazine américain consacré à l'économie, le deuxième plus ancien en Amérique du Nord après Forbes (1917).

4/10/2023, traduction et restitution par Cancer Rose

Des arguments de plus en plus convaincants pour en faire moins : Comment des cancers inoffensifs sont surdiagnostiqués en Amérique.
Une étude portant sur 100 000 femmes suivies pendant vingt ans a montré que les patientes chez qui on avait diagnostiqué et traité un cancer du sein au stade zéro (les cancers dits in situ) avaient finalement à peu près les mêmes chances de mourir de la maladie que le reste de la population.
Voir article sur cette étude de Toronto ici : https://cancer-rose.fr/2016/11/20/cis-bernard-pabion/

Nous restituons cet article du média 'Fortune' car la situation est analogue en Europe, en tous cas dans les pays où des campagnes de dépistage sont en vigueur. On assiste à une incitation du public toujours renouvelée, à l'instar d'octobre rose pour le cancer du sein. et ce en dépit de beaucoup d'études récentes mettant fortement en doute la pertinence des dépistages et démontrant les effets indésirables sur lesquels très peu d'information est donnée à la population.

Article écrit par CAROLYN BARBER

En 2009, Laura Esserman, chirurgienne spécialiste du cancer du sein et de l'oncologie à San Francisco, a co-publié un article dans le Journal of the American Medical Association (JAMA) suggérant qu'il était temps de repenser le dépistage systématique du cancer du sein et de la prostate. L'approche actuelle, écrit-elle, ne réduit pas autant qu'on l'espérait les maladies agressives ou à un stade avancé. Au contraire, elle conduit à un surdiagnostic.
......

Le problème

Dans une étude portant sur 100 000 femmes suivies pendant vingt ans, les patientes chez qui on avait diagnostiqué et traité un carcinome canalaire in situ (CCIS) avaient finalement à peu près les mêmes chances de mourir d'un cancer du sein que celles de la population générale.
Alors que Mme Esserman défendait déjà cette thèse il y a plusieurs années, elle fait aujourd'hui partie d'un nombre croissant de chercheurs et d'experts qui s'opposent à la tendance de l'industrie médicale à surévaluer, surdiagnostiquer et surtraiter les patients pour des affections qui, autrement, n'auraient jamais eu d'incidence sur leur vie.

"Il n'est pas agréable de faire une biopsie, et 75 % de toutes les biopsies que nous pratiquons ne donnent rien. Vous plantez une aiguille dans le sein et vous voyez parfois ces petites calcifications qui sont bénignes - mais incidemment, il y a une focalisation sur le CCIS, et la chose suivante est que quelqu'un subit une mastectomie bilatérale. Vous pensez que ce genre de choses n'arrive pas. Cela arrive tout le temps", affirme Esserman.

L'industrie du surdiagnostic

Une analyse publiée l'année dernière dans la revue Annals of Internal Medicine a estimé que chez les femmes âgées de 50 à 74 ans, environ 15 % des cancers du sein détectés par dépistage sont surdiagnostiqués, ce qui signifie qu'ils n'auraient jamais provoqué de symptômes ou de problèmes. L'étude des Annals estime qu'un nombre important de femmes de plus de 70 ans sont potentiellement surdiagnostiquées pour le cancer du sein, dont près de la moitié des femmes âgées de 75 à 84 ans. Ce chiffre est inférieur à celui d'un article publié en 2012 dans le NEJM, qui suggérait que le surdiagnostic concernait près d'un tiers de tous les cancers du sein nouvellement diagnostiqués.
NDL : une revue systématique récente évalue le surdiagnostic du cancer du sein à 30%)

Cette tendance s'étend à de nombreux cancers, notamment ceux du sein, de la prostate, du mélanome et de la thyroïde. Le point commun est qu'avec le développement des technologies de diagnostic, il est désormais possible de détecter ces cancers de manière plus fine et à des stades plus précoces, y compris, selon plusieurs experts, à des stades où les cancers ne présentent souvent que peu ou pas de risque pour les patients concernés.

En août, une méta-analyse de 18 essais cliniques randomisés portant sur 2,1 millions de personnes, publiée dans JAMA Internal Medicine, a conclu que "les preuves actuelles ne corroborent pas l'affirmation" selon laquelle les dépistages courants du cancer (mammographie, coloscopie, test de l'antigène prostatique spécifique (PSA), etc.) sauvent des vies en prolongeant la durée de vie, à l'exception peut-être de la sigmoïdoscopie, pour le cancer du côlon.
Lire notre synthèse : https://cancer-rose.fr/2023/08/29/pas-de-prolongement-de-la-duree-de-vie-grace-aux-depistages/

"Dans notre exubérance à trouver ces cancers, nous avons transformé en patients un grand nombre de personnes en bonne santé qui n'étaient pas destinées à mourir de ces cancers", déclare Ade Adamson, expert en dépistage du cancer et dermatologue à la Dell Medical School d'Austin. Adamson note que le dépistage du cancer du sein chez 1 000 femmes permet statistiquement d'éviter un décès lié au cancer. Cependant, "une grande partie" des 999 autres femmes dépistées finira par avoir de "fausses alertes" et devra peut-être subir d'autres examens, y compris des biopsies douloureuses, de l'anxiété et des nuits sans sommeil à l'idée d'avoir un cancer. En fin de compte, certaines personnes subiront des interventions chirurgicales et des traitements inutiles, et pourraient même souffrir de tous les traitements prescrits.
.....
Les diagnostics de cancer par dépistage aux États-Unis ont augmenté de façon exponentielle. Un article paru en 2021 dans le New England Journal of Medicine a révélé que l'incidence documentée du mélanome, "une tumeur autrefois rare", était aujourd'hui six fois plus élevée qu'il y a 40 ans. Toutefois, le taux de mortalité dû à ce cancer de la peau est resté généralement stable. Aucun essai contrôlé randomisé ni aucune étude au niveau de la population n'ont démontré les avantages du dépistage du mélanome en termes de réduction du nombre de décès dus à cette maladie.

"Je pense qu'en général, nous avons surinvesti dans le dépistage du cancer", déclare Gilbert Welch, interniste et auteur principal de l'article du NEJM. "Ses avantages ont été systématiquement exagérés, ses inconvénients largement ignorés... Le dépistage est devenu un gros business, tant pour les systèmes de santé que pour les sociétés de diagnostic."
......

Selon Rita Redberg, cardiologue à l'UC San Francisco Health et ancienne rédactrice en chef du JAMA Internal Medicine, la réalité est que nous sommes plus aptes à détecter les maladies qu'à en savoir plus sur elles.
Dans le cas du cancer du sein, il est difficile de prédire avec certitude si une masse minuscule deviendra maligne, s'agrandira considérablement ou même disparaîtra complètement. Néanmoins, ces détections incitent à une action quasi-immédiate.
"Cela déclenche des biopsies et des traitements", explique R. Redberg. "Nous avons tout un système médical qui, une fois que l'on achète l'équipement (et) on apprend à le manipuler, il est remboursé - c'est une sorte de train qui ne s'arrête jamais".

"Je ne pense pas que les gens se sentent mieux après tous ces tests de dépistage que nous effectuons, et ils entraînent de nombreuses complications", ajoute R. Redberg. "Je pense que nous aurions un impact beaucoup plus important si nous menions des campagnes de santé publique pour arrêter de fumer, arrêter de vaper, augmenter l'activité physique et améliorer notre alimentation. Cela réduirait vraiment le nombre de cancers et les gens se sentiraient mieux."

Concernant le dépistage du cancer de la prostate

.......
Pendant des décennies, le test sanguin PSA a été recommandé pour dépister le cancer de la prostate chez les hommes, malgré le peu de preuves qu'il contribuait réellement à réduire les taux de mortalité toutes causes confondues.
Une méta-analyse de cinq essais contrôlés randomisés a conclu que le dépistage du PSA avait, au mieux, un faible effet sur la mortalité spécifique à la prostate - un décès évité pour 1 000 hommes dépistés sur une période de 10 ans - et aucun effet sur la survie globale.

Jusqu'à il y a une dizaine d'années, la plupart des cancers de la prostate à faible risque détectés initialement par le dépistage basé sur le PSA (le cancer à faible risque est le type de cancer le plus fréquemment identifié) étaient traités par chirurgie ou radiothérapie, avec pour effets secondaires courants l'incontinence et les troubles de l'érection. Ces dernières années, la pratique clinique a évolué de telle sorte qu'un plus grand nombre d'hommes aux États-Unis (60 % selon une étude) optent pour la surveillance active, qui consiste à suivre de près le cancer sans traitement jusqu'à ce que celui-ci devienne nécessaire. Cependant, comme le soulignent les auteurs de l'étude, l'utilisation de la surveillance active varie considérablement d'un cabinet d'urologie à l'autre et existe à peine chez certains d'entre eux, ce que les auteurs qualifient de "sous-optimal".
Derrière tous ces chiffres se pose une question plus générale : Devons-nous trouver tous les cancers ? À l'autopsie, environ 40 % des hommes de plus de 80 ans ont un cancer de découverte fortuite de la prostate, explique Morris (oncologue au Centre anti-cancéreux Memorial Sloan Kettering NY), mais ils sont morts d'autres causes. "Et 10 à 30 % d'entre nous ont un cancer de la thyroïde (cliniquement insignifiant) lorsqu'on meurt".

Les carcinomes in situ

Dans le cas des lésions précancéreuses du sein, un essai prospectif randomisé actuellement en cours, COMET (nous parlons ici de la problématique des cancers in situ et des essais cliniques en cours, NDLR), comparera les résultats des femmes chez qui l'on a diagnostiqué un CCIS et qui subissent un traitement standard (chirurgie et/ou radiothérapie) à ceux des femmes qui restent sous surveillance active, avec des examens réguliers pour s'assurer que le CCIS ne s'est pas transformé en cancer invasif. Les patientes des deux groupes peuvent également opter pour un traitement hormonal bloquant qui, chez certaines femmes, empêche le CCIS de se propager.

L'idée de simplement surveiller les modifications (des lésions CCIS détectées, NDLR) "est une remise en question totale de ce que nous pensons être la maladie", déclare Shelley Hwang, directrice du programme d'oncologie mammaire à Duke Health et investigatrice principale de l'essai. "Pour cette raison, il est très difficile de changer les cœurs et les esprits. Mais je pense que nous devons changer les deux".

Hwang m'a expliqué (dixit l'auteure) que si plus de 50 000 femmes sont diagnostiquées avec un CCIS chaque année (environ 65 millions d'Américaines subissent des mammographies chaque année), un pourcentage beaucoup plus faible de ce total se transforme en une forme quelconque de cancer invasif. Toutefois, à l'heure actuelle, presque toutes les femmes chez lesquelles on a diagnostiqué un CCIS doivent subir une mastectomie, une tumorectomie et/ou une radiothérapie, voire un traitement hormonal.
"Je pense que la stratégie actuelle consiste à traiter 100 % des patients, en espérant en avoir aidé quelques-unes", déclare Hwang. "L'autre stratégie consiste à laisser la biologie dicter ceux qui ont besoin d'un traitement et à ne pas nuire aux autres....."

Une étude appelée RECAST DCIS, qui devrait débuter cet automne, associera la surveillance active des patientes chez qui un CCIS a été diagnostiqué à un traitement endocrinien, et Mme Esserman, comme beaucoup d'autres, pense que le fait de mieux connaître l'histoire personnelle des patientes, y compris leur bagage génétique, peut et doit entrer en ligne de compte dans toute décision concernant les soins. "Je pense qu'il s'agit d'une façon très réfléchie et pragmatique de faire changer les choses", déclare M. Esserman.

Conclusion

Il apparaît de plus en plus clairement que le dépistage de masse n'a pas donné les résultats escomptés et que, pour un trop grand nombre d'Américains, il fait plus de mal que de bien lorsqu'il s'agit de cancers à un stade précoce.

Une approche plus équilibrée et nuancée, qui stratifie mieux les individus sur la base du risque et des préférences du patient, est certainement la bienvenue. Comme le dit Hwang, "dépistons les patients dont nous savons qu'ils présentent le risque le plus élevé, et laissons de côté les patients qui présentent les risques les plus faibles". Mais rien de tout cela ne sera facile dans un pays qui a depuis longtemps fait du dépistage - et des traitements qui en découlent - une norme de soins.

Carolyn Barber, M.D., est une rédactrice scientifique et médicale publiée à l'échelle internationale et a exercé la profession de médecin urgentiste pendant 25 ans. Elle est l'auteur du livre Runaway Medicine : What You Don't Know May Kill You, et cofondatrice du programme de travail pour les sans-abri Wheels of Change, basé en Californie.

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NOUVEAU, NOTRE OUTIL D’AIDE A LA DECISION INTERACTIF

1er octobre 2023

Communiqué de presse de Cancer Rose

1er octobre 2023

Le Collectif Cancer Rose propose un outil d'aide à la décision interactif et en trois langues (français, anglais, allemand) concernant le dépistage du cancer du sein, afin que chaque femme puisse évaluer sa propre balance bénéfices/risques. https://oad.cancer-rose.fr/
Cet outil peut facilement être utilisé seule ou avec l'aide d’un praticien lors d'une consultation médicale.

L’outil présente 2 balances bénéfices/risques :

  • une balance bénéfices/risques basée sur des hypothèses défavorables au dépistage
  • une balance bénéfices/risques basée sur des hypothèses favorables au dépistage.

Il est possible de renseigner l'âge de début et de fin de participation au dépistage pour avoir une estimation personnalisée des bénéfices escomptés (les décès évités) et des risques (les surdiagnostics et les fausses alertes) auxquels expose le dépistage.

COMMUNIQUES DE PRESSE, FRANçAIS, ANGLAIS, ALLEMAND

L'outil est également accessible directement à partir de la page d'accueil.

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Octobre rose, bis repetita mais pas placent

30/09/2023
Par Dr C.Bour

Durant l'année 2023, trois études sont venu bousculer, encore un peu plus, les certitudes roses que l'on vend aux femmes.
Il sera dorénavant impossible de prétendre encore que ce dépistage sauve des vies ; continuer à en faire des slogans simplistes tels que les associations et les médias les ont servis au public pendant des décennies relève de la propagande, purement et simplement.
Propagande rappelée dans l'excellent billet "octobre noir, c'est reparti" , où l'auteur, Dr Grange alias doc du 16 sur les réseaux a réalisé une compilation des campagnes des plus cocasses aux plus scandaleuses et sexistes.
Gouvernements et ministres de santé posent régulièrement pour les photos d'usage arborant l'inévitable petit ruban rose, y compris Mme Buzyn qui, en dépit des demandes de la concertation citoyenne de 2016 de cesser l'incitation rose des femmes promeut en image le dépistage et y incite littéralement dans ce tweet.

Celle qui actuellement explique dans les médias que des médecins inquiets concernant la désinformation lors de la pandémie Covid n'ont pas été entendus, n'a pas beaucoup écouté elle-même en son temps d'autres médecins inquiets de la désinformation sur le dépistage, et qui essaient de s'exprimer eux aussi depuis au moins deux décennies.

Malheureusement le fait que le dépistage pourrait comprendre plus de risques qu'il ne présente de bénéfices n'arrivera probablement que difficilement aux oreilles des concernées (les femmes) puisque très officiellement qualifié de fake-news.
Nous en avions parlé lors d'un congrès international à Calgary devant une communauté scientifique internationale plutôt médusée des tentatives de muselage françaises, si peu en accord avec le mythe de la liberté d'expression française. S'ils savaient...S'ils savaient combien d'interviews avortés, de tribunes refusées, d'articles jamais publiés notre collectif a essuyés, combien d'heures accordées en entretien à des journalistes parfois réellement motivés mais restées sans suite en raison d'une rédaction qui ne valide pas le sujet, ou pas les propos... Combien de déplacements inutiles pour parler dans des rédacs parisiennes pour apprendre ensuite que le sujet "ne passera finalement pas".

MMe Buzyn aborde "l'aspect genré" dans son nouveau livre, arguant que si elle n'avait pas été une femme et avait été dotée "d'une plus grosse voix" (sic) elle aurait été davantage écoutée.

...Mais combien de voix féminines alors, de femmes indûment traitées, surdiagnostiquées, amputées inutilement, avec des hémopathies ou des cardiopathies secondaires aux traitements faudra-t-il, combien de livres, de blogs, de publications de chercheurs indépendants faudra-t-il avant qu'un(e) ministre de la santé ait enfin l'honnêteté intellectuelle d'avouer que les campagnes de dépistage ont été lancées trop vite, avec trop de précipitation, trop d'engouement alors que déjà dans les années 2000 les preuves que ce dépistage était risqué et ne tenait pas ses promesses existaient ? Quelle ou quel ministre, au lieu de poser enrubanné sera assez fort(e), digne et droit(e) pour dire aux femmes de ce pays que ce dépistage doit rester LEUR choix, et uniquement LEUR choix, après les avoir honnêtement informées que non, se faire mammographier tous les deux ans ne les protègera pas d'un cancer du sein, ne leur sauvera pas la vie, mais leur fera même peut-être connaître une maladie que sans dépistage elle n'auraient jamais connue ?

Des études, toujours des études

Trois études disions-nous en préambule, que nous vous résumons à nouveau.

1°-Pour commencer une excellente nouvelle, le risque de décès par cancer du sein est en baisse, dépistage ou pas.
Bien que cette étude ne permette de tirer AUCUNE conclusion sur les avantages du dépistage, vu que le dépistage n'en était pas l'objet, et malgré les avertissements explicites dans la publication, les promoteurs du dépistage n'ont pas manqué de l'utiliser pour promouvoir ce dépistage, poussant des hourras et des cris de victoire.

Que dit l'étude : les améliorations en termes de mortalité par cancer du sein observées chez les femmes dont le cancer a été détecté par dépistage ont été parallèlement constatées chez les femmes dont le cancer n'a pas été détecté par dépistage.

 Le pronostic des cancers du sein s'améliore, sans qu'il soit possible de dire quelle est la part du dépistage, des progrès thérapeutiques et des facteurs de confusion que sont le biais d'avance au diagnostic, les surdiagnostics surtout, et aussi les facteurs sociaux et économiques.

Selon les études déjà disponibles (voir l'article) le rôle du dépistage est vraisemblablement marginal, et l'apparent succès dans les groupes dépistés est influencé par l'avance au diagnostic.

C'est tout, mais c'est déjà une EXCELLENTE nouvelle qu'il faut transmettre aux femmes.

2°- On ne peut espérer un prolongement de sa durée de vie en se faisant dépister.

Les résultats de cette méta-analyse ne corroborent pas l’affirmation selon laquelle les tests de dépistage du cancer sauvent des vies en prolongeant la durée de vie, sauf peut-être pour le dépistage du cancer colorectal par sigmoïdoscopie.

A droite "durée de vie gagnée", à gauche "durée de vie perdue"

Alors que des moyens colossaux sont mis dans des campagnes de promotion de dépistages, appelées fallacieusement "campagnes de prévention", on apprend que de véritables campagnes contre l'alcoolisme, pourtant plutôt efficaces, ont été retoquées.  
Eh bien c'est dommage...
L'alcool, le tabagisme font partie des facteurs de risque des cancers en général.
Le risque du cancer du sein augmente de 7 % par verre quotidien. Le risque est également augmenté par le tabagisme actif ou passif, et le dépistage 'précoce' est une ineptie si on ne lutte pas plus efficacement contre ces fléaux.

3°- le surdiagnostic, écueil majeur des dépistage et dont nous parlons énormément sur ce site, est sous-évalué, selon une revue systématique du début d'année.

Pour le dépistage du cancer du sein, quasiment un cancer sur 3 détectés serait une détection inutile, aux conséquences ravageuses pour la femme qui le subit.
Le surdiagnostic est l'inconvénient le plus grave du dépistage du cancer.
Pourtant, de nombreux programmes de dépistage ont été mis en œuvre à la suite de résultats préliminaires incomplets, mettant l'accent sur des bénéfices assez maigres, visibles en dépistant de très grosses cohortes de personnes et sur de longues années seulement, cependant que les effets néfastes du dépistage, comme le surdiagnostic, prennent aussi de nombreuses années avant d'être estimés de manière adéquate.

Il faut prendre en compte ces effets néfastes pour aboutir à des modifications, voire à l'arrêt de certains dépistages disent les auteurs, encore trop souvent mis en oeuvre en population malgré des non-recommandations parfois (prostate, thyroïde), et qui sont coûteux et inopérants.

En conclusion

Finalement un article trouvé ici propose une très bonne conclusion exprimée par l'épidémiologiste Catherine Hill :

" Le dépistage du cancer du sein ne prévient pas l’apparition de ce cancer. Tout ce que peut faire une mammographie c’est détecter un cancer plus précocement. Pour prévenir le cancer du sein, il faut réduire sa consommation de boisson alcoolisée autant que possible (et le vin est un alcool !) car le risque augmente de 7 % par verre quotidien, éviter le surpoids et l’obésité, et n’avoir recours au traitement hormonal de la ménopause, pour une durée aussi courte que possible, que si les symptômes sont très gênants, pour ne citer que les causes les plus importantes en France à l’heure actuelle.

Participer au programme national de dépistage du cancer du sein en continuant à fumer, à boire plus de dix verres de boisson alcoolisée par semaine ou en étant en surpoids ou obèse, c’est avoir une stratégie inadaptée de prévention des cancers. Ne pas réaliser de dépistage du cancer du sein en préférant éviter le tabac, l’alcool, le surpoids et l’obésité, en ayant une alimentation équilibrée, et en étant vaccinée contre les papillomavirus et l’hépatite B n’a vraiment rien de déraisonnable."

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Carcinomes non progressifs et régression cancéreuse

Traduction et synthèse de deux publications, par Cancer Rose, 25/09/2023

Il est très rare qu'on observe directement des régressions cancéreuses, non pas parce qu’elles sont rares, mais parce que leur observation est difficile, car dès qu’on décèle un cancer, il est traité.

Et de fait, on ne peut pas parier sur la régression d'un cancer lorsqu'on en voit un. Une fois détecté, on ne prend aucun risque et on traite la lésion cancéreuse.
La régression cancéreuse a pu être observée chez des femmes sur le point d’être opérées de leur cancer du sein, mais dont l’intervention chirurgicale a dû être différée en raison de la survenue d’une autre maladie grave (une hémopathie évolutive p.ex.) plus urgente à traiter. Ces cas de régression existent bel et bien, et pas seulement pour le cancer du sein d’ailleurs.[1]

Carcinomes mammaires non progressifs détectés lors du dépistage par mammographie : une étude de population

Heggland, T., Vatten, L.J., Opdahl, S. et al. Non-progressive breast carcinomas detected at mammography screening: a population study. Breast Cancer Res 25, 80 (2023). https://doi.org/10.1186/s13058-023-01682-9

L'étude ici présentée rassemble des données norvégiennes et, à l'aide d'un modèle âge-période-cohorte, les auteurs évaluent la proportion de cancers non évolutifs parmi les cancers détectés.

Certains carcinomes mammaires détectés lors du dépistage, en particulier le carcinome canalaire in situ, pourraient ne jamais évoluer vers une maladie symptomatique.
Il y a toujours plus de cancers détectés chez les femmes dépistées par rapport aux non-dépistées, cet excédent correspond au surdiagnostic (diagnostics non utiles), car si toutes les tumeurs avaient pour vocation d'évoluer vers des "vrais "cancers et s'exprimer en tant que tels, il y en aurait autant dans le groupe des non dépistées que des dépistées.
Le fait qu'il y en ait davantage chez les dépistées sans différence de longévité ou des taux de mortalité entre les deux groupes montre qu'il y a un excédent de détection de cancers chez les dépistées, cancers dont bon nombre ne sont pas évolutifs, mais qui, détectés, seront néanmoins traités.
La difficulté réside dans l'évaluation de la quantité des carcinomes invasifs non évolutifs et des carcinomes in situ, de plus en plus nombreux depuis l'instauration des dépistages mais dont la très grande majorité sont des lésions à très bon pronostic et non évolutives, à tel point que dans certains pays des programmes de simple surveillance active sont proposés.

Résultats de l'étude

Heggland et coll. veulent examiner si tous les carcinomes mammaires détectés lors d'un dépistage entre 50 et 69 ans évoluent vers des symptômes cliniques à 85 ans.
Ils ont estimé la fréquence des tumeurs non progressives (ou non évolutives) parmi les cas détectés par le dépistage, sur la base du programme BreastScreen Norway de la population norvégienne avec 24 ans de suivi, en calculant la différence du taux cumulé de carcinomes mammaires entre les scénarios avec et sans dépistage à l'âge de 85 ans.

Les résultats suggèrent que près d'un carcinome mammaire sur six détectés lors du dépistage peut être non progressif. Les auteurs écrivent : "Nous avons constaté que les carcinomes mammaires qui n'évoluent pas vers des cancers cliniques à l'âge de 85 ans pourraient représenter une proportion substantielle des cas détectés lors du dépistage. Une meilleure connaissance de la progression tumorale est nécessaire pour optimiser le traitement des carcinomes mammaires détectés par dépistage."

Ils ajoutent que leur estimation plus faible des carcinomes mammaires non progressifs par rapport à d'autres études peut être attribuée à la modélisation utilisée ; en effet diverses méta-analyses et un travail de synthèse de grande envergure du Pr.P.Autier suggèrent qu'un tiers des cancers détectés pourraient être des cancers non évolutifs et de détection inutile.

Une vérification de ce modèle suggère une régression de 50 % des cancers du sein invasifs surdiagnostiqués.

Réaction du chercheur et épidémiologiste norvégien Per-Henrik Zahl

https://breast-cancer-research.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13058-023-01708-2

Les modèles sont souvent spéculatifs...Et il y a peut-être un autre phénomène en dehors du caractère non évolutif des cancers, à savoir celui de la régression cancéreuse.

Dans le modèle, constate H.Zahl, à l'âge de 69 ans, le taux d'incidence excédentaire estimé est de 1 614 pour 100 000 femmes.
Si les femmes de cette cohorte n'ont pas participé au dépistage pendant 20 ans, ces tumeurs devraient s'accumuler en l'absence de dépistage et on devrait les détecter à 69 ans. Or, en supposant un taux de participation de 80%, on obtient un taux de détection spécifique à l'âge de 746 cancers du sein invasifs pour 100 000 femmes dépistées, plus environ 160 in situ détectés. Cela donne un taux de détection d'environ 900 pour 100 000 femmes dépistées.
Par rapport aux 1614 attendues dans le modèle, il nous manque presque la moitié des cancers, et rien ne justifie de considérer que 45 % des tumeurs ne se développent pas avant l'âge de 69 ans, qu'on ne les détecte pas lors des dépistages successifs jusqu'à 69 ans, et puis qu'elles commenceraient à se développer après l'âge de 69 ans et deviendraient cliniques plus tard.
Pour H.Zahl il s'agit bien de tumeurs, non seulement qui n'ont pas progressé mais qui ont même régressé et qu'il faut considérer dans le surdiagnostic.  
Il faut, dit-il, dans les discussions sur le surdiagnostic et lorsqu'un modèle d'évaluation des ne correspond pas aux données, prendre en compte le phénomène de régression cancéreuse.
Il convient de noter que la régression du cancer a également été indirectement signalée dans un essai de dépistage randomisé par mammographie[2]- environ 50 % des tumeurs détectées par IRM ont très probablement régressé dans cette étude.

Voir ceci : https://cancer-rose.fr/2020/06/25/regression-cancereuse/

Zahl écrit : " Il existe des preuves biologiques très solides indiquant que les petites tumeurs peuvent régresser spontanément. Certains cancers existent en équilibre avec le système immunitaire. Le vaccin Bacillus Calmette-Guérin (BCG) contre la tuberculose est utilisé depuis plus de 50 ans pour traiter les tumeurs à haut risque de la vessie ainsi que le mélanome malin. En effet, la thérapie immunitaire moderne est basée sur l'interaction avec le système immunitaire. Plus récemment, le pembrolizumab (anticorps monoclonal) a été approuvé par la FDA pour le traitement du cancer du sein triple négatif à haut risque, qu'il soit non avancé ou avancé. "

En conclusion :

L'histoire naturelle du cancer est encore mal connue.
Elle est certainement beaucoup plus complexe qu'imaginée, et très probablement sous l'influence du système immunitaire individuel.
La régression cancéreuse existe, et est vraisemblablement sous-estimée.


[1] Etudes sur la régression cancéreuse

  • Okunaga E, Okano S, Nakashima Y, Yamashita N, Tanaka K, Akiyoshi S, et al. Spontaneous regression of breast cancer with axillary lymph node metastasis: a case report and review of literature. Int J Clin Exp Pathol. 2014; 7(7): 4371-80.
  • Onuigbo WIB. Spontaneous regression of breast carcinoma: review of English publications from 1753 to 1897. Oncol Rev. Oct 2012; 6 (2): e22.
  •  Ricci SB, Cerchiari U. Spontaneous regression of malignant tumors: Importance of the immune system and other factors (Review). Oncol Lett. Nov 2010; 1(6): 941-5.

[2] Welch HG, Zahl P-H. Cancer dynamics in the DENSE trial. N Engl J Med. 2020;382:1283–4.

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Abaisser l’âge du dépistage ? Une boîte de Pandore

Traduction, restitution et commentaires par Cancer Rose, 17/09/2023

Les nouvelles recommandations de l'USPSTF sur la mammographie - Un point de vue divergent

  • Steven Woloshin, M.D., 
  • Karsten Juhl Jørgensen, M.D., D.Med.Sci., 
  • Shelley Hwang, M.D., M.P.H., 
  • and H. Gilbert Welch, M.D., M.P.H.

De : Dartmouth Institute and Dartmouth Cancer Center, Lebanon, NH (S.W.); the Lisa Schwartz Foundation for Truth in Medicine, Norwich, VT (S.W., K.J.J., S.H., H.G.W.); Cochrane Denmark and the Center for Evidence-Based Medicine Odense, Department of Clinical Research, University of Southern Denmark, Odense (K.J.J.); the Department of Surgery, Duke University, Durham, NC (S.H.); and the Center for Surgery and Public Health, Department of Surgery, Brigham and Women’s Hospital, Boston (H.G.W.).

https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMp2307229

September 16, 2023

Le groupe de travail américain (USPSTF) émettant les recommandations sur les dispositifs de santé publique a émis de nouvelles recommandations pour le dépistage mammographique au mois de mai 2023, préconisant le début des mammographies de routine à 40 ans.
Il s'agit d'un abaissement des recommandations au dépistage de 10 années par rapport aux modalités antérieures, qui préconisaient le dépistage du cancer du sein à 50 ans seulement, en raison de risques majorés pour les populations plus jeunes et pour un bénéfice trop restreint.
La décision a été motivée sur la base de deux arguments :
-augmentation des cancers du sein chez des femmes plus jeunes, et
-augmentation des cancers les plus agressifs chez les femmes noires.
Nous avons synthétisé cette annonce ainsi que les réactions qu'elles ont suscité ici : https://cancer-rose.fr/2023/05/15/abaisser-lage-du-debut-du-depistage-mais-a-quel-prix/

Cette modification des recommandations d'âge a soulevé beaucoup de contestations, notamment sur l'argumentation avancée d'une meilleure 'égalité' de traitement pour les classes sociales les plus pauvres.
Cette recommandation n'est pas anodine du tout et le tribut à payer pour les femmes risque d'être très lourd, c'est ce qui motive la mise en garde des auteurs, publiée hier.

Pourquoi cela doit nous concerner ?

Premièrement, plusieurs études toutes récentes, de cette années, mettent en cause de façon flagrante l'efficacité-même du dépistage mammographique.
Non, il ne permet pas de 'sauver des vies', ce mythe a fait long feu, il n'y a pas de prolongement de la durée de vie par les dépistages en général.
Non, ce n'est pas le dépistage mammographique qui est responsable d'une baisse de mortalité par cancer du sein ; le risque de décès par cancer du sein est en baisse, dépistage ou pas. Les traitements du cancer du sein s’améliorent de façon spectaculaire, ainsi la valeur de la détection primaire diminue, ce qui, à l’avenir, devrait le dépistage obsolète.
Non, le dépistage mammographique n'est pas anodin, les risques surpassent le bénéfice qu'on pourrait en attendre et le surdiagnostic est pire dans les évaluations actuelles.

Deuxièmement les recommandations américaines, très favorables aux fournisseurs du secteur de l'imagerie de la femme, risquent de servir d'exemple et d'ouvrir une boîte de Pandore qu'il sera impossible ensuite de refermer ; déjà des voix s'élèvent ici ou là pour demander un dépistage mammographique même annuel...
Il n'y a rien de 'complotiste' dans cet argument, en effet la prise en charge du cancer du sein est, il faut pouvoir le dire publiquement, une vaste entreprise rentable, alimentée par la peur que les femmes éprouvent à l'égard de cette maladie." Ce business du cancer est ce que le journaliste John Horgan explique longuement dans cet article.

Troisièmement, un essai européen, appelée MyPEBS, vient d'achever l'intégration des femmes réparties dans les différents groupes d'étude. Or cette étude, censée évaluer un dépistage individualisé basé sur le risque de chaque femme de faire un cancer est de toute évidence calibrée pour inciter à dépister plus et plus jeune, car elle recrute des femmes dès 40 ans, et elle comporte des biais flagrants que nous avons dénoncés dans une lettre ouverte en compagnie d'autres groupes de vigilance sanitaire.
Les femmes n'auront pas à choisir entre dépistage ou pas dépistage, mais entre dépistage standard et ... davantage de dépistage si elles sont désignées 'à risque'.
Cependant le sous-groupe de femmes dit 'à faible risque' comprendra très peu de femmes, et toutes les autres seront réparties dans des sous-groupes à plus haut risque très rapidement puisque le logiciel, non validé scientifiquement, admet des critères de risques très généreux et les femmes se verront davantage examinées par mammographies.
Par exemple, le fait d'avoir eu une biopsie du sein pour lésion même bénigne représente un facteur de risque, or le nombre d'actes biopsiques chez des femmes jeunes pour des lésions bénignes telles que des fibro-adénomes a très considérablement augmenté ces dernières années, ce qui va rendre de facto beaucoup de femmes abusivement "à risque".

En bref, alors que le dépistage mammographique peine de plus en plus à démontrer une quelconque pertinence et que les preuves de sa nocivité s'accumulent, on s'achemine Outre-Atlantique comme en Europe vers plus de dépistages, chez plus de jeunes, au mépris des risques auxquels on expose la population, et bien sûr sans l'en informer.
Il ne faudrait pas que ça se sache....

Le point de vue divergent

Nous restituons in extenso ci-dessous la publication du NEJM-

Récemment, la U.S. Preventive Services Task Force (USPSTF) a modifié sa recommandation concernant l'âge de début du dépistage par mammographie de 50 à 40 ans.1 Précédemment, la Task Force considérait que le dépistage chez les femmes de 40 à 50 ans relevait d'un choix personnel. Les recommandations de l'USPSTF étant très influentes, le dépistage par mammographie chez les femmes de 40 ans deviendra probablement une norme de performance des services de santé ; si c'est le cas, il s'agira d'un impératif de santé publique auquel les praticiens de soins primaires devront se conformer. Un tel changement affectera plus de 20 millions de femmes américaines et soulève des questions importantes.

Premièrement, existe-t-il de nouvelles preuves de l'augmentation de la mortalité due au cancer du sein ? Au contraire, la mortalité due au cancer du sein n'a cessé de diminuer aux États-Unis, ce qui constitue une réussite majeure de la médecine moderne. La réduction a été la plus prononcée chez les femmes de moins de 50 ans, dont la mortalité par cancer du sein a été réduite de moitié au cours des 30 dernières années, selon le système national des statistiques de l'état civil. Des tendances similaires sont observées dans d'autres pays à revenu élevé, y compris ceux où le dépistage chez les femmes de 40 ans est très rare (Danemark et Royaume-Uni) et ceux où le dépistage est rare dans tous les groupes d'âge (Suisse) - ce qui suggère que le déclin résulte en grande partie de l'amélioration des traitements, et non du dépistage (voir les graphiques).

Deuxièmement, existe-t-il de nouvelles preuves que les bénéfices de la mammographie augmentent ? Depuis la précédente recommandation de l'USPSTF, il n'y a pas eu de nouveaux essais randomisés sur le dépistage par mammographie chez les femmes de 40 ans.
Huit essais randomisés portant sur cette tranche d'âge, dont le plus récent (l'essai britannique sur l'âge), n'ont révélé aucun effet significatif.2 Ce résultat reflète à la fois la rareté des décès liés au cancer du sein chez les femmes de 40 ans et le fait que le dépistage réduit moins la mortalité qu'on ne l'espérait - probablement parce que la maladie est plus agressive dans cette tranche d'âge. Les cancers à croissance rapide sont plus susceptibles de ne pas être détectés par le dépistage, car ils apparaissent souvent dans l'intervalle entre deux examens.

Sans nouvelles données issues d'essais cliniques, la nouvelle recommandation se fonde sur des modèles statistiques qui estiment ce qui pourrait se passer si l'âge de début du dépistage était abaissé. Les modèles partent du principe que le dépistage par mammographie réduit la mortalité par cancer du sein d'environ 25 % et concluent que le dépistage de 1 000 femmes âgées de 40 à 74 ans, au lieu de 50 à 74 ans, permettrait de réduire d’un à deux le nombre de décès par cancer du sein au cours de la vie.

Le recours croissant de l'USPSTF à des modèles statistiques complexes est problématique. Les effets estimés peuvent être extrêmement sensibles aux hypothèses de modélisation, qui reflètent souvent la perception générale du moment.
Un modèle important, réalisé avant l'étude Women's Health Initiative, prévoyait que presque toutes les femmes ménopausées verraient leur espérance de vie augmenter grâce à un traitement hormonal substitutif. Les modèles peuvent paraître attrayants en raison de leur précision quantitative apparente, mais ils ne sont fiables que si les données d’entrée et les hypothèses utilisées le sont également. Comme d'autres l'ont souligné, les décideurs politiques ne devraient utiliser les modèles que s'ils comprennent les paramètres et les hypothèses sur lesquels ils reposent3.

Dans le cas présent, il est particulièrement problématique que la réduction modélisée de 25 % du risque relatif de mortalité par cancer du sein grâce au dépistage mammographique dépasse celle observée dans les méta-analyses des essais randomisés : une réduction de 16 % du risque relatif pour les huit essais combinés (intervalle de confiance [IC] de 95 %, 27 % à 4 % de réduction) et une réduction de 13 % du risque relatif dans les trois essais présentant un faible risque de biais (IC de 95 %, 27 % de réduction à 3 % d'augmentation).2

Ainsi, la balance des bénéfices et préjudices justifie-t-elle un nouvel impératif de santé publique ? Les réductions du risque relatif peuvent être trompeuses car elles ne contiennent aucune information sur le risque absolu, qui est déjà faible et en constante diminution pour ce groupe d'âge. Pour clarifier les effets potentiels de la recommandation actualisée en termes absolus, le tableau (ci-dessous) résume les bénéfices et préjudices.
Pour les femmes américaines à la quarantaine, le risque de décès, quelle qu'en soit la cause, au cours des dix prochaines années est d'environ 3 %, indépendamment du dépistage. Le bénéfice modélisé de la mammographie représente une réduction du risque de décès par cancer du sein sur 10 ans d'environ 0,3 % à environ 0,2 %, soit une différence de 0,1 point de pourcentage (un décès par cancer du sein pour 1 000 femmes dépistées pendant 10 ans). En d'autres termes, grâce au dépistage, la probabilité de ne pas mourir d'un cancer du sein au cours des dix prochaines années passe de 99,7 % à 99,8 %.

Cet effet est faible, surtout si l'on tient compte des préjudices potentiels et de ce qui semble être des hypothèses trop optimistes en matière de bénéfices. Les fausses alertes sont manifestement les conséquences les plus fréquentes : le modèle de l'USPSTF estime que 36 % des femmes âgées de 40 à 49 ans en subiront au moins une dans le cadre d'un dépistage bisannuel sur 10 ans. Toutes devront subir des examens supplémentaires pour confirmer qu'elles n'ont pas de cancer ; certaines subiront des examens multiples et devront payer des frais substantiels. Et certaines éprouveront de la peur : environ un tiers des femmes décrivent l'expérience comme "très effrayante" ou "la période la plus effrayante de leur vie "4.

Environ 6,6 % des femmes dépistées auront une fausse alerte nécessitant une biopsie. En outre, le modèle de l'USPSTF estime que 0,2 % des femmes seront surdiagnostiquées et traitées pour un cancer qui n'est pas destiné à causer des préjudices. Ces préjudices peuvent être plus fréquents dans la pratique, étant donné que les données du modèle provenant du Consortium de surveillance du cancer du sein ne reflètent probablement que les taux des pratiques les plus performantes. Les préjudices seront plus fréquents si le dépistage a lieu tous les ans plutôt que tous les deux ans, comme c'est le cas actuellement pour la plupart des femmes américaines.

Le tableau illustre le compromis critique pour les femmes d'une quarantaine d'années : les bénéfices, qui profiteront à peu de femmes, l'emportent-ils sur les risques qui affecteront beaucoup plus de femmes ? La solution est un choix de valeur que les femmes devraient pouvoir faire elles-mêmes, plutôt que de se voir imposer un impératif de santé publique par des médecins recevant des incitations pour atteindre un niveau de "qualité". Compte tenu de la baisse constante de la mortalité au cours des 30 dernières années, attribuable à l'amélioration des traitements, il est probable que de moins en moins de femmes bénéficieront du dépistage au fil du temps, tandis qu'un dépistage plus poussé augmentera les risques.

La Task Force affirme également que la nouvelle recommandation constitue une première étape importante dans la réduction de la disparité entre les femmes noires et les femmes blanches en matière de mortalité due au cancer du sein. Bien que la mortalité chez les femmes dans la quarantaine ait diminué de moitié dans les deux groupes depuis 1990 (voir l'annexe supplémentaire, disponible sur le site NEJM.org), la disparité est inquiétante et persistante : Selon le système national des statistiques de l'état civil, les femmes noires sont beaucoup plus susceptibles de mourir d'un cancer du sein que les femmes blanches (23 contre 13 décès pour 100 000 femmes). Mais il est difficile d'imaginer comment le fait de recommander la même intervention aux deux groupes pourrait réduire la disparité, d'autant plus que les taux de dépistage sont déjà aussi élevés pour les femmes noires et blanches dans la quarantaine (environ 60 %, selon le National Center for Health Statistics).

L'augmentation du dépistage ne peut pas résoudre les différences sous-jacentes dans la biologie du cancer : l'incidence du cancer du sein triple négatif (qui n'exprime pas le récepteur des œstrogènes, le récepteur de la progestérone et le récepteur 2 du facteur de croissance épidermique humain) chez les femmes noires est deux fois plus élevée que chez les femmes blanches, selon l'Institut national du cancer. Ce sous-type est le plus agressif, son traitement est le moins efficace et il est le plus à risque de ne pas être détecté par le dépistage.5

Un dépistage précoce ne permettrait pas non plus de résoudre les problèmes auxquels sont confrontées les femmes pauvres, souvent les femmes noires dans une mesure disproportionnée, problèmes tels que la moindre qualité des services médicaux disponibles, le suivi tardif des scanners anormaux, les retards de traitement et le plus faible recours aux thérapies adjuvantes. En fait, l'abaissement de l'âge du dépistage pourrait exacerber les problèmes contribuant à la disparité, en détournant les ressources vers un dépistage élargi. Nous devons faire davantage ce qui fonctionne vraiment : veiller à ce que les femmes pauvres atteintes d'un cancer du sein aient plus facilement accès à un traitement de haute qualité.

Une modification des recommandations relatives à la mammographie serait justifiée s'il était prouvé que les conséquences du cancer du sein s'aggravent ou s'il existait de nouvelles preuves que le dépistage chez les femmes plus jeunes présente des bénéfices clairs. En fait, aucune de ces deux conditions n'est remplie.

Nous espérons que les décideurs politiques reconsidéreront la décision d'abaisser l'âge de début du dépistage par mammographie. Les modèles de la Task Force sont insuffisants pour soutenir un nouvel impératif de santé publique, étant donné les bénéfices limités et les risques courants et importants pour les femmes en bonne santé.
Il serait préférable de permettre aux femmes de prendre leurs propres décisions sur la base de leur propre évaluation des données et de leurs valeurs - et de réorienter les ressources pour garantir que toutes les femmes atteintes d'un cancer du sein reçoivent le meilleur et le plus équitable des traitements possibles.

Références

  1. Preventive Services Task Force. Draft recommendation statement — breast cancer: screening. May 9, 2023 (https://www.uspreventiveservicestaskforce.org/uspstf/draft-recommendation/breast-cancer-screening-adults. opens in new tab).

2. Gøtzsche PC, Jørgensen KJ. Screening for breast cancer with mammography. Cochrane Database Syst Rev 2013;2013(6):CD001877-CD001877.

3. Kramer BS, Elmore JG. Projecting the benefits and harms of mammography using statistical models: proof or proofiness? J Natl Cancer Inst 2015;107(7):djv145-djv145.

4. Schwartz LM, Woloshin S, Fowler FJ Jr, Welch HG. Enthusiasm for cancer screening in the United States. JAMA 2004;291:71-78.

5. Hayse B, Hooley RJ, Killelea BK, Horowitz NR, Chagpar AB, Lannin DR. Breast cancer biology varies by method of detection and may contribute to overdiagnosis. Surgery 2016;160:454-462.

Articles et vidéos connexes

Point de vue de K.J.Jorgensen

Point de vue de S.Woloshin

Point de vue de Russell P. Harris, MD, MPH
du Centre Cecil G. Sheps pour la recherche sur les services de santé, Université de Caroline du Nord, Chapel Hill, Caroline du Nord (R.P.H.). https://doi.org/10.7326/M23-2908
Publication du 6 février 2024

L'auteur explique l'évolution des recommandations émises au fil des années par l'USPSTF, et revient sur la confusion que ces nouvelles directives engendrent :

La nouvelle proposition de recommandation de la U.S. Preventive Services Task Force sur le dépistage du cancer du sein chez les femmes dans la quarantaine : Le message doit-il changer ?

En mai 2023, l'U.S. Preventive Services Task Force (USPSTF) a publié un nouveau projet de recommandation pour le dépistage du cancer du sein, recommandant le dépistage par mammographie pour les femmes âgées de 40 à 74 ans (recommandation B) (voir ci-dessous les grades des recommandations, NDLR).
Il s'agit de la dernière d'une série de recommandations de l'USPSTF sur ce sujet, qui remonte à 1989. Bien que la recommandation concernant le dépistage des femmes âgées de 50 à 74 ans soit restée relativement constante au cours de ces années, la recommandation concernant les femmes âgées de 40 à 49 ans a été source de confusion pour de nombreuses personnes. Cette dernière recommandation peut contribuer à cette confusion. Comme j'ai participé à la fois à l'examen des données probantes (pendant 20 ans) et aux travaux de l'USPSTF (pendant 5 ans), je me propose de replacer la nouvelle recommandation dans son contexte en passant brièvement en revue l'évolution des données probantes et des recommandations.

A = forte recommandation, bénéfice substantiel ; B = recommandation, bénéfice net modéré ; C = recommandation sélective à discuter entre professionnel et patiente, bénéfice net faible ; D = non recommandation, bénéfice incertain et risques prédominants ;

.....la première recommandation de l'USPSTF (1989) sur le dépistage du cancer du sein faisait état de 3 essais contrôlés randomisés (ECR) fournissant des preuves de l'efficacité du dépistage du cancer du sein chez les femmes dans la quarantaine, puis de 6 essais lors de la deuxième recommandation en 1996 ; tous incluaient presque exclusivement des femmes blanches et comportaient de 2 à 5 cycles de dépistage. Une méta-analyse de 1995, citée en référence par l'USPSTF, de ces essais cliniques randomisés et de 4 études cas-témoins basées sur la population a révélé une réduction statistiquement significative du risque de décès par cancer du sein grâce au dépistage par mammographie chez les femmes âgées de 50 à 74 ans (rapport de risque, 0,74 [IC à 95 %, 0,66 à 0,83]) avec un suivi de 7 à 9 ans, mais aucune réduction statistiquement significative chez les femmes âgées de 40 à 49 ans (rapport de risque, 0,93 [IC, 0,76 à 1,13]). Ainsi, en 1989 et 1996, l'USPSTF n'était pas certain de l'efficacité du dépistage chez les femmes de 40 ans et n'a pas formulé de recommandation pour ce groupe, tout en recommandant la mammographie pour les femmes âgées de 50 à 69 ans.

Avec un suivi plus long des 6 essais, une méta-analyse de l'USPSTF de 2002 a constaté une légère réduction de la mortalité par cancer du sein chez les femmes de 40 ans et une réduction plus importante chez les femmes plus âgées : 1 décès par cancer du sein évité sur 14 ans de suivi pour 1792 femmes dépistées dans la quarantaine, mais seulement 838 femmes dépistées entre 50 et 69 ans.

L'USPSTF a également constaté les inconvénients du dépistage. Environ 1 femme sur 4 âgée de 50 à 69 ans et jusqu'à 1 femme sur 2 dans la quarantaine auraient au moins un résultat de mammographie faussement positif sur 10 ans de dépistage. Certaines de ces femmes subiraient des biopsies inutiles et la plupart d'entre elles souffriraient d'une anxiété au moins temporaire. Le risque de surdiagnostic et de surtraitement des cas de cancer du sein qui n'ont pas évolué - plus probable lorsque le dépistage commence plus tôt - constitue un autre préjudice. Bien que l'ampleur exacte de ce risque soit incertaine, même les estimations les plus prudentes indiquent qu'environ deux fois plus de femmes seraient surdiagnostiquées que celles qui éviteraient un décès dû au cancer du sein. Ainsi, le bénéfice était plus élevé pour les femmes plus âgées, mais les inconvénients étaient plus importants pour les femmes plus jeunes. Pour de nombreuses personnes, le bénéfice chez les femmes âgées de 50 à 69 ans semblait plus important que les inconvénients, ce qui était plus discutable pour les femmes dans la quarantaine.

Estimant que le bénéfice net (bénéfices moins inconvénients) du dépistage par mammographie augmentait probablement de manière progressive avec l'âge plutôt que d'augmenter soudainement à l'âge de 50 ans, l'USPSTF de 2002 a émis une recommandation positive qualifiée (B) pour le dépistage des femmes âgées de 40 ans ou plus. Le groupe a nuancé sa recommandation en écrivant que "[l]'âge précis auquel les avantages du dépistage par mammographie justifient les inconvénients potentiels est un jugement subjectif qui doit tenir compte des préférences des patientes").

Dans sa mise à jour de 2009, l'USPSTF a examiné les six RCT précédents et un nouvel RCT. Une méta-analyse a révélé que l'ampleur des avantages et des inconvénients était similaire à celle constatée en 2002. L'USPSTF de 2009 a estimé que le message qu'elle avait tenté de faire passer en 2002 - à savoir que la décision de commencer le dépistage devait être individualisée plutôt qu'universelle - n'avait pas été entendu. Au contraire, de nombreuses organisations influentes faisaient passer le message selon lequel tout le monde devait commencer le dépistage à l'âge de 40 ans. Essayant à nouveau de faire passer le message qu'il souhaitait, l'USPSTF a décidé de donner aux femmes âgées de 40 à 49 ans une recommandation de dépistage de type C, indiquant la nécessité de discussions individuelles. Utilisant des termes presque identiques à ceux de 2002, le groupe a écrit que "la décision de commencer [...] la mammographie de dépistage avant l'âge de 50 ans doit être individuelle". N'ayant trouvé aucun nouvel essai contrôlé randomisé, l'USPSTF de 2016 a utilisé la même formulation pour formuler la même recommandation en faveur de décisions individualisées (recommandation C).

Le projet de revue systématique 2023 n'a pas trouvé de nouveaux RCTs pertinents pour la décision de commencer le dépistage, pourtant le projet de recommandation 2023 était que toutes les femmes âgées de 40 à 74 ans subissent un dépistage (recommandation B). Le raisonnement qui sous-tend cette recommandation émane d'un désir louable de réduire la disparité de la mortalité par cancer du sein, plus élevée chez les femmes noires que chez les femmes blanches ; il s'appuie fortement sur des modèles d'analyse de décision.

Les modèles, qui reposent sur plusieurs hypothèses discutables, ont révélé que le dépistage à partir de l'âge de 40 ans permettrait d'éviter davantage de décès chez les femmes noires que chez les femmes blanches (1,8 contre 1,3 pour 1 000 femmes dépistées, sur toute la durée de la vie). La question de savoir si l'efficacité de la mammographie diffère selon l'ethnie n'a toutefois jamais été testée dans le cadre d'un essai contrôlé randomisé. En outre, aucune explication n'a été donnée sur la manière dont un dépistage supplémentaire réduirait la disparité, car les taux de dépistage actuels sont plus élevés chez les femmes noires que chez les femmes blanches.
Le projet de recommandation ne dit rien sur l'individualisation de la décision de commencer le dépistage, comme l'avaient fait les recommandations de 2002, 2009 et 2016.

La confusion concernant les recommandations de l'USPSTF pour le dépistage des femmes dans la quarantaine sera peut-être réduite si l'on comprend la cohérence sous-jacente des recommandations de 2002 à 2016, et si l'on comprend la différence entre les preuves pour ces femmes et celles âgées de 50 à 69 ans.
Mais en ne reconnaissant pas la nécessité pour les femmes de prendre une décision personnelle, la nouvelle recommandation de 2023 risque d'aggraver la confusion.

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Thèse de psychopathologie-appel à témoignage

Je suis doctorante en psychopathologie au laboratoire CERPPS à l’Université Toulouse Jean Jaurès. Je réalise une étude sur les trajectoires des personnes ayant vécu un évènement traumatique (notamment cancer) et leurs proches, dont le protocole est validé par le Comité d’éthique de la recherche de Toulouse.
(Respect du le Règlement Général de Protection des Données)

Flyer PDF :

Description de l' étude avec le lien du questionnaire ci-dessous : 

🎓Dans le cadre de ma thèse en psychologie à l'Université Toulouse Jean Jaurès, je réalise une étude sur le vécu au cours du temps à la suite d’un évènement traumatique (attentat, catastrophe naturelle, accident de voiture, agression, décès soudain, cancer, AVC, etc.). Je recherche des participant(e)s ayant vécu ce type d’évènements, directement, en étant témoin, en apprenant que cela est arrivé à un proche ou dans le cadre de leur profession (militaire, etc.).
📝Vous pouvez répondre au questionnaire si vous avez minimum 18 ans et que vous n’avez pas de diagnostic de maladie neurodégénérative, retard mental ou trouble psychiatrique décompensé. Le questionnaire dure environ 25 minutes et les données sont rendues anonymes à partir d’un code participant. Pour y participer, cliquez sur le lien suivant : https://enquetes.univ-tlse2.fr/index.php/749687?lang=fr
🤝Votre participation permettra de mieux comprendre les différents vécus et processus associés suite à l’exposition à un évènement traumatique et ainsi mieux adapter les prises en charge. Merci d’avance pour votre participation qui sera précieuse pour la réalisation de cette recherche !

Merci pour votre retour.
Emma Gendre

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